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FABA (Kûa[Aoi;), la fève. — Pour le légume, sa eullurc, ses emplois, voy. legumina et cibaria. Tout le monde connaît le précepte d’aiislcnlion des fèves, imposée par Pythagore à ses disci|)les’. La fève était également considérée comme impure dans le culte d’Eleusis et interdite aux initiés [elkusinia, p. 3o8|. Dans les traditions de Phénée en Arcadie, on disait que Cérès avait dimné aux habitants tous les légumes, sauf la fève-. On peut voir ici le résultat d’une in- fluence orphique. En effet, dans les poésies attribuées

ï Orphée, on remarquait deux préceptes dont le premier

était conçu sous une forme toute symbolique : « C’est la même chose de manger des fèves que de manger la tète de ses parents^ » ; et « Pleins de crainte, abstenez-vous des fèves" «. La défense était d’origine égyptienne^ et avait passé dans presque tous les Mystères. Aulu-Gelle ° mc^t sur la voie des idées qui avaient mo- tivé ces prescriptions, en soutenant que ce n’étaient pas des fèves dont Pythagore avait défendu l’usage à ses sectateurs. On aurait, selon lui, inexactement interprété dans la règle pythagorienne le mot xûaixo; par fève, tandis qu’il y désignait le sexe des animaux. On racon- tait des histoires étranges sur la métamorphose qui s’opérait de fèves enfouies sous un fumier et d’où sor- taient des hommes", croyance fabuleuse à laquelle serait due l’assimilation faite entre les fèves et des têtes hu- maines. La fève était donc considérée comme un ré- ceptacle de génération de la plus grande puissance, et c’est ce qu’indique encore Plutarque’, en assimilant la défense, faite par les Orphiques et par Pythagore, de manger ce légume avec cejle que les mêmes législateurs avaient portée au sujet des œufs. En même temps, on attribuait à cette plante un ca- ractère funèbre et infernal. On jetait des fèves comme offrande sur les tombeaux •". Nous lisons dans Festus : « Il n’est permis au flamen dialis ni de toucher ni même de nommer la fève, car on la considère comme apparte- nant aux morts; en efTet, on la jette en offrande aux Larves et aux Lémures et on l’emploie dans le sacrifice des parentalia " ». Le même caractère funèbre était attribué par extension à d’autres légumes de nature ana- logue, aux lupins’-, aux pois chiches". L’association des idées de génération et de mort qui se révèle ici n’éton- nera aucun de ceux qui ont étudié les religions antiques. Elle est complètement marquée dans ce que dit un des FABA. 1 l’iutarcli. Sympos. Il, .3 ; Vlll, 8 ; Qunest. vom. 03 ; Cic. De div. I, 30 ; l’orplijr. VU. Pythaijor. 44; Clcm. Alex. Stromat. III. p. 521, vt. Potier; Diog. Lacrt. VIII, 34; Luciaii. Gall. 4.-2 Pausaii. VIII, 15, 1. — 3 Plut. Syinj}. Il, 3 ; Dûlym. Oeop. II, 35; Lyd. De mens. p. 76; Cleni. Alex. /. c. ; Atlicn. II, p. 65; Eustath. ad Iloni. Jliarl. N, p. 948 ; cf. Lobeck. Agtaopham. p. 251 et s. — ^ Didyni. r.L’op. II, 35; Aiil. Gcll. Xocl. ail. IV. Il; Greg. Naz. Oral. XXIII, p. 533. — 3 Heiodol. Il, 37 ; Diod. Sic. I, 89; Porphyr. De abstin. Il, 25. — iocl. ail. IV, 11. — 7 Voy. Miiury, Hist. des relif/ions de la Grèce, t. III, p. 358. — 8 I,yd. De mensih. p. 76. — Symp. II, 3; cf. Cic. De divin. I, 30. CI(5meiit d’Alcxaudrio. Siromal, III, p. 521, suppose au coulrairc que les législateurs intcrdisaieut l’usage de ce légume, parce ([u’il rendait les femmes stériles. — 10 Lyd. De titens. p. 77; voy. Lobeck, Agliioph. p. 254. — H Festus, s. v. Fabam, p. 06 Lindemaïui. — 12 Calpuni. Edo;i. III, 82. — " Plut. Quaest. rom. 93. — IV Eusialli. ad lliml. N". T. 389, p. 918. — I" Calnloi/ue des bijoiir du musée .XopoU’on III, n" 8, 10, 11, i et 13. — ic Pausaii. I. 37, 3 ; Pseudo-Plut. V’i7. dec. oral. p. 837 ; Ilesycli. et Pliol. .t. r. Iv-jtt-itÎTr,;. — 1" Voy. F. J-enormant. Monographie de la Voie .sacrée éleusinieune, t. I, p. 337-348. — 13 Clcm. Alex. Droirëiil. Il, p. )6, éd. Potter. — 10 Ibid. IV. scholiastes d’Homère, que les prêtres ne mangeaient point de fèves noires parce qu’elles étaient le symbole de la montée des âmes lorsqu’elles quittent la demeure d’Hadès pour revenir à la lumière". C’est peut-être à la signification symbolique indiquée par le scholiaste que se rapportent les couronnes d’or imitant le feuillage de la fève, que l’on trouve assez fréquemment autour de la tète des morts dans les tombeaux de l’Italie’". Un héros local, ou Bacchus lui-même, était adoré sur la Voie Sacrée d’Eleusis sous le nom de K’jajX!T/)i;", pro- ducteur des fèves. Il faut se souvenir ici f]ue l’on ex- l)liquait l’abstinence du fruit du grenadier, imposée aux femmes athéniennes dans les Thesmophories, en ce sens (jue cet arbre était censé né du sang de Dionysos Zagreus répandu à terre ’^ De même, dans les mystères des Cory- bantes, les prêtres ne pouvaient pas manger de céleri, parce que cette plante passait pour avoir été engendrée par le sang d’un des Corybantes’^. Ces deux prescrip- tions éclairent un peu l’origine mystique attribuée à l’abstinence des fèves dans les Ëleusinies. [Il y a sans doute, au fond de toutes ces légendes, une simple pres- cription hygiénique, comme l’abstinence de la chair du porc chez les Hébreux, prescription sur laquelle la su- perstition antique avait brodé des thèmes très variés.] F. Lexormast. FABRI. — I. Signification etbistoire dumotfaber. — Le sens du mot fahpy ne paraît point douteux. 11 désigne l’ouvrier qui travaille un corps dur’, comme le bois, le métal, l’ivoire, la pierre^. Le faber s’oppose à l’ouvrier qui façonne un corps mou, comme la terre, l’argile, la cire, fictor ou ftguliis’K L’expression de fabev correspond à peu près exacte- ment à celle de téxtwv en grec. Il est bien vrai que TÉxTcov, dans la langue classique, s’applique spéciale- ment au charpentier ’. Mais on a également compris sous ce mot ceux qui travaillaient la pierre ^, et parfois même les ouvriers en métal °.

