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BUXUM, πυξίον, πυξιδιον, 1[1], le sycomore 2[2], etc. Celles qu’on taillait dans le bois de citronnier 3[3] ou dans l’ivoire 4[4] étaient,

Fig. 6711. – Tablette servant de registres de comptes
naturellement, des articles de luxe. Chacune avait la forme d’un rectangle plus petit, destiné à recevoir l’écriture, de telle sorte que les quatre marges, formant un cadre en saillie, protégeaient le texte, quand plusieurs tablettes étaient serrées les unes contre les autres. Dans la partie en creux, on coulait 5[5] une légère couche de cire [CERA, κηρόζ, μαλθη, μαλθα 6[6], mélangée d’une couleur noire ou très foncée 7[7]. On traçait les caractères à la surface avec la pointe dure et acérée du style [STYLUS]. Quand la main appuyait sur le style un peu fortement, il pouvait arriver que le bois égratigné conservât, après qu’on avait égalisé la cire pour de nouvelles rédactions, la trace des anciennes 8[8] ; on n’était sûr d’avoir bien effacé que si on avait gratté jusqu’au bois, ad lignum 9[9].
Fig. 6712. – Tablettes manuelles.
D’ordinaire on groupait les tablettes, au moins par deux, assemblage qui formait un diptyque, comparable, moins la décoration, aux diptyques consulaires [DIPTYCHON].
Fig. 6713.
Ce δίπτυχον ou codex 10[10] rappelle aussi les diplômes de bronze délivrés aux soldats [DIPLOMA] ; mais, au lieu du codex duplex, on emploie de préférence pour les actes importants le cahier de trois tablettes (codex triplex, τρίπτυχον) 11[11], et on en fait aussi qui ont cinq tablettes (c. quinquiplex, πενταπτυχον 12[12]) et davantage (c. multiplex, πολύπτυχον 13[13]). Les tablettes sont unies les unes aux autres, par deux anneaux ou deux cordonnets, formant charnières, passés dans des trous le long de la marge gauche. Et de là vient que le cahier est presque toujours désigné par le pluriel tabellae ; chaque page est appelée cera, de sorte qu’il y a dans le même cahier plusieurs cerae 14[14]. Pour les plus petits modèles, qui sont en grande faveur à cause de leur commodité, on emploie volontiers le terme

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de CODICILLUS, ou celui de pugillares (tabellae) πυκτίον parce que le cahier tient aisément dans la main fermée 15[15] ; les plats en sont quelquefois enrichis d’ivoire et d’or 16[16]. Pour enregistrer les actes publics on fabrique au contraire des tabulae de grandes dimensions, dont les énormes codices, quand on les change de place, doivent être transportés sur les épaules [FORUM, fig. 321]. C’est le codex de tablettes en bois qui a conduit au codex en feuilles de parchemin (codex membranaceus) 17[17], de plus en plus appréciés depuis le commencement de l’ère chrétienne, et par là au livre moderne [LIBER] 18[18].

Non seulement les monuments de l’art représentent souvent des tabellae ceratae à côté des autres fournitures nécessaires pour écrire (fig. 6712, 6713) 19[19], mais encore on en a découvert un grand nombre, tant grecques que latines, portant à leur surface des textes de diverses natures. L’Egypte nous en a rendu plusieurs, d’époque ptolémaïque, où on peut voir des signes sténographiques, des exercices scolaires d’écriture et de calcul, des comptes d’entrepreneurs, etc. 20[20]. Mais les plus intéressantes sont celles qui ont été exhumées à Pompéi depuis 1875, et notamment la série de 153 tablettes retrouvées en place dans le coffre où les avait rangées le banquier L. Caecilius-Jucundus, avant le tremblement de terre qui ensevelit sa maison, en 63 de notre ère 21[21]. Ce sont des quittances en écriture cursive 22[22], qui lui avaient été délivrées depuis 45 jusqu’en l’an 62. Les tablettes en sapin, ont en moyenne une hauteur de 0 m. 10 à 0 m. 15 environ, sur une largeur plus faible ; la plus petite me-

