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légères, des baraquements de forUine y donnaient abri aux ni ?gotialores qu’attiraient les forts contingents con- centrés sur la frontière ; les soldats eux-mêmes y instal- laient leurs femmes {focariae). La longue paix qui suivit les grandes expéditions du principat de Tibère en favorisa le développement ; en 70, les canabae de Castra Vetera (Xanten) représentaient, nous dit Tacite, une sorte de municipe ’. La plupart des grandes villes du Rhin et du Danube doivent leur origine à des rici canabarum de ce genre -.

Au second siècle, le même phénomène se reproduit sur la rive droite du Rhin, dans le Limes. Dans le pays de Bade, en Wurtemberg, dans le Taunus, les inscrip- tions nomment quelques-uns de ces rici ’. Aux abords de chaque fort, les fouilles mettent au jour les traces des canabae. Souvent le village semble une simple et modeste dépendance du camp. C’est là qu’habitaient les soldais, une fois que Septime Sévère les eut autorisés à demeurer hors du fort ; c’est là que parfois ils s’établis- saient après avoir reçu leur retraite. En d’autres cas, le vicus canabarum s’est développé jusqu’à prendre les dimensions d’une véritable ville ; tel le ricus de Nida (Heddernheim près de Francfort), devenu la capitale de la civitas Taunensium ’. Ici d’ailleurs, comme sur la rive gauche du Rhin, c’est l’abandon du camp et le départ de la garnison qui semblent donner l’essor à la prospérité du ricus.

Primitivement, en effet, les canabae devaient se trouver vis-à-vis du camp dans une dépendance étroite * ; elles en occupaient le territoire et, par conséquent, leur subordination aux autorités du camp devait rappeler celle des rici aux villes d’Italie. En efîet les canabenses n’ont pas de domicile légal, au sens propre du mot ; ils résident simplement ad canabas /eyionis ’ ; leurs enfants sont censés nés « in castris » ; ils ne sauraient posséder la respublica une organisation corporative présidée par le curateur des vétérans et des citoyens romains leur en lient lieu ’. Seule la disparition de l’établissement militaire peut, en droit, donner à la bourgade son autonomie. Mais la rigueur de ces prin- cipes dut s’atténuer de bonne heure. En accordant aux vétérans, vers la fin du ii’ siècle, le droit municipal complet, Marc Aurèle ou Septime Sévère ne firent sans doute que consacrer un état de choses déjà existant en fait. Les vici canabarum paraissent dès lors complète- ment assimilés aux villages non militaires et prennent un nom local ’. Les postes militaires se trouvent sim- plement juxtaposés aux centres civils auxquels ils ont donné naissance.

Magistrats des vici. — Le terme de vicomagislri ne s’applique qu’aux vici urbains [vicomagistri]. Nous avons vu que, à la diQ’érence des villes, le ricus ne constitue pas une respubiica, mais que ses liabitants,

< flist. IV, 22 : 9ubversa longae pacis opera^ m modum municipii exstructa. — 2 11. DragenHorff, Westdeutschiand zur Rômerzeit (19t2), p. 31, 32, ^. Il en est de même d’ailleurs eu Aoglclerre et en Espagne : Corp. inscr. lat. VII, p. 3(i, 37 ; II, p. 369. — 3 Corp. inscr. lat. XIII, n. 6»il5, C388, f.389, 0*21, 6*33, 6i5+, 07 W, 7270, 7335, 7336, etc. ; cf. Kornemannn, Xur Sladtcntstehunij, p. 4R, 49 ; ScluiUcn,’/î/iein. Mu>. 1895, p. 529, 530. — ’ Nous citerons comme eicmple les canabae voisines du camp de la Saaihurg ; Jacohi, Das Rùmcrcastell Saalbiirf/, 1897, p. 112 s(|. On trouvera d’autres détails dans la grande publication, Dat ràmisch-germanitche Limes, fasc. 20, p. Il (Gross-Kolzcnburg), fasc. 9, p. 16 (Ncckarliiirlien), etc. — ^ Corp. inscr. lat. XIII, 2, p. i25. — <> Mommsen, Die rôm. Lagerslâdte, dans Jïermes, VII, p. 299 sq., avait poussé ii l’es triime la théorie de la suliordination du riens canabarum au camp. Ou trouvera In discussion de ses idiis résuo-ie par A. Scliulten ap. l’aulj-Vis«o«a, IhaUnajcL. s. v. Canabae.

ricani, possessores rici, sont pluttH associés en une sorte de conrentus. Ils n’ont donc pas de magistrats à propre- ment parler. Les personnages à qui la communauté du ricus délègue l’autorité portent, le plus souvent, le même titre que les présidents d’associations soit religieuses, soit civiles, celui de magisler’^. « Les rici», dit Fes- tus, « de même que les pagi, élisent chaque année des magistri »". Des inscriptions assez nombreuses confir- ment en effet ce témoignage, tant en Italie ’- que dans les provinces’^. Ces wia^/s^/’/, de même que les duoriri des municipes ou les consuls romains, sont le plus souvent, semble-t-iJ, au nombre de deux ", cependant il s’en ren- contre parfois trois ou quatre ’ = .