est fréquent que faber soit employé isolément. Mais 

souvent aussi, le mot est accompagné d’une épithète, qui indique soit la matière que travaille l’ouvTier, soit les ol)jets qu’il fabrique. Voici la liste des qualificatifs dont on fait suivre le mot faber. ° Ceux qui désignent la matière travaillée sont les suivants : iir/nariun ou tignuarius’, plus rarement ligna- riiis *, pour les charpentiers ; matcriarius pour les scieurs FABRI. 1 Faber... propier operis firmitatein, dit très Dcttcmcnt Isidore de Sévillo, Origines, XIX, 6. — 2 Que faber pût se dire par exemple d’un entre- preneur de constructions en pierre, cela résulte du texte suivant (Digest. XIII, 6, 5, § 7) : 5i serras lapidario commodatus sub machina perierit, teneri fa- brmn commodati. Il peut s’employer aussi à propos d’un marbrier : Marmonz aut eboris fabi-os (Horace, Episl. Il, 1 , 96) ; d’un maçon : fabri... uluntur ad soxa coagmenlata... (Varro, ap. Xonium. p. 9, tS). — 3 Pour cette opposition entre le faber et le fictor, voyez les excellentes remarques de Blûmncr. Termi- nologie, t. II. p. Il et s., p. 164 et s. Cod. Tlieo<1. XIII. 1, lu: Eo» qui manu vietum rimantur nul tolérant, figuloa ridetic^^t aut fabros. — * T«t«>o; Tin c’JXqv, dit Hpictète ap. Arrûan. I, 15, i. D’autres textes dans Bliîmner. t. Il, p. 165 et s. — ô Homer. llind. XXIII, 712. — <> Corp. inscr. graec. 4158. Mais cela est infiniment rare. Voyej. les rcman|Ues de BlOmucr, p. 165, n. 3. — ’ Cic. Brutus, 1,111, 157, sans parler des textes et des inscriptions cités plus bas. — 8 Faber lignarius chez Isidore de Séville, Or. XIX. 6. D,ins Dig. L. 16. 235. il faut lire fabi’os tignarios; lignarios se trouve dans le manuscrit mais comme correction.