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SOPHONIE (LE LIVRE DE)


ments qui ont été retrouvés naguère dans une traduction copte. Voir Cheyne, Encyclopœdia biblica, 1. 1, au mot Apocrypha, § 21 ; Schùrer, Theologische Literaturzeitung, 1899, col. 8, et Geschichte des jûdischen Volkes, 3e édit., t. iii, p. 271-272. L. Fillion.

4. SOPHON1E (LE LIVRE DE). — I. Le SUJET DU LIVRE. — Ce livre est remarquable par son unité. On voit qu’il a dû être composé d’un seul jet, comme un résumé fidèle de la prédication du prophète. Son thème principal, c’est le « jour du Seigneur », jour terrible où la justice triomphera de l’iniquité des hommes, et où le vrai Dieu réglera ses comptes avec ses ennemis, à quelque race qu’ils appartiennent, surtout avec les éléments impies de Juda et de Jérusalem, et ne laissera subsister que les bons, après les avoir purifiés par la souflrance. En ce grand jour, ! a vengeance du Seigneur se manifestera sous la forme d’une catastrophe universelle, que l'écrivain sacré décrit tantôt comme un épouvantable carnage, i, 7, tantôt comme une guerre désastreuse. C’est cette seconde image qui est la plus développée : nous entendons les trompettes de guerre et les cris des combattants, i, 10-11, 16 ; nous voyons le sang couler sur le champ de bataille ei les cadavres joncher le sol, i, 17 b ; nous assistons au pillage et au sac des villes, I, 16, à la dévastation complète des régions parcourues par l’ennemi victorieux, i, 13 et ii, 4 ; etc.

Le prophète ne détermine pas quel sera l’instrument des vengeances du Seigneur, quel conquérant étranger viendra châtier Juda et Jérusalem, Moab et Ammon, les Philistins, Assur et l’Ethiopie. Il ne peut pas être question des Assyriens, encore très puissants, il est vrai, mais qui sont eux-mêmes menacés, ii, 13-15, et qui devaient bientôt sombrer. F. Schwally, Ssefanja, 1890, a pensé aux Égyptiens ; mais la suggestion n’est pas heureuse, puisque, d’après ii, 12, l’Egypte, représentée par sa partie la plus méridionale, l’Ethiopie (hébreu, Kué), devait subir aussi le jugement divin. Au dire des anciens historiens, et spécialement d’Hérodote, i, 103-105, les Scythes envahirent l’Asie antérieure entre les années 627-607, et y causèrent de grands ravages. De nombreux exégètes contemporains, à la suite de Hitzig et d’Ewald, ont conjecturé que Sophonie aurait emprunté quelques traits de sa description du « jour du Seigneur s à l’impression produite par l’arrivée de ces hordes sauvages. Mais les allusions sont trop générales, par conséquent trop vagues, pour donner du poids à cette hypothèse. Et surtout, l’ennemi que le prophète contemplait en esprit devait être encore plus redoutable et plus universel que les Scythes, puisqu’il menaçait non seulement la Palestine et ses alentours, mais aussi les lointains et puissants pays d’Assur et d’Ethiopie. En fait, ce furent les Chaldéens, dont la puissance grandissait alors rapidement, qui devaient servir d’instruments à la colère du Seigneur ; mais notre prophète est muet à leur sujet.

II. Division et analyse. — Le thème, tel que nous venons de l’indiquer brièvement, se dédouble sous la plume de Sophonie, car, à la manière des prophètes antérieurs, il ne manque pas de faire succéder à la menace la douce et brillante promesse pour un avenir plus ou moins lointain. Entre les deux, il place un grave avertissement, destiné à mieux attirer l’attention et les réflexions des coupables sur la proximité de la vengeance céleste. — Le livre se divise donc en trois petites sections, qui sont très ostensiblement marquées, non seulement par la variété des pensées dominantes, mais aussi par une sorte de refrain, qui termine la première et la seconde partie : « Toute la terre sera dévorée par le feu de son (ou de mon) indignation. » >Cf. î, 18 ; iii, 8.

