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ROIS (LIVRES DES). I ET II SAMUEL


est parlé, IIReg., xxi, 19, d’un géant philistin nommé Goliath, tué par un habitant de Bethléhem, cela ne suppose nullement deux récits qui se contrediraient. D’après I Par., XX, 5, le second héros philistin était le frère du géant mis à mort par David (t. iii, col. 269). — Sur ces divers points, voir Himpel, Ueber Widersprùche und verschiedene Quellen der Bûcher Samuelis, dans la Tûbinger Quartalschrift, 1874, p. 71-126, 237, 281 ; Keil, Lehrbuch der Einleitung, p. 167-171 ; Clair, Les Livres des Mois, t. i, p. 18-29 ; Cornely, Introductio specialis in historicos Vet. Testam. libros, in-8°, Paris, 1887, p. 260-272.

V7. LA VÉRACITÉ ET L’AUTORITÉ DES LIVRES DE SA-MUEL. — De ce qui vient d’être dit, il résulte que les néo-critiques en attaquent sur bien des points l’exactitude et le caractère historique. D’ailleurs, ils affirment en termes exprès qu’en beaucoup d’endroits, surtout dans les passages qui mentionnent quelque intervention surnaturelle, le récit n’a pour base que des légendes populaires. Hugo Winckler, entre autres, Geschichte IsræU in Einzeldarstellungen, in-8°, Leipzig, 1900, t. ii, p. 147-152, prétend que la plus grande partie de nos deux livres est légendaire. D’après Nowack aussi, Die Bûcher Samuelis ûbersetzt und erklàrt, p. xiv-xxiii, les chap. i-m du premier livre sont de l’idylle, non de l’histoire ; dans les chap. ix etx, on remarque de nombreux embellissements poétiques, beaucoup de détails qui ont reçu « une forme idyllique » ; dans les chap. vii, viii, xii, etc., souvent la narration n’a rien de réel, mais a été inventée à plaisir. Etc. "Wellhausen, Prolêgomena zur Gesch. IsræU, 5e édit., p. 247-275, prétend de même qu’  « il n’y a pas un mot de vrai » dans tel et tel récit ; il mentionne en particulier, p. 266, a la légende du combat entre le jeune berger et Goliath, I Reg., xvii, 1-xvIn, 5. » À travers le livre entier les « tendances » seraient visibles, et elles auraient corrompu l’esprit des récits. Aussi, dans son ouvrage Die isrælitische und jûdische Geschichte, in-8°, 2e édit., Berlin, 1895, p. 51-64, le même auteur supprime-t-il un nombre considérable d’événements racontés par les deux premiers livres des Rois. Voir aussi Maurice Vernes, dans V Encyclopédie des sciences religieuses, t. xi, p. 445. Néanmoins, les écrivains rationalistes les plus avancés sont obligés de reconnaître que d’autres passages, également nombreux, présentent toutes les garanties désirables de véracité et qu’on ne saurait nier leur caractère visiblement historique. Ils admirent tout spécialement, dans le second livre, les chap. ixxx, où « tout le monde reconnaît qne nous avons une source historique de premier ordre. » Nowack, l. c, p. xxit. D’après Kuenen, Histor.-crit. Onderzoek, 2e édit., t. i, p. 380, ces chapitres, et d’autres passages encore, sont « l’œuvre d’un auteur bien informé, » qui ne fait pas intervenir à tout instant la divinité. Le D r Kautzsch ajoute, Abriss der Geschichte des alttestamenll. Schrifttums, Fribourg-en-Brisgau, 1897, p. 21, que ce document fait partie de « ce que nous possédons de plus complet, de plus fidèle, de plus parfait sur le domaine de l’histoire Israélite, bien plus, sur celui de l’histoire ancienne en général. ».^

A coup sûr, le critique catholique ne peut être que de leur avis lorsqu’ils font un éloge si mérité des passages en question ; mais il applique à tout le contenu des deux livres ce qu’ils ne consentent à accepter qu’à propos de fragments isolés. Nous dirons donc que la véracité des livres de Samuel est attestée de toutes manières. — 1° Elle l’est d’abord par les preuves internes : vie et simplicité des récits ; minutie des détails, qui sont d’ailleurs toujours conformes aux mœurs de l’époque ; exactitude parfaite de la topographie ; sincérité manifeste et candeur touchante du narrateur, qui demeure étranger à tout esprit de parti.

