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AMITIÉ
AMOUR-PROPRE
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doit se renouveler chaque année, par de nouveaux appels à la charité, s’est élevé à 80000 ou 90000 francs ; la Société compte de 100 à 120 enfants placés en pension, et une centaine d’autres en apprentissage.

AMITIÉ. — V. Camarades.

AMMAN (Jean Conrad). — Né à Schaffouse en 1669, mort en 1724, Amman exerçait la médecine à Amsterdam. Ayant entrepris l’éducation de quelques enfants sourds-muets de la ville, il obtint des résultats qui encouragèrent ses efforts et lui firent rapidement une brillante réputation. Il paraît avoir ignoré longtemps les recherches et les essais de ses contemporains, Pierre de Ponce, Wallis, Van Helmont, et n’avoir agi que d’après ses propres inspirations. Néanmoins la méthode qu’il a exposée dans une Dissertation sur la parole, se rapproche sensiblement de la leur. Comme eux, comme Van Helmont surtout, il fait de la prononciation artificielle la base de son système et le point d’appui de tout enseignement qui s’adresse aux sourds-muets. « Faisons de chaque élève un nouvel habitant du monde où nous vivons » ; car c’est les rendre & la vie, ces pauvres créatures, que de leur donner la voix, « cette émanation de l’esprit immortel de vie que Dieu souffle dans le corps de l’homme en le créant. » Pour Amman, l’homme privé de la parole diffère peu de l’animal : préjugé qui peut-être le porta à insister trop sur le mécanisme vocal au détriment du développement des facultés. L’un des premiers encore, il essaya de suppléer à l’ouïe par la vue en habituant les élèves à lire sur les lèvres, c’est-à-dire à observer le mouvement des lèvres de la personne qui parle. Sa méthode fut professée à Livonie par Jacques Wild et le pasteur Niederoff, mais on ne lui connaît point de continuateur dans son pays.

[S. Maire.]

AMOROS Y ONDEANA (don Francisco).— Amo- ros y Ondeano, né en Espagne le 19 février 1770, entra au service & l’4ge de 9 ans, en qualité de fils de militaire et y fit ses études. Sous-lieu- tenant A 21 ans, il assista au siége d’Oran, en Afrique, ob i] obtint le grade de lieutenant. II se distingua dans les campagnes de 1792 et de 1793, devint secrétaire du ministre de la guerre en 1796, et, en 1803, il fut chargé do la direction @un Institut militaire établi A Madrid pour réfor- mer l’éducation publique en Espagne et y faire adopter la méthode de Pestalozzi. En 1807, il fut choisi pour présider 4 l’éducation de l’infant d’Es- pagne, don Francois de Paule. Arrété & la suite de Ja révolution du 19 mars 1808, il fut relaché, puis, chargé de plusieurs missions importantes, devint “ministre de l’intérieur et enfin ministre de la po- lice. Foreé de fuir en France aprés le rétablisse- ment du roi Ferdinand VII, il offrit ses services & Napoléon et, & partir de 1815, il ne s’occupa plus que de linstruction publique et surtout de la — nastique. Nommé membre de la Société pour Cin- struction élémentaire de Paris, il publia un Mé- moire sur la méthode d’éducation de Pestalozzi, et un autre sur la méthode d’éducation physique et gymnastique qu’il avait établie 4 Madrid. Ces deux Tapports lui attirérent des sympathies qui lui permirent d’ouvrir avec quelque succés des cours de gymnastique dans la capitale. Ces cours furent bientét suivis par de nombreux éléves, et les résul- tats qui furent obtenus donnérent & Amoros l’appui de M. Chabrol*, alors préfet de la Seine. Secondé par ce magistrat, Amoros, le 5 décembre 1818, ob- tint du ministre de la guerre que des détachements des trois régiments du génie suivissent les cours de gymnastique : ce fut le commencement du gym- nase normal militaire, dont il fut nommé directeur Je 4 novembre 1819 ; ce gymnase militaire était si- tué place Dupleix, entre Je Champ de Mars et la barriére de Grenelle. Le 24 juillet 1820, le comte Siméon, ministre de J’intérieur, décida Ja création

d’un gymnase civil normal dont Amoros eut aussi

la direction. Ces deux gymnases formérent un

grand nombre de professeurs habiles, qui répandi-

rent dans toute l’Europe la méthode de leur mai-

tre. Depuis cette époque, Amoros ne cessa de per-

fectionner son enseignement et chercha a lintro— — duire dans le plus d’établissements possibles. I

mourut & Paris, le 8 aodt 1848.

