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DICTIONNAIRE


DES ANTIQUITÉS


GRECQUES ET ROMAINES



A


A. AB. — Cette particule suivie d’un substantif sert à désigner chez les Romains un très-grand nombre de charges, d’emplois, de fonctions de tout ordre et de toute espèce. C’est au mot placé à son rang alphabétique qu’il faut chercher les explications qui se rapportent aux plus importants. Ainsi, pour ab actis, ab admissione, ab epistulis, voyez actis (ab), admissione (ab), epistulis (ab).

ABACTI MAGISTRATUS. — On appelait ainsi les magistrats romains qui avaient été contraints d’abdiquer leur autorité souveraine ou droit de commandement[1] [imperium, abdicatio]. Les cas d’abdication forcée furent assez rares pendant la république romaine ; ils ne présentent pas d’ailleurs le caractère juridique d’une destitution proprement dite. En général, c’étaient les tribuns qui employaient leur puissance inviolable pour déterminer, parfois d’après le vœu du sénat, un magistrat à abdiquer. Ils le menaçaient au besoin de faire abroger son imperium par le peuple souverain[2] [abrogatio]. Mais si un consul ou un préteur s’était rendu coupable de haute trahison [perduellio], d’après les anciennes traditions du droit public primitif, il perdait de plein droit sa qualité de citoyen, et avec elle toutes les prérogatives qui en dépendaient [sacratio capitis]. Cependant le préteur Lentulus, enveloppé dans la conjuration de Catilina, fut contraint d’abdiquer par décret du sénat[3] et peut être employa-t-on pour cela le jus majoris imperii du consul[4]. Sous l’Empire, le prince eut le pouvoir de déposer tous les magistrats.[5] G. Humbert

ABACTORES [abigei].

ABACTUS VENTER [abigere fartum].

ABACULUS [musivum opus].

ABACUS (Ἄϐαξ, Ἀϐάκιον), plateau, table, tablette. — Ce nom est donné plus spécialement à un certain nombre d’objets ayant pour caractère commun de présenter une surface plane.

I. Tablette munie d’un cadre que l’on remplissait de sable fin, sur lequel on écrivait avec le doigt ou avec une pointe. Les passages des auteurs qui indiquent cet emploi de l’abaque le montrent ordinairement entre les mains des géomètres[6] mais il servait également aux opérations de l’arithmétique, aussi bien qu’à tracer toute espèce de caractères[7].
Fig. 1. — Tablette à écrire.
On voit sur une pierre gravée du Cabinet des médailles, à Paris (fig. 1), l’image d’un homme qui calcule à l’aide de cailloux ou de billes (calculi), tandis qu’il tient de la main gauche un abaque sur lequel on distingue des caractères paraissant appartenir à l’ancien alphabet osque ou latin[8]. Les enfants dans les écoles se servaient de tablettes du même genre [laterculus, tabula, tabella].

C’est dans cette acception qu’il faut sans doute chercher le plus ancien emploi du mot. On a fait remarquer la ressemblance du grec ἄϐαξ avec le mot sémitique abaq qui signifie sable, poussière ; en effet, les premières tables à compter qui vinrent en Grèce y furent vraisemblablement importées d’Orient avec les marchandises de toutes sortes qui en rendaient l’usage nécessaire[9]. Pythagore vit peut-être à Babylone, vers la fin du VIe siècle, des calculateurs exercés qui écrivaient ou effaçaient sur l’abaque des chiffres rangés en colonnes ; mais cette manière de calculer, qui se répandit et resta connue sous son nom, est le fait d’une science déjà assez avancée, et qui dépassa toujours les facultés du plus grand nombre. On se servait donc communément d’autres abaques plus compliqués en apparence, en réalité plus faciles à manier pour des esprits peu familiarisés avec les opérations abstraites, et que nous allons expliquer.

II. Table à calcul, consistant en une planchette sur laquelle des divisions tracées d’avance séparaient les différents ordres d’unités. On y plaçait de petits cailloux, des jetons ou d’autres marques (ψῆφοι, calculi), et on rendait ainsi sensibles et faciles à suivre des comptes même assez compliqués.

  1. Paul. Diac. s. v. Abacti, p. 23, éd. Müller.
  2. Tit. Liv. XXVII, 20 ; XXIX, 19 ; Epitome, LVII.
  3. Cicer. Catil. III, 6 ; Salt. Catil. 67 ; Dio Cass. XXXVII, 34.
  4. Plut. Cicer. 19.
  5. Bibliographie. Becker, Handb. d. römischen Alterth.. Leipzig, 1846, II, 2, p. 56 ; ejusd. Ueber Amtsentsetz. bei d. Römern, in Rhein. Museum, vol. IV, 1846, p. 245 ; L. Lange, Röm. Alterthümer ; Berlin, 1856, 1, § 80, p. 522 et 523 ; Walter, Gesch. des röm. Rechts, 3e édit. I, no 145.
  6. Pers. I, 131 ; Apul. Apol. p. 426 ; Plutarch. Cato min. 70 ; Martian, III, 7.
  7. Pers. l. l.
  8. Chabouillet, Catalog. no 1898.
  9. Vincent, Notat. scient. de l’École d’Alex. 1re part. p. 9 ; H. Martin, Rev. archéol. 1856, p. 536 ; Cantor, Mathem. Beitraege zum Culturleben der Voelker, Halle, 1863, p. 128-139.