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POUSSIÈRE


cendre et la poussière. Voir Cendre, t. ii, col. 407. La poussière implique l’idée de fragilité et surtout celle de mort. Elle convenait donc bien à l’expression d’un chagrin qui entamait la vie. Aux funérailles, chez les Arabes, « les femmes crient de toutes leurs forces, s’égratignent les bras, les mains et le visage, arrachant leurs cheveux, et se prosternant de temps en temps, comme si elles étaient pâmées de douleur ; elles prennent des poignées de terre ou de sable, et le jettent sur leur tête et sur leur visage. » De la Roque, Voyage dans la Palestine, Amsterdam, 1718, p. 260. — 5° Pour marquer la colère et l’indignation, on lançait de la poussière en l’air. C’est ce que fait Séméï, en accompagnant David de ses imprécations. II Reg., xvi, 13. À Jérusalem, les Juifs, en fureur contre Paul, lançaient de la poussière en l’air. Act., xxii, 23. Cette expression de l’indignation parait être instinctive en Orient. Un fellah ayant été battu sur l’ordre d’un effendi, jusqu’à ce qu’il eût perdu connaissance, « il y eut une grande lamentation. Le malheureux fut apporté tout près de ma maison, au

rv, 10 ; Job, xvi, 18 ; Is., xxvi, 21. — 3° Secouer la poussière de ses pieds sur quelqu’un ou sur un pays, c’est marquer qu’on regarde comme maudite la poussière de ce pays, qu’on ne veut rien emporter d’un pareil endroit, et qu’on cesse tout rapport avec des hommes qui n’ont su ni comprendre ni remplir leur devoir. Cette expression ne se lit que dans le Nouveau Testament. Matth., x, 14 ; Marc, vi, 11 ; Luc, îx, 5 ; x, 11 ; Act., xiii, 51. « Aujourd’hui, il n’est pas rare de voir un Égyptien, un Syrien, à la suite d’une discussion, ou au sortir d’une maison où il a été mal reçu, quitter ses babouches etles battre deux ou trois fois, semelle contre semelle, en face de son adversaire. Cela veut dire : Je ne veux plus avoir affaire avec toi. » Jullien, L’Egypte, Lille, 1891, p. 257.

— 4° À raison de la sentence originelle, Gen., iii, 19, la poussière éveille naturellement l’idée du tombeau. Aussi est-elle prise parfois pour la mort elle-même. Job, vii, 11 ; xx, 11 ; xxi, 26 ; xl, 8 (13) ; Ps. vii, ~6 ; Is., xxvi, 19 ; Dan., xii, 2. La poussière du tombeau, c’est-à-dire la mort ne chante pas la louange de Dieu. Ps. xxx

d62. — Égyptiennes répandant de la poussière sur leur tête en signe de deuil. D’après Wilkinson, Manners and customs of the ancient Egyptians, 1e édit., t. i, p. 167.

milieu d’une foule de femmes qui hurlaient comme des possédées ; la sienne surtout criait et se frappait la tête et jetait de la poussière en l’air, moremajorum, comme vous pouvez le voir dans les tombes. » Lady Gordon, Lettres d’Egypte, trad. Ross, Paris, 1869, p. 273.

II. Au sens figuré. — 1° La poussière du sol est l’image de ce qui est petit, faible, méprisable. Abraham parle au Seigneur, bien qu’étant poussière et cendre. Gen., xviii, 27. Dieu tire le pauvre de la poussière, c’est-à-dire de l’abaissement. I Reg., ii, 8 ; III Reg., xvi, 2. Les nations ne sont devant lui que poussière. Is., xl, 15. Il réduit en poussière ou renverse dans la poussière, c’est-à-dire humilie, abaisse et ruine, Moab, Is-, xxv, 12 ; xxvi, 5 ; Babylone, Is., xlvii, 1 ; Tyr, Ezech., xxvi, 4, 12 ; les ennemis. Is., xxix, 5. Il fait voler en poussière l’épée des puissants. Is., xli, 2. Dans l’épreuve, on est affaissé jusqu’à la poussière. Ps. xliv (xliii), 25. Jérusalem régénérée secoue sa poussière. Is., iii, 2. Après la captivité, les Juifs sauront tirer de leur poussière les pierres de leurs murs. II Esd., iv, 2. — 2° Mettre sa bouche dans la poussière, c’est se prosterner très humblement. Lam., iii, 29. Voir t. i, col. 541. Lécher la poussière des pieds de quelqu’un, c’est lui marquer sa complète soumission. Ps. lxxi (lxxii), 9 ; Is., xlix, 23. Ezéchiel, xxiv, 7, accusant Jérusalem de ses crimes, dit qu’elle a versé le sang sur la roche nue, et non sur la terre pour le recouvrir de poussière. Le prophète veut signifier que les crimes de Jérusalem ont été commis impudemment, au grand jour, et que tes traces en sont visibles. Cf. Gen.,

(xxix), 10. Le supplicié attaché à la croix est réduit à la poussière de mort, c’est-à-dire dévoré, après la perte de son sang, par une fièvre brûlante qui le dessèche comme une poussière et le conduit à la mort. Ps. xxii (xxi), 16. — 5° Les nuages sont comme la poussière des pieds de Dieu. Nah., i, 3. À Israël infidèle, la poussière, c’est-à-dire la sécheresse, sera envoyée au lieu de pluie. Deut., xxviii, 24.

III. Comparaisons tirées de la poussière. — 1° La poussière se compose d’une multitude innombrable de particules. La race d’Abraham deviendra aussi nombreuseque la poussière. Gen., xiii, 16 ; xxviii, 14 ; Num., xxiii, 10 ; II Par., i, 9. À la voix de Dieu, les cailles tombèrent comme la poussière dans le camp des Israélites. Ps. lxxviii (lxxvii), 27. Dans un sens analogue, Benadad, pour donner l’idée du grand nombre de ses soldats, prétend que la poussière de Samarie ne suffirait pas à remplir le creux de toutes leurs mains. III Reg., xx, 10. — 2° La poussière est le résultat d’un broiement d’éléments solides. Les ennemis sont broyés comme la poussière. II Reg., xxii, 43. — 3° La poussière légère est emportée par le vent. Les nations ennemies, Is., xvii, 13, les armées vaincues, IV Reg., xiii, 17, la fleur des méchants, « ’est-à-dire leur prospérité, les méchants eux-mêmes sont emportés par le vent comme la poussière. Ps. xviii (xvii), 43 ; xxxv (xxxiv), 5 ; Is., : xxix, 5. — 4° Le serpent rampe à terreet semble lécher et manger la poussière. Gen., iii, 14 ; Is., lxv, 25. En face d’Israël régénéré, les nations lécheront la poussière