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PIERRE (DEUXIÈME ÉPÎTRE DE SAINT)


raux dans le chap. ii, l’auteur revient, dans le chap.m, sur un trait spécial de leur doctrine perverse, la négation du second avènement de Jésus-Christ.Cf. ii, 10 et iii, 3, où le même trait caractéristique, qui post carnem in concupiscentia immunditix ambulant, eïjuxta proprias concupiscentix ambulantes, appliqué de part et d’autre, montre qu’il est vraiment question des mêmes personnes. Le texte iii, 17, ne insipientium (ùftéay.o>v, « des hommes sans loi » ) errore traducti excidatis…, prouve aussi que les èjjuraïitTa ! étaient antinomistes comme les t|/suSoS181<maXoi. Rejetant toute loi, ils se livraient à la débauche, et niaient le retour gênant du Christ. Comme l’auteur emploie plusieurs fois le futur à propos de ces faux docteurs, ii, 1, « erunt magistri mendaces ; » iii, 3, « ventent in novissimis diebus illusores, » quelques interprètes ont supposé que sa description concerne l’avenir et non le temps présent. Ce sentiment est inexact, car il est évident, d’après le sens de l’Épître, que saint Pierre écrit pour prémunir ses lecteurs contre un péril actuel. D’ailleurs, dans les versets 10-15 du chap. II (cf. ii, 20, yérovev ; ii, 22, auu.ês’6ï)XEv), il parle des hérétiques comme existant déjà réellement. Cf. II Tim., iii, 1-8, où saint Paul s’exprime d’une façon identique. Cette manière de faire devait montrer que le danger, déjà présent, deviendrait plus grand encore, parce que le mal irait en se développant.

2° Le but que se proposait l’auteur est indiqué parles détails qui précèdent. Il est même énoncé tout au long dans les dernières lignes de l’Épître, iii, 17-18, en termes tour à tour négatifs et positifs : « Vous donc, frères, avertis d’avance, soyez sur vos gardes, de peur qu’entraînés par l’erreur de ces insensés, vous ne veniez à déchoir de votre fermeté ; mais croissez dans la grâce et dans la connaissance de Notre-Seigneur et Sauveur Jésus-Christ. » Saint Pierre voulait donc prémunir ses lecteurs contre le nouveau danger qui les menaçait ; danger beaucoup plus grave que celui qui avait servi d’occasion et de but à sa première Épître. Voir col. 387. Nous ignorons de quelle manière il avait été averti du fait désolant qui a été signalé plus haut. Les relations entre Rome et l’Asie Mineure étaient d’ailleurs faciles et fréquentes à cette époque. Certain qu’il ne tarderait pas à mourir, cf. i, 14, Pierre se, hâta d’écrire cette seconde lettre, qui est avant tout, comme la précédente, une exhortation essentiellement pratique.

IV. Analyse. — La JJ a Pétri se fait remarquer, comme la première Épître, par son unité, et par une marche simple et claire. Voir Keil, Comment, ùber die Briefe des Petrus, p. 179-182.

1° Voici d’abord, en général, le sujet traité par l’apôtre. Dans les circonstances qui ont été décrites, il importait de rappeler dès le début aux chrétiens d’Asie Mineure la stricte obligation où ils étaient de mener une vie très sainte, et aussi la certitude parfaite de l’objet de leur foi. Il fallait ensuite les mettre directement et nettement en garde contre les séductions qui les menaçaient de la part des docteurs hérétiques. C’est ce thème qui est traité ici par saint Pierre. Il presse ses lecteurs d’organiser leur vie d’une manière conforme à la foi chrétienne, de se préserver des doctrines malsaines et des mauvais exemples de l’hérésie, enfin de se tenir prêts en vue du second avènement de Jésus-Christ. Il insiste aussi, dès la première ligne, sur la divinité de Jésus-Christ, cf. i, 1, dont il ne cite ensuite jamais le nom sans y ajouter le titre « Notre-Seigneur ». Cf. i, 2, 8, 11, 14, 16 ; iii, 18.

