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préface

Esprouver pouvait signifier prouver : Dieu leur avoit esprouvé sa puissance, afin qu’ils s’y fiassent. Calvin, 6e  Serm. sur le Deuter. — Preuve s’employait pour espreuve, et réciproquement : Il vouloit faire une preuve et une dection des estrangers, pour donner à ceulx qu’il cognoistroit plus gens de bien droit de bourgeoisie Spartaine. Amyot, Cléomène, 10. — Celuy entre les Turcs est seulement reputé noble, qui en faict de guerre a donné plusieurs espreuves de sa vaillantise. E. Pasquier, Recherches, II, 17.

Advenir se trouvait dans le sens de parvenir, de devenir, et de convenir : Le moyen qu’il teint pour advenir à ses fins. Amyot, Alcibiade, 15. — Quand il est advenu Roy, et que les richesses du pais luy sont devant les yeux. Calvin, 106e Serm. sur le Deuter.Ceste livree [de pers et vert] luy advenoit bien, veu qu’il avait esté pervers. Rabelais, II, 31.

Franchir signifiait souvent affranchir : Charlemagne… les franchit, et leur ottroya quilz peussent vivre selon leur mode et leurs loix. Lemaire de Belges, Legende des Venitiens, 2.

Annoter s’employait pour noter : Le vin, comme Aristote annote, s’accommodant à la nature des beuveurs. G. Bouchet, 1re  Seree.

Attenuer et extenuer se confondaient : Ilz n’ozoient venir à la bataille, estans leurs hommes si affoiblyz et si attenuez à faulte de manger, que plusieurs en mouraient de faim. Amyot, trad. de Diodore, XIII, 28. — Ceux qui le font ne doyvent point extenuer leurs fautes, ne prendre vaine couverture. Calvin, Que doit faire un homme fidele entre les papistes.

Tirer avait souvent le sens d’attirer : Mais il faut par bien-faits et par caresse d’yeux Tirer en ta maison les ministres des Dieux, Les Poëtes sacrez. Ronsard, Odes, III, I.

On employait complainte pour plainte, compromettre pour promettre, contourner pour tourner, fier pour confier, sacrer pour consacrer, citoyen pour concitoyen : Il execute ses jugemens, quand les povres oppressez luy adressent leurs complaintes. Calvin, Instit., III, xx, 15. — L’alliance et la foi compromise. Des Masures, David fug., 1255. — Malheureux sont ceux qui destournent les creatures de leur Createur, pour les contourner au peché. St  François de Sales, Vie devote, II, 13. — Nul ne fie son secret à l’yvrongne, chacun le fie au sage. Montaigne, III, 4. — Belle à qui pay sacré et mes vers et ma peine. Aubigné, Primtems, II, 16. — L’un et l’autre à la fin encourut la haine et malvueillance de ses citoiens. Amyot, Thésée, 2.

Comporter s’employait dans le sens de supporter, se comporter dans celui de se transporter : Je ne scay comment je comporteray la douleur en laquelle vous me laissez. Le Maçon, trad. de Boccace, Décaméron, X, 9. — Quand dans un verger de plaisance Lasse elle alloit se comportant. Buttet, Ode 2. — Porter signifiait souvent comporter, se porter avait souvent le sens de se comporter. Porter signifiait aussi supporter : [Les assiegez] capitulèrent et receurent une composition plus honneste que le droit de la guerre ne portoit. Aubigné, Hist. Univ., XI, 14. — Si par le passé je me suis portée en jeune fille, à l’advenir je me comporteray en femme. Larivey, le Fidelle, IV, 4 — Ne pouvant plus porter cette haine publique, ils se pendirent eux-mesmes. Montaigne, III, 12.

Confluer s’employait pour affluer, conserver pour préserver, consister pour subsister : Tous ceux qui menent ceste vie y acourent, et confluent de tous costez. Amyot, Hist. Æthiop., L. I. — Floride… s’en alla en un oratoire se recommander à Nostre Seigneur… luy priant de vouloir conserver son cueur de toute meschante affection. Marg. de Nav., Heptam., 10.