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Ces ἱερεῖα prenaient évidemment place dans le sacrifice officiel présidé par l’archonte. Le porc était aussi une victime usitée dans les sacrifices à Zeus Meilichios[1], comme ceux qu’on offrait à Déméter, à Coré et à d’autres divinités des Mystères [voyez cérès, p. 1068]. Quant aux θύματα ἐπιχώρια, le scholiaste dit que c’étaient de simples gâteaux façonnés en forme d’animaux qu’on plaçait sur l’autel du dieu[2]. Cette substitution s’explique par le grand concours de population qui était convoquée aux Diasia et dont la majorité n’était pas suffisamment riche pour faire la dépense d’une victime réelle. Hérodote confirme cette explication en rapportant qu’en Égypte les gens pauvres, au lieu de sacrifier des porcs, pétrissent de la pâte de farine à l’image de ces animaux, les font cuire et les offrent en sacrifice sous cette forme[3]. On connaît de nombreux exemples de cette espèce de tricherie économique, pratiquée à l’égard des dieux et des morts et qui respectait les principes religieux en sauvegardant les intérêts privés[4].

On peut inférer d’un texte de Xénophon, comme du caractère général attribué au culte de Zeus Meilichios, que l’offrande des victimes était essentiellement propitiatoire et exigeait l’holocauste, c’est-à-dire la crémation complète de l’animal, sans aucune part réservée aux vivants[5]. Il est probable aussi que le vin était proscrit des libations et que les boissons νηφάλια, l’eau pure ou l’eau miellée, étaient rituelles[6].

Le caractère grave et sombre de ces fêtes est marqué par les mots συγνότης et σκυθρωπός, ἀνίαι, ἆσαι[7], qui rappellent les phases de tristesse et de deuil par lesquelles passaient aussi les assistants dans les grandes fêtes des Mystères [eleusinia]. Il y avait cependant une part pour les réjouissances : on donnait aux enfants des jouets, entre autres de petites voitures (ἀμαξίδες)[8]. Il y eut aussi des concours littéraires, des lectures d’ouvrages[9], mais cet usage ne date sans doute que de l’époque gréco-romaine où les joutes oratoires devinrent le complément ordinaire des fêtes religieuses[10].

Un scholiaste a voulu établir, d’après un texte d’auteur ancien, une distinction essentielle entre les Diasia et les fêtes de Zeus Meilichios, en les assimilant aux Dipoleia[11] [dipoleia]. Cette distinction et cette assimilation paraissent être également erronées[12]. E. Pottier.


  1. Xenoph. Anab. VII, 8, 5.
  2. Schol. Thucyd. l. c. : τινὰ πέμματα εἰς ζώων μορφὰς τετυπωμένα ἔθυον.
  3. Herodot. II, 47 ; cf. Servius, Ad Aen. II, 116 ; IV, 454.
  4. Cf. Pottier et Reinach. La nécropole de Myrina, Index analytique, s. v. Substitutions.
  5. Xenoph. Anabas. VII, 8, 5 ; cf. Band, Op. l. p. 13.
  6. Corp. insc. att. I, no 4 ; Band, Op. l. p. 8 et 13.
  7. Schol. Aristoph. Nub. 407 ; Schol. Lucian. Tim. 7 et 43 ; Icarom. 24 ; Hesych. s. v. Διάσια ; Suidas, s. cod. v. ; Etym. Magn. s. eod. v. ; cf. Band, Op. l., p. 15, 17.
  8. Aristoph. Nub. 863 et Schol. ad h. loc. D’après le scholiaste, ces petites voitures seraient elles-mêmes des gâteaux comme les offrandes en forme d’animaux.
  9. Lucian. Charidem, 1. Il cite un ἐγκώμιον Ἡρακλέους couronné aux Diasia.
  10. Voy. Lafaye, De poetarum et oratorum certaminibus apud veteres, Paris, 1883.
  11. Schol. Aristoph. Nub. 407. Cette assertion est contredite formellement par le texte de Thucydide et la plupart des autres.
  12. C’est aussi sans doute à une erreur qu’est due la restitution du mot Διασίων dans une inscription de Sardes (Corp. insc. gr. no 3461) ; cette fête est essentiellement attique. — Bibliographie. Hermann, Lehrbuch der gottesdientl. Alterth. der Griechen, 1858, § 58, p. 308 ; Id. Philologus, II (1847), p. 1-11 ; A. Mommsen, Heontologie, 1864, p. 379-386 ; O. Baud, Die altischen Diasien (Programm der Victoriaschule), Berlin, 1883.

DIATRETA, DIATRETARIUS. — [vitrum caelatura].


DIATRIBA. — Salle de cours, endroit destiné à des leçons ou des discussions savantes [auditorium, recitatio].


DIAULOS. — [cursus].


DICHALCON (Δίχαλκον). — Monnaie de bronze grecque de deux chalques ou quatorze lepta[1], valant par conséquent un tartémorion d’argent ou le quart de l’obole[2] [chalcus].


