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— 1686 —

gymnases officiels, véritables phalanstères des exercices gymniques, possédaient des palestres isolées, les unes publiques, les autres privées et appartenant à des particuliers : celles-ci étaient destinées à une clientèle spéciale de jeunes gens, d’amateurs ou d’athlètes professionnels. Les unes jouaient le nMe de ce que nous appelons les institutions libres ; le nom de plusieurs chefs de ces établissements nous sont connus par les textes et par les inscriptions^^1 ; les autres appartenaient à de riches particuliers désireux d’éviter dans leurs exercices la promiscuité du public ou de s’y entraîner à leur guise, sans être astreints aux règlements qui régissaient les établissements de l’État. Un a tout lieu de supposer que certaines familles d’athlètes, où se transmettait de père en fds la tradition des triomphes agonistiques, telles que les Diagorides de Rhodes, les sept familles athlétiques d’Égine, les Oligaithides de Corinthe, s’étaient fait construire leurs palestres spéciales. À Ægion, l’athlète Strabon s’était fait construire un portique pour ses exercices. On montrait, aux environs de Mantinée, sous le nom de stade de Ladas, la piste où ce coureur légendaire s’entraînait à son exercice favori^^2. L’auteur de la République des Athéniens fait allusion à ces gymnases en quelque sorte aristocratiques et fermés, et leur oppose ceux que le peuple se fait bâtir pour les ouvrir à tous les citoyens^^3.

Quant aux autres exercices, dont la réunion avec la lutte constituait le pentathle, c’est-à-dire la course à pied, le saut, le jet du disque et du javelot, ils voulaient de vastes espaces, des pistes longues d’au moins un stade olympique (192", 27). Il n’est donc pas surprenant qu’on se soit longtemps contenté pour eux d’allées ombragées, d’arènes à ciel ouvert, de ooi^xv. en plein air, qui se développaient à l’aise dans les jardins entourant la palestre’. C’est ainsi qu’on doit se figurer les trois grands gymnases d’Athènes au v" siècle. Les premières palestres, installées au milieu des parcs où s’ébattait la jeunesse, paraissent être l’œuvre des Pisistratides. Après les guerres Médiques, le gymnase grec est déjà constitué en un système complet, où l’on pourvoit aux besoins de l’éducation physique et de la haute culture intellectuelle ’. On relève dans les Dialogues de Platon la mention des principaux locaux que signale Vitruve dans sa description du gymnase grec ’. Mais Platon ne parle qu’incidemment de rà :ToouTr,ptov, du xaxïTTsvo ; ôpôlAo ; , de T’éçd) opoao ;, de l’aùX/] ; il ne nous apprend rien de leurs positions respectives ni du plan général de l’édifice, ni des matériaux dont il était construit. On peut admettre qu’il présentait encore bien des disparates, des parties incomplètes ou rudimentaires, telles que les })ains, et que, dans les pistes couvertes (narâcTsycii 3pdjji.o’. ou ;u<7Tbi opo|j.oi), annexées à la palestre, et dont les causeurs faisaient leurs promenoirs favoris^^7, le bois était largement employé. On semble alors se préoccuper surtout de l’entretien des plantations, qui sont le premier luxe d’un gymnase^^8 ; la nature est mise à contribution encore plus que l’architecte. Au temps

1 l’.ilcslro de Taun’as, à Athr-iies (IMat. CItarmid. H, p. l :i3 ; I.ucian. /*aras. -43) ; de Tiniagetos (Theorr. Jli. 1I|, S ; de Sibyrlios (dut. Alcih.’^^] ; d’IIippoeratc (Pscud. Plul. Vil. Xor. p. 837) ; de Slasi-as à V(-los (/Inll. de corr. hell. 1801, p. 255 ; Corp. in.icr. ait. 11, 443 et 440).

