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SEDÉCIAS


vention divine. Malheureusement Sédécias ne travailla guère à l’obtenir. « Il fit ce qui est mal aux yeux de Jéhovah, son Dieu, et il ne s’humilia point devant Jérémie le prophète, qui lui parlait de la part de Jéhovah. » IV Reg., xxiv, 19 ; II Par., xxxvi, 12. Josèphe, Ant. jud., X, vii, 2, 5, dit que Sédécias devint roi à yjhgt et un ans, et qu’il méprisait ce qui est juste et honnête, parce qu’il était entouré d’impies, ce qui ne l’empêche pas d’ajouter qu’il avait une bonne nature et l’amour de la justice ; Jérémie, xxxvil, 2, résume tout le règne en disant que Sédécias « n’obéit point, ni lui, ni ses serviteurs, ni le peuple du pays, aux paroles que Jéhovah avait prononcées par Jérémie, le prophète, » alors l’organe autorisé de la pensée théocratique.

Habitués de longue date à la suzeraineté égyptienne, et voyant avec terreur l’empire du nord étendre de plus en plus sa domination de leur côté, les hommes de Juda comptaient que l’Egypte serait pour eux une protection efficace. Néchao intervint en effet un moment et réussit à exercer sur Juda un pouvoir plus exigeant que bienveillant. Mais Nabuchodonosor reprit bientôt le dessus, et le « roi d’Egypte ne sortit plus de son pays ; car le roi de Babylone avait pris tout ce qui était au roi d’Egypte, depuis le torrent d’Egypte jusqu’au ileuve de l’Euphrate. » IV Reg., xxiv, 7. Joachin, qui avait tenté de s’émanciper du joug chaldéen, avait été déporté après trois mois de règne. Sédécias reçut le pouvoir dans ces circonstances. Tout un parti, composé de faux prophètes et de devins, s’en allait répétant : « Vous ne serez pas assujettis au roi de Babylone. » Jer., xxvii, 9. Jérémie proclamait au contraire que le salut était dans la soumission aux Chaldéens. Il le répéta à Sédécias. Il insista auprès des prêtres et du peuple, auxquels les faux prophètes annonçaient que les vases sacrés déjà emportés à Babylone avec Joachin en reviendraient bientôt. « Soumettez-vous au roi de Babylone et vous vivrez, » Jer., xxvii, 17, leur redisait-il. Il n’était pas écouté. La quatrième année de Sédécias, le faux prophète Hananias annonça que, dans deux ans, Jéhovah ferait revenir les vases sacrés et les captifs. Jérémie réitéra l’assurance du contraire, et, en preuve de ce qu’il avançait, il prédit qu’Hananias mourrait dans l’année. Deux mois après, le faux prophète mourait. Jer., xxviii, 1-17. Cette année-là même, Sédécias s’était rendu à Babylone pour renouveler ses hommages au puissant suzerain. Jer., lii, 59. L’accueil qu’il reçut fit peut-être concevoir à Hananias de trop belles espérances, qu’il eut la témérité de présenter comme des certitudes.

Le pharaon Ouahibri, Apriès ou Éphrée, venait de monter sur le trône égyptien. Voir Éphrée, t. ii, col.1882. Jeune et ambitieux, il ne demandait qu’à se mesurer avec l’adversaire chaldéen, dont le domaine arrivait maintenant jusqu’à ses propres frontières. Les espérances que faisait concevoir l’avènement du nouveau pliaraon, peut-être même des propositions directes, Ezech., xvii, 15, surexcitèrent les esprits en Juda, à Tyr et chez les Ammonites, Jer., xxvii, 2, 3, tandis qu’Édom, Moab et les Philistins se tenaient sur la réserve. Sédécias, poussé par l’enthousiasme inconsidéré de son entourage, « se révolta contre le roi Nabuchodonosor, qui l’avait fait jurer par le nom de Dieu. » II Par., xxxvi, 13. Le roi chaldéen partit aussitôt en campagne. Êzechiel, xxi, 25-27, le montre au carrefour des chemins qui mènent d’un côté à Rabbathd’Ammon, de l’autre en Juda, et demandant au sort l’indication du parti qu’il doit prendre. Puis il vint camper à Ribla, surl’Oronte, et envoya de ce point central deux armées, l’une contre Tyr et l’autre contre Juda. Celle-ci, après avoir tout ravagé, se présenta devant Jérusalem, la neuvième année de Sédécias, le dixième mois. Jer., xxxix, 1.