  1. Pollux, IX, 65 ; Lucill. Anthol. Palat. XI, 165.
  2. Hesych. s. v. Ταρτημόριον.

DICTATOR. — Le dictateur était un magistrat nommé extraordinairement[1], à l’effet de concentrer dans une seule main et pour un temps limité les pouvoirs exécutif et judiciaire de la république romaine. Quelquefois cependant un dictateur était créé uniquement en vue de l’accomplissement d’un acte solennel spécial ; enfin on appelait aussi dictator le premier magistrat de certaines villes municipales. Cet article sera divisé en trois parties correspondant à ces trois objets.

I. Dictator. — Cette expression vient de dicere, mot technique employé pour désigner la création du dictateur par un consul[2], ou bien a dictando, parce que chacun était tenu d’exécuter comme une loi les ordres émanés de ce magistrat[3]. La dictature n’était pas une institution propre aux seuls Romains[4] ; il existait des dictateurs dans les villes latines, avec des variétés dans la durée et le but de cette magistrature. Mais il paraît qu’à Rome, et probablement ailleurs, le dictateur fut appelé primitivement magister populi, dénomination seule consacrée dans les livres sacrés des augures[5] ; dictator devint ensuite le nom vulgaire et usuel.

Organisation. Le sénat avait compris de bonne heure la nécessité de donner de l’unité au pouvoir dans un cas de péril public. On jugea utile d’établir un magistrat unique, avec un imperium regium, mais pour un temps limité, et incapable de désigner son successeur, double point de vue qui sépare la dictature de la royauté.

La première création de dictateur eut lieu en 253 de Rome (501 av. J.-C.), au profit de T. Larcius, d’après les plus anciens annalistes[6], à l’occasion des dangers d’une guerre contre les Latins et les Tarquiniens ; T. Mommsen et O. Karlowa font remonter la dictature aux plus anciens temps de la république et à la lex de imperio. Denys d’Halicarnasse[7], qui place cette nomination trois ans plus tard, en attribue le motif, sans document suffisant[8], aux agitations des plébéiens endettés (nexi). Mais il est vrai que plus tard le sénat employa la dictature pour mettre fin aux troubles intérieurs, ou pour échapper aux restrictions imposés au consulat par la loi Valeria[9] de provocatione [Lex ; Provocatio]. En effet, si le second dictateur Posthumius fut nommé à l’occasion d’une guerre, le troisième au contraire apparut comme ultimum auxilium contre une secessio plebis[10]. On employa parfois aussi ce moyen pour remédier au défaut d’entente ou à l’incapacité des consuls, ou à leur absence par suite d’une abdication qui devait laisser un temps trop long avant les élections[11], ou enfin pour augmenter le nombre des chefs militaires.

L’institution de la dictature fut établie par une loi, lex de dictatore creando[12]. Elle portait consulares legere, ce qui,

  1. Niebuhr (I, p. 390) admet cependant une hypothèse d’après laquelle la création de la dictature se rattacherait à l’ancienne ligue latine, qu’auraient dirigée alternativement pendant six mois un chef romain et un chef latin.
  2. Varro, Ling. lat. V, 14 ; Cicer. De rep. I, 40 ; Festus, 3 ; Dionys. V, 73 ; Plut. Marcell. 24 ; Lyd. De mag. I, 36.
  3. Becker, Handbuch der röm. Alterth. II, 2, p. 161 à 163.
  4. T. Liv. III, 18 ; VI, 26 ; Dion. V, 74 ; Lange, Röm. Alterth. I, p. 432, 1re éd., 3e éd. I, p. 583, 585, 749, 770 ; T. Mommsen, Staatsrecht, 2e éd. 1877, p. 135 ; v. aussi T.-H. Martin, Acad. der inscr. nov. 1875 ; Otto Karlowa, R. Rechtsgesch. I, § 86, p. 211 et s. ; Madvig, I, 483-493.
  5. Cicer. De rep. I, 40 ; De leg. III, 3, 4 ; De fin. III, 22 ; Varro, Ling. lat. V, 14 ; VI, 7 ; Festus, h. v.
  6. T. Liv. II, 18 et 21 ; Cic. Rep. II, 32 ; Zonar. VII, 14 ; Pompon. De orig. jur. Dig. I, 2, § 18 ; Suid. p. 399, éd. Gaisf.
  7. V, 72.
  8. Dion. Hal. V, 63 à 70 ; Zonar. VII, 13 ; Becker, Handbuch. II, 2, p. 152.
  9. V. Lange, Röm. Alt. I, p. 431.
  10. Comp. Cic. De leg. III, 3 ; Vell. II, 28 ; T. Liv. IV, 56 ; VI, 38 ; Tabul. Lugdun. ap. Gruter, LII.
  11. Becker, l. l. p. 134.
  12. Liv. II, 18 ; Dion. V, 70.