H raconte avec une entière franchise les égarements des acteurs les plus vénérés de cette histoire, aussi bien que leurs plus belles actions : « Sacerdoce, prophétisme, royauté, tout ce qui est élevé en Israël, passe, comme le peuple lui-même, sous le niveau impartial du jugement divin. » La Bible annotée, Les livres prophétiques, t. In, Neuchâtel, 1893, p. 185. David n’est pas plus épargné que les autres sous ce rapport, et l’histoire de son double crime est exposée dans tous ses détails, avec les châtiments terribles qu’elle lui attira. Les caractères des divers personnages sont décrits aussi avec une vérité psychologique très frappante. Nous voyons se dresser vivants devant nous Héli, avec son singulier mélange de faiblesse et de piété ; Samuel avec sa gravité sereine, sa mâle décision, sa grandeur ; Saûl, d’abord aimé de Dieu, puis devenant insupportable et se livrant à toute la fougne de sa passion ; David, aimable, juste, habile, prudent, aux sentiments pleins de naturel, etc. Les acteurs secondaires, Abner, Jonathas, Joab, etc., sont aussi très bien dépeints. — 2° La véracité de ces deux livres est également attestée par le dehors, c’est-à-dire par d’autres passages de la Bible qui leur confèrent une autorité en quelque sorte divine. Jérémie fait plusieurs fois allusion à leur contenu : cf. Jer., ii, 37, et II Reg., xiii, 19 ; Jer., xv, 1, et I Reg., xii, 19-23 ; Jer., xxiii, 5, et II Reg. vii, 12 ; viii, 15, etc. Les deux derniers livresdes Rois citentpresque textuellement plusieurs passagesdes deux premiers. Cf. III Reg., il, 27, et I Reg., ii, 31, etc. Comme il a été dit plus haut (col. 1134), le premier livre des Paralipomènes reproduit en partie, et d’une manière toute semblable, , 1e thème traité dans I et II Reg. Le fils de Sirach, Eccli., xlvi, 6-xlvii, 13, résume les livres de Samuel de la façon la plus exacte ; il en est de même du Ps. xvii, sans parler des titres d’assez nombreux chants du Psautier, certainement très anciens, quoi qu’il en soit de leur authenticité, qui se rapportent à divers traits de la vie de David. Cf. Ps. iii, . 1 ; xvii, 1 ; xxvi, 1 ; xxxiii, 1 ; l, 1 ; li, 1-2 ; lii, 1 ; lvî, 1 ; lviii, 1 ; lix, 1-2 ; lxii, 1, etc. Dans l’Épltre aux Hébreux, I, 5, saint Paul appuie son argumentation sur un texte emprunté à II Reg., vii, 14 ; dans le discours qu’il prononça à Antioche de Pisidie, Act., Xiii, 20-22, il résume brièvement le sujet traité dans les livres de Samuel, et fait un emprunt à I Reg., xiii, 14. La Sainte Vierge s’est approprié plusieurs passages du cantique d’Anne. Cf. Luc, i, 46-55, et I Reg., ii, 1-10. Jésus-Christ lui-même fit une allusion très claire à I Reg., xxi, 1-6, lorsqu’il demanda aux Pharisiens s’ils avaient « lu >> ce qu’avait fait le roi David lorsqu’il fut pressé par la faim. Cf. Matth., xii, 3-4. Tout cela prouve en quelle haute estime les livres de Samuel étaient tenus chez les Juifs. Pour attaquer à un autre point de vue la crédibilité de cet écrit, les critiques rationalistes ont relevé quelques erreurs de chiffres qu’on rencontre cà et là dans le texte ; entre autres les suivantes : I Reg., vi, 19, où il est dit que le Seigneur frappa « 70 hommes et 50000 hommes de Bethsamès, » qui avaient regardé l’arche ; I Reg., xiii, 1, ou nous lisons que Saül avait « un an » au début de son règne ; probablement aussi I Reg., xiii, 5, et II Reg., x, 18, etc. Mais il est de toute évidence qu’on n’a pas le droit de rejeter ces erreurs sur l’auteur lui-même ; elles sont le fait des copistes, qui se sont souvent trompés en transcrivant les chiffres, comme on le voit par les divergences qui existent entre le texte hébreu et les différentes versions. Voir L. Reinke, Beitràge zur Erklàrung des Alt. Testam, , t. iii, Munster, 1855, p. 125-150.

VII. CHRONOLOGIE DES LIVRES DE SAMUEL. — NOUS

nous trouvons en face des mêmes difficultés que pour les livres de Josué et des Juges : en effet, les renseignements positifs sont insuffisants pour que nous puissions déterminer avec certitude, d’un côté, la durée générale