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SACRIFICE


vi, 9, 10. Antiochus le Grand fit donner au Temple les animaux et ce qui était nécessaire pour qu’on offrit des sacrifices, cf. Josèphe, Ant.jud., XII, iii, 3, et l’on voit qu’à l’époque des Machabées un sacrifice avait encore lieu pour le roi de Syrie, bien qu’on fût en guerre avec lui. I Mach., vii, 33. L’empereur Auguste voulut qu’à perpétuité on offrît, aux frais du trésor impérial, un sacrifice quotidien de deux agneaux et d’un taureau. Cf. Philon, Légal, ad Caj., 23, 40, édit. Mangey, t. ii, p. 569, 592. Au temps de Caligula, les Juifs se vantaient d’immoler des victimes deux fois par jour pour l’empereur et pour le peuple romain. Cf. Josèphe, Bell, jud., II, x, 4 ; Cont. Apion., ii, 6. À trois reprises, Caligula fit immoler en son nom une hécatombe. Cf. Philon, Légat, ad Caj., 45, t. ii, p. 598. En 66 après J.-C, le premier acte d’hostilité contre les Romains fut la suppression de tous les sacrifices offerts pour des étrangers ou en leur nom. Les pontifes et les principaux du peuple protestèrent en vain contre cette mesure. Cf. Josèphe, Bell, jud., II, xvii, 2, 3.

VI. Sacrifices interdits. — 1° Sacrifices idolâtriques. — Les sacrifices aux idoles, si fréquents chez tous les peuples qui entouraient les Hébreux, furent très sévèrement interdits à ces derniers. Ils n’en succombèrent pas moins à la tentation d’en offrir dans tout le cours de leur histoire, jusqu’à l’époque de la captivité. Ils sacrifièrent au veau d’or, Exod., xxxii, 6, qui, tout en représentant pour eux Jéhovah, constituait pourtant un objet de culte formellement réprouvé. Exod., xx, 4. Pour les empêcher de sacrifier aux divinités agrestes, Moïse les obligea à amener toutes leurs victimes devant le sanctuaire. Lev., xvii, 5-7. Mais, dans le désert même, entraînés par les filles de Moab, ils sacrifièrent au dieu Béelphégor. Num., xxv, 2, 3 ; Deut., xxxii, 17. Le châtiment qui suivit cette infraction indiqua quelle était sa gravité. Num., xxv, 8, 9. En Chanaan, les Hébreux eurent. sous les yeux le spectacle des sacrifices offerts par Jes habitants à leurs faux dieux. Exod., xxxiv. 15. Cet exemple les entraîna à plusieurs reprises durant la période des Juges et attira sur eux de grandes calamités. Plus tard, les sacrifices idolâtriqiies, tolérés par Salomon, III Reg., xi, 8, se multiplièrent par la faute de certains rois, surtout de Jéroboam, III Reg., xii, 32 ; xiii, 1, et de Manassé. II Par., xxxiv, 4. Voir Idolâtrie, t. iii, col. 809-813. Lès prophètes constatent et réprouvent énergiquement ces sacrifices criminels. Is., lvii, 5, 7 ; lxv, 3 ; Jer., xliv, 3-25 ; Ezech., xvi, 20, 21 ; xx, 28 ; xxm, 39 ; Ose., xi, 2, etc. Au temps des Machabées, les rois de Syrie multiplièrent les efforts pour introduire les Sacrifices idolâtriques dans le Temple même de Jérusalem. 1 Mach., i, 50 ; II Mach., iv, 19 ; vi, 4.

2° Sacrifices humains. — Dieu a tenu à faire comprendre, dans une circonstance mémorable, ce qu’il pensait des sacrifices humains. Lui-même commande à Abraham de lui immoler son fils Isaac. Ce sacrifice se présente donc non seulement comme capable de rendre hommage à la divinité, mais comme réclamé par la divinité elle-même. Au moment de frapper la victime, Abraham est arrêté par l’ange deJéhovahet il substitue un bélier à Isaac. Gen., xxii, 2-13. Il ressort de là que Dieu se contente de l’obéissance héroïque de son serviteur, mais qu’il réprouve le sacrifice de l’homme, même dans les circonstances où ce sacrifice semblerait le plus impérieusement exigé. Cette leçon était nécessaire dans le pays de Chanaan, où le culte de Moloch réclamait le sacrifice de victimes humaines. Malheureusement les Israélites, de leur entrée en ce pays jusqu’à la captivité, se laissèrent entraîner trop souvent aux pratiques de ce culte homicide. Voir Moloch, iv, col. 1226-1229 ; Lagrange, Études sur les religions sémitiques, Paris, 1905, p. 101rl09, 445. La loi interdisait, sous peine de mort, d’offrir de pareils

