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pire pour assurer à Ulysse une heureuse traversée’. Avant (le prendre la mer, on offre un sacrifice à Poséidon - ou aux dieux en général, en leur demandant la même intervention favorable ^ Dans V/liade, Achille promet à Borée el à Zéphyr de belles offrandes, s’ils consentent à venir près du bûcher de Palrocle . On a reconnu dans ce passage les premiers éléments du culte des morts ^ Sur la prière d’Achille, les vents accourent et s’emparent de l’âme du héros pour la conduire dans le monde infé- rieur, pendant que le corps disparaîtra dansles flammes. Cette dissolution complète des corps et la séquestration élcrnelle de l’âme dans l’IIadès sont nécessaires pour empêcher le retour du mort el assurer la tranquillité des vivants. Quant aux libations de miel et d’huile, faites par Achille en l’honneur de Borée el de Zéphyr, elles n’ont pas seulement pour but d’alimenter et d’activer la flamme, elles doivent également attirer les vents dans le voisinage du bûcher.

Pour apaiser la puissance ennemie des vents qui dispersent navires el malelots ’, on a recours à des sacrifices humains : Ménélas, avant de quitter l’Egypte, leur offre deux jeunes enfants» ; Eschyle appelle Iphigénie « la victime qui apaise les vents » (ôuci’a ^tïucivsaoî) -’. Virgile fait allusion à toutes les victimes de la tempête’». A l’époque historique, en certaines circonstances, on immole encore des victimes humaines : Thémislocle, après le combat naval, sacrifie des prisonniers perses " ; Euslathe parle d’hommes précipités dans la mer en l’hon- neur de Poséidon ’2 ; à Leuctres, avant la bataille, Ëpa- minondas promet à Typhon le sacrifice d’une vierge ".

A l’origine, le culte des vents présente donc un carac- tère extraordinaire et nettement expiatoire. D’origine très probablement étrangère, perse ou phénicienne, il répond à des besoins accidentels, et u’apparait ([ue dans des moments de crise, en vue de conjur( !r des puissances ennemies. Souvent célébrésur la lerre étran- gère (immolation d’Iphigénie à Aulis, sacrifice de Méné- las en Egypte), il semblerait même que ce culte soit en dehors de la cité el qu’il doive disparaître avec les évé- nements qui l’ont provoqué’.

Antérieurement au sanctuaire consacré à Borée par les Athéniens aux bords de l’Ilissos ’*, les Delphiens avaient déjàélevé un autel à Thyia ’■'. Sur le marché de Chéronée se dressait un poiixôç twv àvjix’jjv’". On connaît l’existence d’un TÉiAEvoç aux vents à Mégalopolis ", d’un aulel de Zéphyr à Athènes". Borée était l’objel d’un culte à Tiiu- ria. Sur leTaygèteon immolait un cheval en l’honneur des Vents - à Tarente un âne ^’. On offrait à Typhon un bélier noir-’-. Les Arcadiens sacrifiaient j.aToaTtaïç xnl Ouél’k-xic ; TE zal PpovTaï ; "■’ . On les invoquait avant de prendre la mer, on les remerciait au retour d’un voyagi’ heureux’-' ; des fêtes étaient organisées en leurlionneur-% )M leur offrait des gâteaux’-.

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A Méthana, près de Corintiie, pour préserver les vignes d’un certain vent, se célébrait une curieuse cérémonie-’ ; un jeune coq était coupé en deux, et deux hommes faisaient en courant le tour de la vigne, cha- cun par un chemin opposé et portant une moitié de l’ani- mal ; au point où ils se rencontraient, ils enterraient l’oiseau. De même à Tanagra, chaque année, un jeune liommedevait traîner un bélier autour de la ville, afin de la préserver des épidémies qu’amènent les souffles de l’atmosphère ’-*. A Titane, près de Sicyone, une fois l’an, on offrait un sacrifice aux quatre grands vents adorés dans quatre pdOpoi différents, el on chantait un hymne en leur honneur -".On peut également rapprocher de ces cérémonies le sacrifice de l’agneau à Cléonée, en Argo- lide, contre la grêle ’".

Il y euldonc, dans la (irèce classujue, un culte réel des vents, universellemenl répandu et qui parfois rappelle celui des divinités olympiques. Mais en général les sacrifices qui leur sont offerts ont plutôt un caractère expiatoire : holocaustes dans lesquels la victime esl entièrement consumée, comme chez les Perses et les IMiéniciens". Quelquefois, à Méthana par exemple, la victime est enterrée ^- ; jamais on ne mangeait la chair des animaux ainsi immolés ; nous savons que les Grecs se sont toujours abstenus de la viande de clieval ou de mulet".

