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cun doute, de la grande peinture grecque de la belle époque, sont celles dont le style autorise à les rapporter au milieu du Ve siècle. A ce titre, il faut appeler l’attention sur une fresque de Corneto encore, la fresque à la petite fille (fig. 5638) 1[1]. Si les lourdes et riches draperies qui recouvrent les lits de cette scène de banquet, si l’ajustement compliqué des femmes, si les arbustes qui occupent le fond du tableau, décèlent l’Étrurie, on reconnait au dessin


Fig. 5658. – Fresque étrusque.


et à la coloration des corps, à la façon dont sont traités les yeux et les chevelures, à la construction des profils, l’influence de la grande peinture attique, telle que nous la devinons à travers les œuvres du potier Euphronios et de son école, et cela s’explique quand on songe aux relations commerciales suivies que l’Etrurie entretenait à ce moment avec Athènes 2[2]. La peinture étrusque n’a pas cessé de produire jusqu’au IVe siècle avant notre ère 3[3]. Dans les sujets plus particulièrement mythologiques qui marquent les dernières périodes de son histoire, elle atteint à une souplesse de procédé qui aide à imaginer la peinture grecque du IVe siècle 4[4]. Mais elle reste un art purement industriel ; du moins, aucun témoignage ne permet d’affirmer qu’elle ait jamais dépassé cette limite. Elle n’en est pas moins précieuse pour nous, d’abord par ce qu’elle nous révèle du peuple qui l’a pratiquée, ensuite et surtout par les nombreux documents quelle nous fournit pour la connaissance de l’art supérieur dont elle s’est inspirée en grande partie 5[5].

III. La peinture chez es romains. — La peinture à Rome n’a pas été un art original. Les Romains semblent l’avoir héritée de la Grèce, et plus encore chez eux que chez les Étrusques l’influence de la grande peinture


grecque s’est fait sentir. Leurs premiers peintres furent des Grecs : tels Gorgasos et Damophilos qui, au début du Ve siècle, ornèrent de peintures le temple de Cérès. Jusque-là, ajoute Pline, d’après le témoignage de Varron, tout, dans les temples, était étrusque 6[6]. C’est là une tradition qui, loin de s’affaiblir, se fortifiera au fur et à mesure que les rapports entre Rome et la Grèce seront plus directs et plus suivis 7[7]. Il y eut aussi à Rome des peintres indigènes, dont le plus ancien est Fabius Pictor, auteur des tableaux qui décoraient le temple de Salus (304 av. J.-C.) 8[8]. Nous pouvons difficilement nous faire une idée de cette vieille peinture romaine. Peut-être offrait-elle quelque ressemblance avec un curieux fragment décoratif trouvé dans un tombeau sur l’Esquilin, et qu’on croit pouvoir rapporter au IIIe siècle avant notre ère 9[9]. Ce qui est un fait, c’est le goût des Romains pour la peinture d’histoire. En 265, Messala exposa pour la première fois, dans la curie Hostilia, un tableau retraçant un épisode de l’histoire nationale, la victoire que lui-même venait de remporter en Sicile sur Hiéron et les Carthaginois 10[10]. Dès lors, dans les triomphes, figurent des peintures qui font connaître au peuple les hauts faits du triomphateur 11[11].

Un genre plus délicat que cette grossière imagerie était le portrait. Rome semble l’avoir connu assez tard. Cependant, l’usage ancien des imagines (IMAGO, p. 412 sq.) avait dû de bonne heure orienter de ce côté les efforts des artistes. Quelques peintres de portraits acquirent à Rome une certaine réputation, comme Dionysios, qui devait, semble-t-il, à cette spécialité son surnom d’anthropographos 12[12], ou comme cette Laia, originaire de Cyzique, qui travailla à Rome et à Naples, et

  1. 1 G. Körle, Op. cit. II, pl. xliii.
  2. 2 E. Pottier, Rev. arch. 1904, 1, p. 45 sq. ; Catal. p. 605 sq. ; cf, les peintures des tombes del triclinio (Monum. I, pl. XXXII), del citaredo (Annali, 1863, tav. d’agg. M), etc.
  3. 3 G. Körle, Ein Wandgemälde von Vulci als Document zur röm. Königsgeschichte (Jahrb. 1897, p. 65 sq. ; cf. pour le sujet des peintures E. Petersen, Jahrb. 1899, p. 43 sq.).
  4. 4 Voir la peinture de la tombe dell’Orco (Monum. IX, pl. xiv et xv).
  5. 5 Sur la peinture étrusque, voir J. Martha, L’art étrusque, p. 377 sq. ; E. Petersen, Ueber die ätteste etruskische Wandmalei, (Rom. Mittheil. 1902, p. 139 sq.).
  6. 6 Plin. Hist. nat. XXXV, 154.
  7. 7 Cf. Pacuvius, qui est de Brindes (Overbeck, 2375), Lycon, qui est d’Asie-Mineure (Id. 2378), Métrodoros. Théodoios, Dionysios, Sérapion, Sopolis, Antiochos (Id. 2147, 2379, 2382), dont les noms indiquent suffisamment qu’ils sont des Grecs.
  8. 8 Plin. Hist. nat. XXXV, 19.
  9. 9 Bull. comm. 1889, pl. xi et xii.
  10. 10 Plin. Hist. Nat. XXXV, 22.
  11. 11 Marquardt, La vie privée des Rom. trad. fr. II, p. 256 sq. ; cf. Dezobry, Rome au siècle d’Auguste, nouv. éd. II, p. 243.
  12. 12 Plin. Hist. nat. XXXV, 113.