1° Première section : la menace, i, 2-18. — Après le

titre, $. 1, qui détermine le caractère général et l’auteur du livre, la famille et l'époque de ce dernier, Sophonie prend la parole au nom du Seigneur, contre tous les hommes sans exception, les menaçant de son jugement inexorable. C’est vraiment le Dies irse de l’Ancien Testament qui retentit dans ce passage. Cꝟ. 14-18. Le prophète développe avec éloquence les pensées suivantes : — a) Tout ce qui a vie sur la terre subira le jugement du Seigneur, I, 2-3 ; — b) ce jugement atteindra surtout le royaume de Juda et Jérusalem, sa capitale, à cause des excès idolâtriques des habitants, i, 4-7 ; — c) un jugement plus spécial encore est réservé à chacune des différentes classes de citoyens, surtout aux princes et aux grands, comme aussi aux esprits forts qui, parmi leurs débauches, tournaient en dérision les menaces divines, i, 8-13. — d). Ce jour du Seigneur arrivera bientôt, et il n’est pas possible d’en décrire les terreurs, i, 14-18.

2° Seconde section : l’avertissement motivé, ii, 1-m, 8. — De la menace, le prophète passe tout à coup à l’exhortation pressante, et, pour donner à celle-ci plus de poids, il revient, sous une autre forme, à l’annonce réitérée des vengeances de Jéhovah, soit contre plusieurs peuples païens des environs et des régions lointaines, qui avaient maltraité les Israélites, soit contre ces derniers eux-mêmes. L’exhortation proprement dite n’occupe que quelques lignes, - ii, 1-3 ; la plus grande partie de cette section, ii, 4-in, 8, est consacrée à promulguer de nouvelles sentences de ruine contre les Philistins, II, 4-7, contre les Moabites et les Ammonites, n, 8-11, contre les Éthiopiens, ii, 12, contre les Assyriens, ii, 13-15, enfin contre Jérusalem et ses habitants, m, 1-8.

3° Troisième section : promesses de salut, iii, 9-20.

— Sophonie proclame. maintenant avec joie le salut futur. Sa belle description nous montre les Gentils qui se soumettent au Seigneur et l’adorent, Juda qui se convertit et sert fidèlement son Dieu. Pour tous les hommes s’ouvre une ère de profonde paix et de bonheur parfait (l'âge d’or messianique). Trois promesses retentissent l’une après l’autre. La première, iii, 9-10, regarde les païens, dont elle prédit la conversion à venir. La seconde, iii, 11-13, est relative aux Israélites : ils seront à jamais rétablis comme peuple théocratique, et Dieu éloignera d’eux toute iniquité. La troisième promesse, m, 14-20, s’adresse spécialement à Jérusalem, dont elle décrit la gloire et le bonheur, après qu’elle aura été comme transfigurée.

4° Accomplissement de l’oracle. — Comme on l’a fort bien dit, « la prophétie de Sophonie commença à se réaliser par les désastres qui atteignirent les nations voisines (d’Israël). Elle s’accomplit davantage encore par les grandes convulsions qui secouèrent les peuples de l’est, peu de temps après. Elle s’accomplit pour Juda par la captivité (de Babylone) et la destruction de la nation coupable. Ce furent là, en effet, autant de pas vers le terme grandiose, des éléments qui contribuèrent à amener la plénitude des temps, des périodes de l'établissement du royaume universel de Dieu. » Kirkpatrick, Doctrine of the Prophets, p. 262.

III. Authenticité. — 1° La tradition. — a) Le livre de Sophonie, des mains de la Synagogue a passé dans celles de l'Église, comme l'œuvre de l'écrivain auquel il a toujours été attribué. Toutes les anciennes listes du canon biblique le mentionnent en ce double sens.

— 6) Les preuves intrinsèques s’ajoutent aux anciens' témoignages. En examinant le livre à fond, l’on se rend compte qu’un témoin oculaire pouvait seul parler de l'époque de Josias comme le fait Sophonie. C’est pour cela en particulier que l’auteur, du livre signale, sans les expliquer ni les développer, un certain nombre de traits qui sont plus ou moins obscurs pour nous, mais dont ses contemporains avaient la clef. Par exemple, i, 3 : (Je détruirai) les objets de scandale et aussi les