Amoros est le fondateur en France de la gymnas- tique rationnelle. Sa méthode consiste en exercices gradués propres 4 développer harmoniquement les organes. Mais ce quila distingue surtout, c’est que ces exercices physiques eux-mémes doivent con- tribuer au développement des facultés morales. Amoros « avait imaginé d’assujettir tous les mouve- ments de ses éléves au rhythme, ce qui d’abord maintient rordre et la régularité. Le rhythme est marqué par des chants dont les paroles expriment les sentiments les plus élevés qui puissent rem- plir un ceur humain, le respect et l’adoration envers Dicu, l’amour du chef de l’Etat, le dévot- ment 4 la patrie, etc. De plus, un jury, formé & tour de réle par Jes jeunes gens les plus distin- gués, prononce sur tous les cas de discipline ; et Yhabitude de considérer le cété moral des ac- tions favorise, au dela de ce qu’on pourrait croire, le développement des sentiments hon- nétes et généreux que renferme le ccur de tous les pynes gens. » (Rapport de la Société élémen- taire.

Pour stimuler les éléves et constater les résul- tats physiques et moraux obtenus par la méthode, on remettait & chaque éléve une feuille physiolu- gique indiquant ses qualités physiques et morales au commencement du cours et les améliorations obtenues aprés chaque mois d’exercices. Cette feuille était comme un miroir ot se refiétaient le corps et r’4me de chaque éléve & mesure qu’il aug- mentait sa force physique et ses qualités morales. La méthode d’Amoros étant surtout pratique, c’est’dans ses cours ou ceux de ses éléves qu’il faut I’é— : tudier ; cependant il l’a exposée avec clarté dans un ouvrage en 2 volumes in-18, avec album de 60 planches (Encyclopédie Roret), intitulé : Now- veau manuel d’éducation physique, guymnastique et morale. Ce manuel doit dtre étudié par toutes les personnes qui s’occupent de l’enseignement de la gymnastique. [A. Demkés.}

AMOUR-PROPRE. — L’amour-propre, ainsi que l’indique 1a composition du mot, est le sentiment qui nous fait aimer notre propre personne. Au xvue siécle, on entendait ce mot dans son sens étymologique le plus targe : il signiflait l’amour de soi, par opposition & l’amour du prochain et A l’amour de Dieu. Depuis lors, il a pris une accep- tion plus restreinte et désigne non pastout instinct égoiste, mais cet instinct plus délicat qui nous fait Breenchiar Yestime ou les éloges de nos sembla-

es.

Dans le premier sens, l’amour de soi n’est vicieux que s’il va jusqu’a l’égoisme *.

Dans le second, quiest le sens ordinaire, l’amour- propre est un sentiment qu’il faut non extirper, mais contenir en de justes limites. L’écueil 4 crain- dre, cest qu’il ne dégénére en vanité : et assuré- ment, il n’y a pas loin de I’un & l’autre ; mais en soi l’amour-propre est plus qu’un sentiment légi- time : c’est presque la marque et la condition d’une certaine élevation d’esprit. On ne ferait pas l’éloge d’une personne en disant qu’elle est dénude de tout amour-propre.

Ce sentiment tient une trop grande place dans la nature humaine pour que I’dducation ne so soit pas préoccupée du parti & en tirer et des moyens de le régler. L’amour-propre n’est nulle part plus manifeste quo chez les enfants ; i ! trouve, en effet, libre carriére & son développement dans l’imagina- tion et les illusions du jeune Age, tandis que plus