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lui consacrèrent deux tragédies aujourd’hui perdues’ ; elle fui l’objet de plusieurs chansons de table- ; elle était représentée sur des broderies^ et sur des vases peints ’.

Connu antérieurement au V siècle, le mythe de Borée et d’Orithyie était sans doute originaire de Thrace K Borée, après avoir enlevé sa fiancée, l’aurait transportée dans les montagnes de l’Haemos, au rnont Sarpédon ^ D’après M. Maas -, Boréa, le féminin de Boréas, doit avoir été le nom de la côte de Thrace. Borée tirait donc son nom de celui de cette région (c’est à proprement parler la puissance sauvage qui souffle des hauteurs de laTiirace, à la fois le dieu de la montagne et de la tem- pête). Mais à partir du v= siècle la légende avait acquis droit de cité en Atlique ; nous en avons pour garantie récit des auteurs, qui tous désormais situent le lieu de l’enlèvement en un point du territoire athénien. Arcé- silaos ’ raconte qu’Érechthée aurait envoyé sa fille Orithyie ofTrir un sacrifice à Alhéna Poliade sur l’Acro- pole ; c’est alors que Borée l’aurait vue et ravie. Héro- dote place la scène sur l’Aréopage ’. Chœrilos, dans un poème sur la guerre des Parthes’", rapporte qu’Orilhyie cueillait des fleurs aux sources du Céphise, lorsqu’elle fut aperçue par Borée ; la plupart des auteurs donnent les bords du Céphise pour théâtre à l’enlèvement d’Ori- tliyie". Enfin, une amphore d’origine attique, trouvée à Vulci et fabriquée entre les années -47o el 400 av. J.-C. ’-, reproduit cette scène, déjà populaire à cette date (fig. 7379j.

En de semblables circonstances. Borée vint encore au secours de ses fidèles àThurium, en (jrande-Grèce" ; il dispersa la flotte sicilienne de Dionysios ; à Mégalopolis, il sauva l’armée d’Agis ’*. Les hymnes orphi([ues ren- ferment une invocation à Borée’

Au premier siècle av. J.-C, la Tour des Vents à .thènes marque le terme de cette évolution (fig. 3887) : les vents y sont représentés sous une forme liumaine et nettement définie ; ce sont à la fois des forces de la nature divinisées et en même temps des Zx(Love^. Ils sont au nombre de huit, quatre bons et quatre mauvais : Borée, Kaikias, .Vpéliotès, Euros, Notes, Lips, Zéphyr et Koros. Cliacun d’eux est caractérisé par un attribut déterminé : Borée est revêtu d’un manteau flottant et souffle dans une conque, Zépliyr lient une fleur, Notos un vase rempli d’eau, Kaikias un bouclier avec un grêlon ou un morceau de glace (fig. 7380) ".

En tant que oiift&ve ;, les divinités du vent sont en rela- tion avec le monde des morts : Ménélas est emmené dans l’Olympe par Zéphyr ; à l’époque liellénistiquc, ils participent à l’apothéose des morts divinisés ".

X côté de ces génies du vent on invoqua également,

1 Wrlckcr, Àesrk. Trilog. p. 56* : Gr.Trag. p. J’IS. — 2 Scliol. do IJallistralc, lle^ycliius, s. v. i,} !.» ;*-, :. — 3 Nonn. Dion. X,XIX, 188. — ’ Vase de Munich i WelcLcr, Ant. Dcnkm. lU, p. lU ; Hcrrol, Mon. grecs, 1874, p. +ii ; amphore de uici (youtellei Annatei de C Jn8t. liiZ^, p. 35i),etc. Cf. noie li. Sur des miroirs grecs : cf. J/irotr grec « retief, puhlic par A. de Hidder dans les Monuments Pioi, l. IV, 1897, p. 97. fig. 0. — 5 Hillcr von Gaerlringen, De Graecoriim fahulis ad Thraces pertinenlibus quaestiones criticae^ Berlin, 1886, p. 7-11. — 6 l’hcrecyd. ap. schol. Apollon. I, il 1 ;Sinionid.iVfiumacA.schol. Apollon, !, 2 11- :! 18. — 7 £. Maas, Uoreas un’i J/icAoe/. dans les Jahreshefte desoest. arcfiaeol. Jnstituts, XII, i’JlO, p. 1 17-1 ii. — «Schol. adOJïss. XIV, 5.13. — 9 llerod. VII, 18 ?. — 10 Schol. Apollon. /. c. — " Plal. Pliaed. Inlrod. ; Apollon. 1, il3 : Apollodor. BMiolh. III, 15, 2 ; Pans. XIX, 6 ; Dion. Hcrieg. 190 ; Slal. TUeh. XII, 630 ; Nonn. Uion. XXXIX, 190 ; Avienus, Ùescr. orb. 585. — ’2 Kurlwaeogler et Kcichhold, Gr. Vasenmalerei, II, p. 189, pi. 94. S’oir uoircp. liO, noie 2. — 13 Aelian. Var. hist. XII, 61. — l’Fau- san. 36,* el 27, 4. — ’S Uymn.orph.M. — ’6W. Judeich, Topogrnphif von Alhen,

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comme divinités de l’atmosphère, les grands dieux du Panthéon hellénique : Zeus Euanémos ", Apollon Ekbasios -", Alhéna Anémotis -’. Hermès en particulier fut considéré comme un dieu de l’air-- ; Hermès Psycho- pompe est le conducteur des âmes vers le séjour de la lumière et des vents ; c’est aussi le dieu des pâtres et de la fécondation, le protecteur des voyageurs [merclrils].