sacrifices. Lev., xviii, 21 ; xx, ^2. — Jephté s’engagea témérairement à offrir à Jéhovah, en holocauste, celui qui le premier sortirait des portes de sa maison à sa rencontre, quand il reviendrait vainqueur des Ammonites. Ce fut sa fille qui se présenta, et, deux mois après, « il accomplit à son égard le vœu qu’il-avait fait. » Jud., xi, 31-39. L’Écriture se contente de raconter le fait sans commentaire, comme beaucoup d’autres de cette époque, alors même qu’ils sont très évidemment répréhensibles. Il n’est pas douteux que le sacrifice offert par Jephté dans ces conditions n’ait été formellement opposé à la lettre et à l’esprit de la Loi. — Mésa, roi de Moab, assiégé dans sa ville par les Israélites et ne pouvant s’échapper, prit son fils aîné et l’immola en holocauste sur la muraille. IV Reg., iii, 27. Il entendait par là s’attirer la protection de son dieu Chamos. Voir MÉSA, t. iv, col. 1020. Dans la pensée des Chananéens, le sang humain assurait aux remparts d’une ville la protection du dieu de la cité. À Gézer et à Ta’annek, en Chanaan, on a rétrouvé dans les murs, sous la place des portes, des jarres contenant des ossements d’enfanls avec des traces de feu. Cf. Palestine Exploration Fund. Quart. Slal., 1903, p. 17, 33, 223, 224. Il est raconté que quand Hiel de Bethel rebâtit Jéricho, « il en jeta les fondements au prix d’Abiram, son premier-né, et il en posa les portes au prix de Ségub, son dernier fils. » III Reg., xvi, 34. Ce fait est présenté comme une conséquence de la malédiction de Josué, formulée en termes identiques. Jos., vi, 26. Il ne serait pas impossible pourtant qu’Hiel, agissant volontairement, ait lui-même immolé ses deux fils, selon le rite chananéen, pour concilier la faveur des dieux à la nouvelle cité. — On ne saurait prendre pour un sacrifice humain l’immolation que Samuel fit d’Agag, roi d’Amalec, en le coupant en morceaux « devant Jéhovah ».

I Reg., xv, 33. On n’offrait à Jéhovah que des victimes pures et nettement déterminées, jamais des hommes, pas même des idolâtres. D’ailleurs le texte parle d’une immolation « devant Jéhovah », c’est-à-dire en présence de l’Arche, et non d’un sacrifice « à Jéhovah ». Agag, voué à l’extermination, avait été épargné par Saûl. Samuel n’intervint qu’à défaut du roi. Cf. Vigouroux, La Bible et les découvertes modernes, 6e édit., t. iv, p. 497-505. — La Sagesse, xii, 4-6, rappelant les abominables sacrifices des Chananéens, y voit la cause de leur réprobation.

VII. Conditions morales des sacrifices. —1° Obéissance à la loi. — La loi déterminait les conditions rituelles des sacrifices. La morale obligeait l’Israélite à s’en tenir à ces prescriptions. On offrait ainsi des « sacrifices de justice », c’est-à-dire des sacrifices conformes à la loi. Ps. iv, 6. Les hommes pieux n’y manquaient pas. Ps. lxvi (lxv), 13-15. Les autres contrevenaient souvent aux prescriptions mosaïques. Ils se permettaient d’offrir des bêtes aveugles, boiteuses ou malades, et déshonoraient ainsi l’autel du Seigneur. Mal., i, 6-9 ; ii, 13. Quand, au contraire, on présente à Jéhovah des offrandes selon la justice, elles lui sont agréables. Mal., iii, 3, 4. Ézéchiel, xl.vi, 12-15, prévoit l’offrande de pareils sacrifices dans le nouveau Temple, et Jérémie, xxxiii, 18, annonce que les ministres pour les offrir ne manqueront jamais. Il faut, à cet égard, s’en tenir aux règles anciennes. Eccli., vii, 35 ; xiv, 11.

Ne te présente pas devant le Seigneur les mains vides,

Car toutes ces offrandes doivent être faites à cause du

L’offrande du juste engraisse l’autel, [précepte.

Et sa suave odeur s’élève devant le Seigneur.

Le sacrifice de l’homme juste est agréable,

El Dieu en conservera le souvenir. Eccli-, xxxv, 4-6.

II est à remarquer que Notre-Seigneur, après avoir guéri un lépreux, lui recommande expressément d’aller offrir le sacrifice prescrit par Moïse. Marc, i, 44 ; Luc, v, 14.