Sédécias envoya demander à Jérémie de consulter Jéhovah, dans l’espérance de son intervention comme au temps d’Ezéchias. Le prophète ne put qu’annoncer la catastrophe imminente. Jer., xxi, 1-14. Menacé et persécuté par le parti des optimistes, il n’en continuait pas moins à dire la vérité : la ville sera prise, le roi déporté et la résistance inutile. Jer., XXXII, 2-5. Ses menaces étaient cependant accompagnées de la promesse d’une restauration dans l’avenir. Jer., XXXIII, 2-26. Renouvelant ses prophéties, alors qu’en dehors de Jérusalem les.Chaldéens n’avaient plus à réduire que Lachis et Azéca, il assurait à Sédécias qu’il tomberait aux mains du roi de Babylone, mais que cependant il ne mourrait pas par l’épée. Jer., xxxiv, 2-7. Au cours du siège, Sédécias provoqua une mesure équitable, l’affranchissement de tous les esclaves de condition hébraïque ; mais bientôt après, on revint sur la décision prise, ce qui était contraire à la Loi, ainsi que le rappela Jérémie, en prédisant aux transgresseurs l’esclavage dont ils auraient bientôt à souffrir eux-mêmes. Jer., xxxiv, 8-22. Le prophète suppose l’éloignement de l’armée assiégeante et son retour prochain. Il est à croire que, se croyant délivrés, les habitants se repentirent de la généreuse décision que leur avaient inspirée le malheur du siège.

Éphrée s’était mis en route avec une armée pour refouler les Chaldéens. En l’apprenant, ceux-ci abandonnèrent le siège de Jérusalem pour se porter au-devant des Égyptiens. À Jérusalem, on se crut sauvé. Jérémie cherche à dissiper les illusions : « L’armée du pharaon, qui est sortie pour vous secourir, va retourner au pays d’Egypte ; les Chaldéens reviendront combattre contre cette ville, ils la prendront et la brûleront. » Jer., xxxvii, 7. Les deux adversaires n’en vinrent pas aux mains. Éphrée hésita à risquer sa belle armée et se retira, tandis que Nabuchodonosor ne se souciait pas davantage d’affronter un ennemi redoutable. Josèphe, Ant. jud., X, vii, 3, dit que Nabuchodonosor mit les Égyptiens en déroute. Le texte de Jérémie semble plutôt supposer une simple démonstration militaire, suivie d’un retour en arrière sans coup férir.

Le siège de Jérusalem reprit donc. On avait abattu des maisons de la ville et même des constructions royales pour se mettre en état de mieux résister aux machines de guerre et aux assauts de l’ennemi. Jer., xxxiii, 4. Jérémie qui, pendant l’absence de l’armée ennemie, avait voulu sortir pour aller au pays de Benjamin recueillir des biens, avait été accusé de trahison et jeté en prison. Sédécias, voyant la tournure que prenaient les événements, commençait à croire au prophète. Il lui avait naguère envoyé dire : « Intercède pour nous, je te prie, auprès de Jéhovah, notreDieu. » Jer., xxxvii, 3. Il ordonna de le traiter avec humanité. Il le fit même venir pour l’interroger secrètement. Jérémie lui répéta ses précédentes prédictions et ajouta : « Où sont les prophètes qui annonçaient : Le roi de Babylone ne reviendra pas contre vous, ni contre ce pays ? » Jer., xxxvii, 16-18. Au peuple, il faisait dire que l’épée, la famine ou la peste feraient périr ceux qui resteraient dans la ville, tandis que ceux qui passeraient aux Chaldéens auraient la vie sauve. On se récria contre lui, et Sédécias, l’ayant abandonné à la discrétion de ses ennemis, ceux-ci le jetèrent dans une citerne à moitié pleine de boue. Le roi l’en fit tirer et le remit dans la cour des gardes ; il lui promit ensuite de ne pas le livrer à ses ennemis. Le prophète lui dit alors que, s’il sortait pour se rendre au roi de Babylone, il aurait la vie sauve avec sa famille et la ville ne serait pas brûlée ; dans le cas contraire, la ville serait prise et brûlée et lui-même captif. Sédécias craignait que, sorti de la ville, il fût livré comme un jouet aux Juifs qui avaient passé aux Chaldéens, et peut-être accusé par eux auprès de Nabuchodonosor, qui le mettrait à mort. Josèphe,