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DUMONT — DUMONT D’URVILLE

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fecture d’Arras. Pendant le règne si court et si fivneste des cent-jours, il rendit d’importants services à la cause nationale. Le désastre de Waterloo livra une seconde fois la France aux étrangers. De nobles citoyens furent bannis. André Duniont, ayant accepté un emploi dans les centjours, subit un exil en Belgique, d’où il ne fut rappelé que par la révolution de 1830 ; il mourut à Amiens, quelques années après son retour.

De Poncerville, de l’Académie Française.

DUMOIVT ( AucusTiti-ALEXANDBE ) , membre de la section de sculpture de l’Académie des beaux-arts, est né à Paris , en 1801 , dans une famille d’artistes. Jacqiies-Edme DDaoxT,son père, avait joui autrefois comme statuaire d’une certaine réputation. Rompu à la pratique de son art, il fut le premier maître de son fils, qui, entra bientôt après cliez Cartellier. A vingt ans, M. Augustin Dumont remporta le second prix de sculpture : il obtint le premier en 1823, et partit pour Rome. Il y exécuta V Amour tourmentant l’âme sous l’embUme d’tin papillon, œuvre académique, très-froide et très-gourmée, qui fut exposée en 1827, et qui décore aujourd’hui le musée du Luxembourg. Le groupe que M. Dumont fit paraître ensuite, Leucothoé et Bacchus ( 1831 ) eut plus de succès, et méritait en elfet d’être mieux accueilli. On a longtemps vu au Palais-Royal ce marbre sagement éludié, et l’on y a remarqué , sous le modèle des chairs, une morbidesse dont les élèves de Cartellier ne se sont pas ordinairement montrés fort soucieux. Les monuments publics de Paris s’enrichirent bientôt des productions de M. Dumont. Il exécuta pour la Chambre des Députés une statue de La Justice { 1333) ; pour la colonne de la place de la Bastille, Le Génie de la Liberté [%Z&) ; pour Notre - Dame - de - Lorette , une Vierge en marbre ( 1839 ) ; pour la Madeleine une figure de Sainte Cécile , et pour Versailles les statues de Poussin ( 1836) , de Louis-Philippe ( 1838), de François 1" ( 1839), etc. Ces statues sont pour la plupart l’œuvre d’un ciseau habile, mais sans chaleur et sans invention. 11 est regrettable surtout que la plus importante de ces figures. Le Génie de la Liberté, réponde si peu à la pensée de l’auteur. Le Génie de M. Dumont ne plane pas sur la grande ville ; il s’envole , il la quitte, il va disparaître... cruelle et involontaire épigramme, que le gouvernement de 1830 eut l’indulgence de tolérer. Un buste de Pierre Guérin ( 1831 ), placé à Rome, dans une des salles de l’École française ; une Étude déjeune Femme, expo.sée en 1844 et acquise pour le Luxembourg ; une statue du maréchal Bugeaud, inaugurée à Alger le 14 août 1852 , et celle du Commerce, figure un peu lourde et insignifiante , placée à l’un des angles de la Bourse, à Paris , complètent l’œuTe , peu abondante , de M. Augustin Dumont. Depuis 1844 il s’est abstenu de rien envoyer aux expositions publiques. M. Dumont d’ailleurs travaille peu. DUMONT D’URVILLE (Jules-Séeastien-César), nrvigateur célèbre, naquit à Condé-sur-Noireau, le 23 mai 1790. Son nom de d’Urville, le seul qu’on lui donnât dans .sa province , provenait d’un fief qu’avait acquis un de ses ancêtres. La charge de bailli , qu’un de ses ascendants avait achetée au prix de 12,000 livres tournois, se trouvait héréditairement dans sa famille depuis 1689. Gabriel d’Urville, son père, en fut pourvu dès sa majorité , et ce fut ainsi qu’il put s’allier à la famille de Croisilles , une des premières de la contrée. Neuf enfants naquirent de ce mariage, et notre grand navigateur était un des plus jeunes et de tous le plus chétif, ce qui ne l’empêcha pas de survivre à tous. Il passa son enfance à Condé, à Caen et à Bayeux, ob quelques titres nobiliaires avaient forcé M™" veuve d’Urville à chercher un refuge contre les ressentiments vindicatifs de sa bourgade en révolution. Là le jeune d’Urville eut pour principal précepteur son oncle, l’abbé de Croisilles, en sorte que son éducation fut surtout domestique, ce qui nuisit quelque temps à son avancement et peut-être à sou bonheur, en motivant par quelques singularités la réputation d’excentricité qu’on lui avait faite. A sept ans il herborisait avant de savoir écrire. Toutefois, il termina ses études aux collèges de Bayeux et de Caen. Mais comme sa mère craignait poui ses mœurs l’influence des mondains exemples, elle le fit résider chez elle , tout en l’envoyant comme externe au collège ; de là vint qu’il ne put entrer à l’École Polytechnique, et ce fut la source d’un de ses plus vifs chagrins. Chez sa mère il négligeait la physique pour dévorer des romans, l’algèbre pour la botanique, débauche d’esprit que la vie de collège eût rendue impossible.