2. Le Culte. — Divinités de l’atmosphère, ces person- nages ont une influence certaine sur le climat, l’agri- culture et la navigation. Ce sont des puissances redou- tables, qu’il faut apaiser et se concilier. Cette action des vents sur la végétation est très nettement exprimée sur une coupe cyrénéenne trouvée à Naucratis : la nymphe Kyrènè, debout, tient à la main un rameau de silphium ; les génies du vent l’entourent ; ce sont peut-être les Boréades, représentants du vent du nord, qui, après avoir franchi la Méditerranée, verse aux plateaux de la Cyrénaïque les ondées vivifiantes. On retrouve ainsi sur ce vase, heureusement exprimée, une image de la richesse et de la fertilité de ce territoire, l’action et le jeu des forces bienfaisantes qui en fécondent le sol (fig. 4309) ".

Dès les temps les plus anciens, la magie elles offrandes à ces divinités furent mises en œuvre pour conjurer les puissances malfaisantes et appeler les vents favorables. Médée avait le pouvoir de détourner la tempôlc par ses conjurations-’ ;àTitane, près de Sicyone, des formules magiques, remontanlà Médée, étaient employées contre les vents. Corinlhe entretenait des àv£[j.&xoÎTai ^" ; Athènes possédait des EùSivE|xoi, grande famille reli- gieuse qui jouait un certain rôle dans les mystères d’Eleusis’-. Senèque nous apprend l’existenceàCléonée, avec lu même pouvoir, de y’ïXaÇo-iùÀaxe ;. Empédocle avait acquis en ce genre une grande renommée ; on lavait surnommé xc.Àu(7av£[j.a ; -".

11 faut rattacher à ces pratiques magiques certains faits d’anéraoscopie, ou observation religieuse des venls, soit au moyen de feuilles volantes ((pu>./.o ;j,avTe ;a), soit, comme à Dodone, par l’agitation d’un feuillage ou de clochettes sonores [ri.NïiN.NAiiULUM, p. 3’i2j. Mais, en règle générale, la divination par les vents a été peu en usage en Grèce ; les forces delà nature personnifiées sont des divinités trop souvent farouches et peu communica- tives. Éole est un gardien des venls sauvage et capri- cieux qu’on ne songe pas à approcher ; l’imagination des grammairiens de basse époque seule en fit un docte météorologiste, élève de sa maîtresse Hiiipo, fille du centaure Cliiron -’.

La prière et le sacrifice ont été de bonne heure employés pour apaiser les venls. DansVOdijssée, Calypso el Apollon exercent sur ces êtres redoutables assez d’ein-

p. 334, pl. à la p. 332 ; cr. l’arlicle Wiiuletnrm dans Baumeisler, flen/c-m(H. p. -IIM, c’. fig. 2370 (= noire fig 7380). Sur les noms des venls lOir Kiihl, ZJc Gruccis vcn- torum nomini««s, Marhurg, 1909 ; cf. l,m,Jahreslicfte d. aster. Inst.WW (1911), p. 119. — <7I’ind. ’■y/j/mp. Il, Ii9. — i»Knrlwaengler, Ûieand/ren Ccm/n«i, Leipzig, I900,pl.6i,67.— «M’ausan. 111, 18, 8.-20 Apoll. Uh. 1, 906, IlSO. — 21 Or/)/i. /lymn. 14, 11. _ 2i Roscher, Hermès der Windgotl, Leipzig, 1878. — 2^ G. Perrol, hisl. de r.4r(, IX, p. 497 cl 499, fig. 243 [23]. Rapprocher de ce vase nue conpc Irouvée à Sparte ; cf. C. Dugas, Vases cijrénéens du musée de Tarente, dans la Jlerue arehéol. 4- sér. XX, 1912, p. 99 tt noie a la p. 100. — 21 pausan. Il, 12, 1 ; Phdoslr. Vit. ApoH. vil, 7, 4 ; Bcrgk. Poet. lyr. III, 897. — 2i O ! àviji’-a ; «-n^Co-^ii-T ; *’ =a7tTo-.ovT V J-àjzi.vi. KofMo,. Ilesych. 8. v. ; Euslalh. ad Od’jss. X, 82. — 2» Arrian. Auah. III, 16, 8 ; TœpITer, /»«. Ueneal. 110 sq. — " Clem. Alex. Strom. VI, 7, 45 ; Diog. Laerl. VIII, 57 sq. De même Pylhagorc el Lpiménide (Horph. Vit. Pgth. 29 ; cf. Jamblicb. V,p. 133 ; l’IuL Quaesl. nal. VlU, 8. I).— 2» A. liouché- Uclercq. Histoire de la divination dans l’anlii/uité, I, p. 202-203.