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de compter vingt-six lettres lorsqu’il est au complet, et l’alphabet occidental, qui n’en a que vingt-cinq sous sa forme la plus complète. Du premier, M. Kirchoff admet dix-neuf variétés, et du second, onze, qu’il classe géographiquement.

Nous croyons, quant à nous, devoir nous en tenir à la division de Franz, en y ajoutant cependant une section â part pour l’alphabet en usage dans les îles de l’Archipel. Nous admettons donc quatre alphabets grecs archaïques de la seconde époque : 1° l’alphabet éolo-dorien, auquel se rattachent deux sous-variétés secondaires et distinctes : l’alphabet corinthien, l’alphabet argien ; 2° l’alphabet attique ; 3° l’alphabet des îles ; 4° l’alphabet ionien.

Ces quatre alphabets nous semblent, en effet, distingués les uns des autres par des caractères qui ne permettent pas de les confondre, ni de réunir non plus le second et le quatrième sous la même rubrique que l’alphabet cadméen des monuments primitifs de Théra. Ces caractères consistent dans : 1° le nombre des signes ; 2° la valeur de certaines lettres.

L’alphabet éolo-dorien comprend vingt-huit lettres, si l’on enregistre dans une même liste tous les signes qu’il est susceptible de compter dans les différents pays où il était en usage. Les lettres caractéristiques en sont : FÎ^M=(T, X = I, plus l’emploi de B ou H comme un signe d’aspiration.

L’alphabet ionien compte vingt-quatre signes. L’absence des cinq que nous venons de citer le distingue de l’éolo-dorien, ainsi que l’addition d’une lettre pour exprimer l’o long. Q, et l’emploi de B ou H comme une voyelle.

L’alphabet des îles est de vingt-sept lettres. Il a, comme l’éolo-dorien, F î "i, mais il n’admet ni M = c7, ni X = f. À cette dernière figure, il donne, comme l’ionien, la valeur de x, De même que dans le cadméen, H ou B y est également susceptible des deux valeurs d’aspiration et de voyelle. Enfin, cet alphabet a deux signes pour exprimer l’cj long et l’o bref ; mais ces deux signes, qui varient du reste suivant les îles, ne sont pas les mêmes que dans l’ionien.

L’alphabet attique, enfin, ne compte jamais que vingt et une lettres. Il n’a ni F ? v] |V| __ ^.^ X = I, propres à l’éolo-dorien ; ni £2, particulier à l’ionien ; ni î, commun aux trois *ilphabets dont nous venons de parler. Comme l’éolo-dorien, il attribue à H la valeur d’une aspiration.

Alphabet éolo-dorien. — Cet alphabet est celui que fournissent les monuments épigraphiques et numismatiques antérieurs au ive siècle av. J.-C. dans la Béotie, l’Eubée, les colonies chalcidiennes de l’Italie et de la Sicile, la Phocide, la Locride, la Laconie, l’Arcadie, l’Élide, l’Hermionide, l’Achaïe et les colonies achéennes de l’Italie, la Mégaride, Égine, Céphalonie, la Thessalie et la Grande Grèce. L’auteur du présent article y a consacré un travail spécial, où il a donné le relevé de tous les monuments qu’on en connaît^^21.

Le lecteur trouvera la liste complète des caractères de l’alphabet éolo-dorien dans sa forme typique, et leurs principales variétés fournies par les inscriptions et les médailles dans la deuxième colonne de notre tableau (fig. 232).

Il est une remarque qui doit se présenter tout d’abord à l’esprit, si l’on compare cette liste complète de l’alphabet éolo-dorien avec les éléments épigraphiques et numismatiques qui nous ont servi à le dresser : c’est que nulle part dans les diverses contrées où cet alphabet était en usage, on n’en trouve toutes les lettres employées dans les inscriptions. C’est tantôt l’une et tantôt l’autre qui fait défaut. L’alphabet du célèbre vase connu sous le nom de vase Galassi ** prouve, du reste, que théoriquement, et probablement dans l’enseignement des écoles, on admettait dans les cités où régnait l’écriture éolo-dorienne, à certains rangs dans la série des caractères, des lettres dont les habitants des mêmes cités ne se servaient pas dans les usages épigraphiques. En effet, cet alphabet contient des signes qui ne se sont jamais rencontrés dans les légendes des vases doriens, à la paléographie desquels il appartient cependant. Mais en revanche il n’a pas le Ç, que nous ont pourtant offert ces légendes.

À quoi peut tenir cette absence de telle ou telle lettre dans les pays où un même alphabet était en usage ?

La première idée qui s’offre à l’esprit lorsqu’on cherche à sonder le problème, est celle d’une sorte de dérivation indépendante de l’écriture dans chacune des contrées helléniques, et cette hypothèse permettrait en même temps d’expliquer assez bien les variations de formes de certaines lettres suivant les pays où elles étaient en usage. Cependant, quelque séduisante que soit cette idée au premier abord, on ne saurait s’y arrêter. L’unité de l’alphabet éolo-dorien, son identité avec lui-même, non-seulement dans les contrées où était en usage sa forme typique, dont nous restituons le tableau, mais encore dans les deux sous-variétés qui nous restent à étudier, est trop évidente pour que l’on puisse admettre la formation indépendante des alphabets de toutes les cités dont nous avons examiné les monuments. Avec cette dernière hypothèse, il faudrait admettre autant d’alphabets différents que de villes dans la Grèce, et on retomberait dans l’ancien chaos, comme l’ont très-bien vu Franz, M. Mommsen et M. Kirchoff. Nous sommes en présence d’un de ces cas où l’on doit nécessairement admettre, pour des objets du domaine de l’archéologie et de l’histoire, la loi de subordination des caractères secondaires aux caractères principaux, qui a rendu de si grands services aux sciences naturelles. Et pour appliquer ici le langage de ces sciences, l’alphabet éolo-dorien constitue une espèce renfermant trois variétés, composées chacune d’individus qui ont tous les caractères essentiels de l’espèce et de la variété, mais qui présentent entre eux certaines petites différences individuelles. En un mot, l’alphabet que nous appelons éolo-dorien est dans toutes ses variations un seul et même alphabet, dont les formes se modifient légèrement dans les différentes peuplades helléniques qui l’ont adopté.

Ce fait n’est pas aussi extraordinaire qu’il pourrait le paraître au premier énoncé. Il n’est pas non plus isolé dans l’histoire des écritures, car voici un exemple également parallèle. Tous les peuples de l’Europe qui parlent des langues néo-latines se servent d’un même alphabet, l’alphabet latin composé de vingt-cinq lettres. Mais plusieurs d’entre eux n’en emploient pas toutes les lettres, ce qui n’empêche pas l’unité de l’alphabet, que dans les différents pays on enseigne complet aux enfants. Les Italiens ne se servent pas de x, de k, ni de y, lettres qui ne correspondent pas à des sons de leur organe et de leur idiome, cependant il ne viendra jamais à l’esprit de personne de

21 Revue archéol. décembre 1867, mars et avril 1868, Études sur l’origine et la formation de l’alphabet grec, 2e partie.

22 Lepsius, Ann. dell’ Inst. arch. t. VIII, pl. B, n. 1 ; Mus. Gregorian. t. II, pl. ciii ; Corp. inscr. graec. n. 8342.