Recommandé par le préfet Caffarelli à son frère , préfet maritime, le jeune d’Urville fut admis dans la marine de Brest en qualité d’aspirant provisoire, aux appointements de 18 francs par mois ; il avait dix-sept ans, et il prit rang sur L’Aquilon. Au bout de l’année, il était le premier inscrit par ordre de mérite sur une liste de soixante aspirants. Satisfait de son grec et de son latin de collège, d’Urville appliqua son zèle à étudier l’hébreu, l’anglais et l’allemand ; il embrassa encore beaucoup d’autres études, apprit d’autres langues moins répandues, effleura plusieurs sciences à la fois ou tour à tour. Son attention se détournait si fréquemment, qu’il ne recueillait des études étrangères à son état que des connaissances fort superficielles , peu capables d’alimenter son esprit ou d’occuper positivement son imagination : aussi fut-il durant quelques années un des hommes les plus ennuyés qui aient jamais été. Ce grand nombre d’idiomes qu’il cherchait à s’assimiler produisait en lui quelque confusion d’idées et comme un vide moral, qui nuisait à son intelligence, ne laissant toute latitude qu’à son courage , la plus rare, la plus persévérante et la moins influençable des facultés de l’âme.

Pour distraire ses ennuis, d’Urville épousa en 1815, à l’âge de vingt-cinq ans, une très-belle Provençale, fille d’un horloger de Toulon ; mais ce ne fut qu’après avoir consacré une partie de sa jeunesse à la poursuite sentimentale du bonheur. Dégoûté de son état, surtout par l’inaction à laquelle le condamnait l’égoïsme de quelques supérieurs, il ne tint pas à lui qu’alors il ne divorçât d’avec la marine. Cependant, depuis quelques années , il avait le grade d’enseigne. Enfin , l’amiral Hamelin l’ayant fait admettre à partii. iper aux travaux hydrographiques de la gabare La Chevrette, d’Urville partit pour l’archipel grec le 3 avril 1819, laissant à ceux qui l’envoyaient l’opinion qu’il était ceites le marin le plus instruit de Toulon, mais aussi le plus spéculatif et en conséquence le plus inutile. Il se montra surtout bon botaniste et antiquaire exercé, visitant avec la curiosité la plus investigatrice non-seulement les eûtes du PontEuxin, mais plusieurs vifles grecques. Ce fut en 1820 que le consul de France en Grèce lui fit voir, près de Milo, une statue de marbre un peu tronquée, qu’un rustre de la contrée avait trouvée dans son champ ; le paysan en voulait 150 piastres grecques (environ 116 fr. ), somme que le consul ne se souciait pas d’avancer, doutant que la statue la valût. D’Urville, lui, ne s’y méprit point ; ce marbre lui parut un chef-d’œuvre , et il y vit dès le premier coup d’œil la Vénus victrix, détériorée par le temps ; il l’estima, sans hésiler, à 5,000 fr. Mais comme il avait moins d’argent que de goût, ce fut l’ambassadeur de France à Constantinople, le marquis de Rivière, qui, sur son témoignage et ses récits, fit acheter le torse par M. de Marcellus , premier secrétaire de l’ambassade, au prix de 600 piastres ( moins de 500 fr.). Une fois à Paris, la Vénus de M i I o fut estimée à 300,000 fr. et admirée à l’équipollent. Tout l’honneur de cette conquête sur l’antiquité revint comme de raison à l’ambassadeur, dont le nom , dans ce premier moment, fut seul inscrit sur le marbre.

De retour à Paris, d’Urville fut nommé lieutenant de vaisseau et décoré. Peu après il obtint, pour l’Océanie, l’expédition de £a Co2Mi//e, ayant pourchef le capitaineL -Isid. Du-