2° Il y a trois parties dans la lettre : a) Nécessité et motifs de croître dans la pratique de la vertu, i, 1-21 ; b) Description des mœurs et des maximes des faux docteurs, ii, 1-22 ; c) Réalité du second avènement de Jésus-Christ et instruction relative à la fin du monde, m, 1-18. La première partie est. morale ; la seconde polémique ; la troisième, tout ensemble pratique et doctrinale.

a) Après avoir brièvement salué ses lecteurs, i, 1-2, l’auteur les invite à grandir sans cesse dans les vertus chrétiennes : les bienfaits dont Dieu les a gratuitement comblés et les magnifiques promesses qu’il leur a faites sont pour eux de pressants motifs de vivre saintement. En agissant ainsi, ils réaliseront de la façon la plus sûre le but de leur vocation, qui consiste, d’une part, à connaître de plus en plus Notre-Seigneur Jésus-Christ, et, de l’autre, à conquérir la place qui leur est préparée dans le ciel, i, 3-11. Pierre se sent pressé de leur adresser cette recommandation, car Jésus lui a révélé que sa fin est proche ; c’est donc pour ainsi dire son testament qu’il fait en leur écrivant, i, 12-15. Comme raison spéciale de vivre très saintement, il leur signale la certitude de l’enseignement qui leur a été prêché, et il démontre successivement cette certitude par la prédication des apôtres et par les oracles des anciens prophètes.

6) Dans la seconde partie, dirigée ouvertement contre les docteurs hérétiques, l’auteur commence par affirmer avec énergie le châtiment futur de ces hommes pervers : Dieu, qui est fidèle à délivrer les justes, sera fidèle aussi à punir ces misérables, de même qu’il avait autrefois châtié les anges déchus, les contemporains impies de Noé, les infâmes habitants de Sodome et de Gomorrhe, ii, 1-9. Saint Pierre trace ensuite une peinture vivante, hardie, de leur conduite ignoble ; surtout de leur orgueil, de leur esprit de révolte, de leurs débauches. Il les montre comme les prédicateurs d’une fausse liberté, qui produit forcément l’esclavage, et il assure qu’il aurait été meilleur pour eux de ne pas connaître Jésus-Christ, ii, 10-22.

c) Dans la troisième partie, l’auteur réfute deux erreurs dogmatiques de ces docteurs de mensonge. Ils tournaient en ridicule la croyance au second avènement du Christ et à la fin du monde. L’apôtre répond avec vigueur que ces deux événements se passeront à l’heure voulue par Dieu, et que, s’ils sont retardés, c’est par un effet de la bonté du Seigneur, qui veut donner pleinement aux pécheurs le temps de se. repentir. Mais le jour du Seigneur viendra infailliblement ; les deux et la terre actuels seront dissous par le feu, non toutefois pour disparaître, mais pour faire place à de nouveaux cieux et à une nouvelle terre où habitera la justice, iii, 1-10. Pierre conclut en engageant ses lecteurs à se tenir toujours prêts, en vue du jugement divin, qui éclatera à l’improviste ; il en appelle sur ce point au témoignage de son bien-aimé frère Paul, iii, 11-16. Enfin, il exhorte les fidèles à se tenir en garde contre les faux docteurs, et à croître dans la connaissance et dans la grâce du Sauveur Jésus, iii, 17-18.

V. Authenticité. — I. preuves extrinsèques (voir Hundhausen, Das zweite Pontificalschreiben : .., p. 19100 ; Keil, Comment, ùber die Briefe des Petrus, p. 184, Th. Zahn, Einleit., t. ii, p. 89 sq. ; Cornely, Introd. ; Henkel, Der zweite Brief des Apostelfûrsten Petrus geprûft auf seine Echtheit, p. 47-89). — a) Si nous interrogeons la tradition sur ce point important, nous n’aurons pas à signaler la même unanimité de témoignages que pour la I re Épître ; nous trouverons cependant des preuves satisfaisantes. De nombreux faits historiques, regardés très justement comme indiscutables, sont beaucoup moins accrédités. Remarquons d’ailleurs que la II’Pétri est, dans son ensemble, moins pratique que la première lettre, qu’elle traite de sujets moins généraux, et qu’elle est née de circonstances plus spéciales. Il n’est donc pas étonnant qu’elle ne soit pas mentionnée et citée aussi fréquemment dans les temps anciens.

b) Néanmoins, elle était connue de très bonne heure dans l’Église comme un écrit inspiré et canonique. Au premier siècle, le pape saint Clément y fait plusieurs allusions très probables. Cf. surtout 1 ad Cor., vii, 5 ;