Malgré la forme affirmative de la phrase de Festus.. nous n’oserions affirmer que tous les rici aient toujours eu leurs magistri ; il peut se faire que les magistri du pagus, mentionnés bien plus fréquemment encore, aient souvent exercé leur autorité sur les diflerentes bour- gades de la circonscription, ou du moins que les rici, dans lesquels résidaient les magistri du pagus ou l’un des magistri du pagus, n’aient pas eu, en outre, de magister particulier. Ainsi s’expliqueraient les for- mules dans lesquelles les magistri du pagus font, par exemple, une dédicace, de rici sententia ’", ou celles encore dans lesquelles le dédicant est simplement dési- gné par le titre de magister ", sans que l’on sache si sa fonction se rapporte au pagus ou bien au ricus.

Souvent aussi nous rencontrons dans le ricus. de même que dans le pagus, un édile. La loi du ricus de Furfo charge l’édile de la surveillance du temple et des intérêts du temple ’^ L’édile fut peut-être à l’origine un fonctionnaire d’ordre subalterne, désigné par ]es posses- sores ou les magistri du ricus, pour veiller sur les édifices de la communauté et en particulier sur le lieu de culte propre à la bourgade. Il semble bien, en effet, qu’à Furfo l’édile, dont la lex ricana fixe les devoirs et les droits, n’ait été qu’un subordonné des deux person- nages dont les noms figurent en tète de l’inscriptioli et qui, en qualité sans doute de magistri, quoique ce titre ne soit pas exprimé, dédient le temple du ricus ". Nous trouvons ailleurs, en effet, à une date, il est vrai, très postérieure et dans une province éloignée, dans le ricus canabensium de Troesmis, deux magistri et un édile*". .illeurs, à Apulum, en Dacie, ce fonctionnaire subal- terne est appelé non plus édile, mais simplement aedis custos -’.

Il est possible qu’à l’origine l’édile ou les édiles des rici, comme ceux du pagus, n’aient eu d’autre charge que la surveillance des édifices religieux ou autres rele- vant de la communauté, dont ils n’auraient guère été que les aeditui (portiers) --. Ces surveillants apparaissent néanmoins, de bonne heure, comme investis d’une cer- taine autorité. La lex ricana de Furfo attribue à l’édile

— 7 Scliullen, Hermès. XXIX, 1894, p. 503 si|. — » Horainsen, Bermet, VII, p. 313 sq. = GesammeUe Schriflen, VI, p. 190 sq. — ’ Mommsen, Hfrmes, VII, p. 323 si|. = GesammeUe Scliriflen, VI, p. 199 sq. — lo Kornemanu, art. Conven- tus, dans Pauly-Wissov»a, llealencyclopûdie ; J. Hatzfeld, Au//, de corr. lieU. 1912, p. 100, 161. — "Fest. éd. Mucller, p. 371. — 12 Corp. inscr. Int. IX, 3374, 5052 ; V,n. 1829. 1830. — 13/6id. III, 7466,7536 ; VIII. n. 62670272 ; magislrides easlella des environs de Cirla ; n. 9317, 12 004, 17 327, etc. — 1* /4id. V, n. 1829, 1830,111, u. 3776,3777 = 1,1460, 1467, 1820. — t» /4irf. n. 5052 (trois mayisd-i) ; IX, 3521 (mais ce sontdes mojis/ridupojius) ;XIII, n.3 {qmlAine) : mag{iitri) guater et quaesloris.

— iilbid. IX, n. 3521 ■.magislripagi,devicisententia. — iT Jbid. IX, n. 3574, 4131.

— t»lbid.l,o. 3513 = I,n. 603. — 19 Mommsen, Gfsamme ;(eScAri/’(en, VI, p. 19», „. I. _20 Corp. inscr. lat.Ui. n. 6162, 0166. —’-I Ibid. n. 1158. — SîScImllen. Ùie Landgemeinden, liws Phitulogus, l.M, 1594, p. 665.