Souvent aussi ces cérémonies ont un caractère chlho- nien : le coq elle mouton étaient les animaux offerts aux /0()vi9i’*,les animaux étaient souvent de couleur sombre^% les sacrifices avaient lieu pendantla nuit^’^. Ces offrandes ont pour but de proléger les récolles contre l’influence nuisible des vents et d’implorer le secours des divinités de la terre. Un exemple typique de ce culte est fourni par le sacrifice annuel, célébré pendant la nuit à l’aufel des Vents de Titane ; le sacrifice proprement dit à l’autel, la visite mystérieuse aux pdOfoi, le chant ou la récitation des formules de consécration concourent à rappeler les grands mystères chthoniens. Il y a là une significallon très précise : ce sont des sacrifices offerts aux divinités infernales. L’elfusion du sang est le rite le plus impor- tant : il doit être bu par la terre ^■. De même, les poOcot ne se rencontrent que dans le culte des héros ou des morts^* ;par là nous remontons jusqu’aux origines de ce culte. Le monde souterrain est peuplé de fantômes effrayants qu’il rejette parfois sur la lerre ; ces offrandes ont pour but d’empêcher leur retour, de les apaiser et aussi de les rendre favorables ".

II. Le culte des Ve.ïs dans lk mumu’, homain. — A Home, où les divinités de l’agriculture étaient très pojjulaires *", le culte des Venls se rattache à celui de .lupiter el de Junon, invoqués comme divinités du ciel, et àcelui de Neptune, dieu de la mer ^’. En ’2.’j !)avant ,I.-C. L. Cornélius Scipion, après sa victoire sur la Hotte car-

1 (M. V, ir,8 ; XI, lin, _ 2 M. III, i :k. _ n jo. m, [y) ■ //. n, soi ;. - ’- //. Wlll, 19k. — 5 K. Uoliiio, Psiiclu : i’ ml. p. ll-ii. — li l Stcngel, Jalirb. fur J’Iiihl 1887, p. 6*9. — llcsiod. Thcog. 873. — 8 Herod. Il, 119. — 9 Acscli. Aj/am. 2U. — ’0 Virg. Acn. VI, 335. — il plut. Thcmist. 13. — 18 hmen. am. p. i98. — 13 Plut. Pelop. 21. Cf. P. Slcugcl, Hermès, XVI, iSSI, p. 31G-7 ; Opferbràuclie lier Criechen, p. Uii-7. — H llcrod. Vil, 189 ; Plal. Phatd. Iiilrod. : Aciian. Nat. an. Vil, il ; Var. hht. XII, Cl. — i’. Ilorod. VU, 17S. — io Pausaii. lX,3t, 2. — npaus. VIII, 36,4. — <»ld. I, 37, I. -l’JAiliaii. Var. Iiist. XII. Cl.

— 2" Fcslns, p. 181. — SI llcsycll. ». u. — a llcrod. VII, ml ; Xcn. Anal,. IV, 3, i ; Ai-islopli. Ilan. 8 17. —23 Paiisan. VIII, 29, i. — 21 huer. Gr. 111,77. — 25 llosycli. s. 1). !) !, ?../.,>,.,■.. - 2i ; Alhcil. IV, 134 1 !. —SI p«„gail. Il, 34, 3. _ 28 Id. Il, 22, 2.

— 2 !» Id. Il, 12, I : . Il,„.»ri( l,„. 4„>,.,.,, !»• où ,.,r ; i.ios 5 ’.ipiil ; u« v», :’, 4,i itS. :

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6 : n m cum aignum dédissent adesse Jam grandinem^... pro se qiiisque aliits agnum vnmoiaiiat, aliiis puUum... ;si t^nia neqne agnum ncque pttUitm habehat^... digitum situm... graphio piiiigcbat el hoc sanijuine titabat. » — ^i Xcnopli. C’j/cop. Vlll,3, 24. — 32Pausjn.^ e. — SJPorplijr. Heabaliu. 1,14 —3'>K. Holido, op. cit. p. 242 ; Ucubner, Ile incubalione, p. 47. — & Sleiigcl, Gr. Cultusall, p. 131 ; llor. Epod. X, 23 si| — 30 Pousaii. (. e. — ;n Uci’od. Vil, 191 : ’E.tofi» i :<ii.îvt !;... ., ; |ii,oi t ? iviV.,,. — :s ou. XI, 30 ; Luciaii. Nekijom. 9 ; Pausan. IX, 39, 4. — •« ! P. Slcugcl, Hermès, XVI, ISSl, p. 340-350 ; Ul. (ipfurbr,ii,clie dcr Cru-dirn, p. 14G-I.12. — *0 Virgil. Oeorg. 1, 51 ; ill, 273. - H J. Toulaiu. l’S CuHes païens dans l’empire romain, I, p. 290.