Fig. 6714. – Tablette à trois feuillets ouverte.
sure 0 m. 09 sur 0 m 07. Les triptyques y sont beaucoup plus nombreux que les diptyques. L’exemplaire représenté dans la figure 6714 fait comprendre avec toute la clarté désirable comment les documents étaient enregistrés à la surface des tabellae et comment on s’y prenait pour les rendre inviolables. A côté de beaucoup d’avantages ces planchettes enduites de cire présentaient un grave défaut 23[23] ; c’est qu’il était très facile d’en altérer le texte,
  1. 1. Prop. III, 23 ; Ov., Am. IV, 23, 8 ; Schol. Ad Hor. Sat. I, 6, 74 ; Hesych. S. v. ; Artemid., Onirocr. I, 53
  2. 2. Tabl. Provenant d’Egypte à la Bibl. Nat. A Paris, Rev. Arch. VIII, p. 461.
  3. 3. Mart. XIV, 3.
  4. 4. Mart. XIV, 3 ; cf. les diptyques consulaires DIPTYCHON et la fig. 2454.
  5. 5. Ov. Ars Am. I, 437 : « Cera rasis infusa tabellis.
  6. 6. Poll. X, 57 ; Aristoph. Fragm. 206.
  7. 7. Peut-être du goudron Thomson, p. 20, not. 5. Tabl. De cire rouge : Ov. Am. I, 12, 11.
  8. 8. Catull., op. IV, 23 ; Ov. Ars Am. II, 395. Tabl. De Pompéi.
  9. 9. Cato ap. Front, Ep. ad M. Ant. I, 2 p. 99 Naber.
  10. 10. Sen. Brev. Vit. 13, 4 ; Isid. Or. VI, 8
  11. 11. Mart. XIV, 6.
  12. 12. Mart. XIV, 4.
  13. 13. Ibid.
  14. 14. Ov. Am. I, 12, 23 ; ...... ; Gaius, II, 104.
  15. 15. Catull. XLII, 5 et 11 ; Sen. Ep. 108, 6 ; Plin, Hist. Nat., III, 69 ; Codicilli Vitelliani, tout petits, pour billets doux fabriqués par un Vitellius ; Mart. XIV, 8-9 ; cf. pugillariarius : Corp. Inscr. lat. VI, 9841.
  16. 16. Prop. III, 23, 7 ; Orelli 3838 ; Vopisc Tuc. 8.
  17. 17. Mart. XIV, 7, Corp. inscr. lat. X, 6.
  18. 18. Sur les tabellae en général voyez encore Cic., Catil. I, 5 ; Tusc., V, II ; Ov. Am. III, 14, 31 ; Ars. Am. III, 469 ; Pont. IV, 2, 27 ; Mart. IX, 103 ; Juven. VI, 199 ; VIII, 142 ; Tac. Dial. d. orat. 36 ; Fest. p. 359.
  19. 19. Vases peints ; Cf. EDUCATIO, fig. 2598 ; MINERVA, fig. 5047. Statuettes : Heuzey, Figurines du Louvre, pl. xxxi, fig. 1 ; Catal, t 1, p. 193 ; Furtwängler, Mitteil. d. deutsch. arch. Inst. VI (1881), p. 174. Peintures de Pompéi : Mus. Borbon. pl. xii ; Helbig. Wandgemälde, 698, 1048, 1049, 1422-1426, 1719, 1720, 1721, 1722, 1723, 1724, 1725, 1726 ; Annali dell’ Istit. 1843, p. 46, lav. agg. CD ; Welcker, Rhein. Mus. nouv. sér. XVI, I (1860), p. 155. Cf. AGONOTHETA, fig. 185 ; ATRAMENTUM, fig. 623 ; FORUM, fig. 3261 ; RETICULUM, fig. 5937.
  20. 20. V. plus haut p. I, n. 8 et Rev.. archéol. VIII, 461, 470.
  21. 21. C. inscr. lat. IV, Suppl. Tabulae ceratae, éd. Zangemeister (1898) ;. V. Ibid. (n°° 154, 155) deux tablettes trouvées sur un autre point de Pompéi.
  22. 22. Ibid. p. 303, n. 22.
  23. 23. Outre celui d’être moins lisibles pour les yeux faibles que les papyrus écrits avec l’encre et le calame : Quintil. X, 3, 31.