2 Paus. VII, 23, 5 ; Vlll, 12, 3.

3 De rep. ath. Il, 10 ; cr. Theophr. Char. 6.

4 Clcistliônes. tyran de Sicyone, construisit Spûjji’iv xa -a>«î(TTpav (Ilerod. VI, 126) ; cf. Eurip. Aildrom. fiOO : A^ôh-iuî i :«Aaî<iTp« ; Tt xoivâî î’/iî-jcu

5 D’une manière générale, l’école d’enseignement grammatical et musical, par opposition à la palestre et au gymnase, s’appelle S.^’/TxuÀfVo. (Oern. XVUl, 257, p. 312 : I.ucian. Comm.i) ; mais la palestre aussi est prise dans ce sens et désigne souvent tous les exercices de l’édncation ; Grasberger, Erzichunp, 11, p. 203.

de Périclès, la sollicitude de l’État se portait surtout sur les édifices religieux. C’est au siècle suivant, sous l’administration de l’orateur Lycurgue, que l’architecture civile prit son essor. Cet habile organisateur conçut, sur un plan grandiose, les travaux d’utilité publique, entre autres ceux qui concernaient les plaisirs du peuple. Il projeta et réalisa en partie la métamorphose des installations primitives de l’Odéon, du théâtre de Dionysos, du Stade panathénaïque, de la palestre et du gymnase du Lycée". La pierre devait se substituer au bois ou à la brique crue. Il créa ainsi des édifices d’un type nouveau, combinés de toutes pièces sur un plan logique. À dater de cette époque, le gymnase prend place parmi les monuments de l’architecture attique, qui furent aussitôt imités dans toute la Grèce. Partout où l’on disposait des ressources nécessaires, on remplaça par ces constructions durables les installations économiques et légères où l’on tirait parti du terrain sans chercher à faire œuvre d’art. Dès lors, et particulièrement à l’époque hellénistique, où se répandit le goût des vastes constructions, on prit l’habitude de bâtir en pierres même les immenses portiques des pistes couvertes, où les coureurs pouvaient s’exercer par tous les temps.

Ces annexes de la palestre (3pôjji.ot, y.a.xé.nxeyoi. ou çufrxo’i opôaoi) semblent, d’après la description des édifices d’Olympie par Pausanias, avoir reçu le nom de gymnase pris dans un sens restreint : ce qui n’empêchait pas l’ancien terme de Yutxvâdiov de s’appliquer à tout l’ensemble, y compris la palestre, de même que, nous l’avons vu, le terme de palestre pouvait aussi désigner le gymnase tout entier. Il y a là, dans la terminologie des auteurs anciens, une source de confusions et d’inexactitudes dont les commentateurs modernes doivent prendre leur parti.

En résumé, on distingue quatre périodes dans l’histoire du développement organique du gymnase grec :

1o Période primitive, celle des δρόμοι crétois et lacédémoniens, simples pistes et Champs de Mars dépourvus de constructions fixes.

2o Période archaïque, à laquelle appartiennent les plus anciens gymnases d’Athènes. Ce sont des jardins entourés d’un péribole, avec des pelouses, des avenues ou SpôîjLO ! pour les courses, et une palestre rudimentaire pour la lutte, telle qu’on les construisait à l’époque des Pisistratides, et même sous Périclès. Dans ces palestres, les bains tenaient peu de place et les pistes couvertes du gymnase, dont parle Platon, n’étaient, sansdoute, que de longs hangars en bois.

3o Période hellénique et hellénistique (iv^ au ii" siècle av. J.-C.). Le type architectural du gymnase de pierre avec ses pistes abritées sous de longs portiques contigus à la palestre, telles que devaient être les constructions de Lycurgue au Lycée, est représenté d’une manière complète par les édifices d’Olympie, et, avec des perfectionnements l’inpruntés aux theriucs, par le spécimen décrit dans Vitruve.

4o Période gréco-romaine, caractérisée par un dispositif nouveau. La palestre, noyau dt ; l’édifice de plus en

6 Plat. Ujs. 3, p. 206 R ; Euthyil. 2, p. 272 c, 273 n ; Themlth..’, 141 c ; Phaedr. 227 «.

7 Xen. ilem. 1, 1, 16 ; Plat. Pliaedr. p. Î27, A.

8 Plat. Lei/. VI, 701 c.

9 Pseud. Plut. Vit. Or. Lyc. 4 ; Ib. c. 40 ; cf. Pausan. I, 29, 10, el plus haut, note 17. p. 1685.

10 Voy. noie 27, p. 1685.