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VULGATE

correcteur de la Bible, dans la Revue biblique, 1899, t. viii, p. 289-295. Sur les instances et aux frais de Constance, la fille de Roger II, roi de Sicile, et l’épouse de l’empereur Henri VI, devenue religieuse, le diacre romain composa sa Bibliothèque. Ayant constaté la diversité des manuscrits latins, il rechercha quels étaient ceux qui étaient d’accord avec le texte hébreu et il n’en trouva aucun. Comparant donc les exemplaires latins avec les manuscrits hébreux, il en retrancha les additions superflues, réforma les transformations apportées au texte et réintégra les passages omis. Il donne ensuite des exemples de trois sortes de fautes qui corrompent les manuscrits apponendo, commutando et subtrahendo. Ses observations critiques s’étendent de la Genèse aux Psaumes, mais la fin de son traité manque. Il s’est servi des Quæstiones hebraicæ in Genesim de saint Jérôme et des Quæstiones hebraicæ in libros Begum, attribuées à saint Jérôme, mais dont l’auteur était un contemporain de Raban Maur. Le juif, que Nicolas avait consulté, connaissait bien la Bible hébraïque et les traditions juives, telles que nous les révèle Raschi († 1105). Nous ignorons l’influence qu’a pu exercer le correctoire de Nicolas Maniacoria. Les correctoires du XIIIe siècle nous sont mieux connus depuis les travaux du P. Denifle.

Les correctoires du XIIIe siècle. — Nous avons déjà parlé ici, voir t. ii, col. 1022-1026, du « texte parisien », qui s’est constitué à Paris au début du xin’siècle, que Roger Bacon a jugé si sévèrement et qui a été l’occasion des correctoires entrepris un peu plus tard par les dominicains et les franciscains. Cf. A. Gasquet, English biblical criticism in the thirteenth century, dans Dublin review, janvier 1898, t. cxxii, p. 1-21. Ajoutons seulement que le texte de Paris s’est fusionné avec le texte languedocien du xiiie siècle, dont il a été question précédemment, en un certain nombre de manuscrits signalés par S. Berger, Histoire de la Vulgate, p. 81. Ajoutons encore que le même savant croyait avoir retrouvé un manuscrit (le seul connu) de la Correctio Senonensis de 1236 dans la bible de l’évêque de Strasbourg, Jean de Dürbheim. Sur la part de travail de Thibaut de Saxe, voir t. ii, col. 1464. Le manuscrit unique qui porte la préface de Hugues de Saint-Cher est conservé à Vienne en Autriche, n° 1211. Les correctoires ont réagi sur les manuscrits du texte parisien. Les grattages, les chapitres nouveaux marqués en marge par une seconde main, les préfaces nouvelles ajoutées à la fin du volume en font foi. La réforme du xiiie siècle fut définitivement et universellement acceptée au moins dans les accessoires de la Bible. S. Berger, Les préfaces jointes aux livres de la Bible dans les manuscrits de la Vulgate (mémoire posthume), Paris, 1902, p. 27-31. D’après les notes manuscrites de l’abbé Paulin Martin, conservées à la bibliothèque de l’Institut catholique de Paris, nous pouvons signaler quelques Bibles, reproduisant les notes critiques des Correctoria, à savoir, les mss. latins 20, 22, 28, 31, 10420 de la Bibliothèque nationale de Paris et les Bibles latines, 13 de la bibliothèque Mazarine et A.L.3, de la bibliothèque Sainte-Geneviève de la même ville.

Du XIVe au XVIe siècle. — Cette période de l’histoire de la Vulgate a peu d’importance. Elle se divise en deux époques distinctes, séparées par l’invention de l’imprimerie.

1. Avant l’invention de l’imprimerie. — a) On continua à transcrire le texte latin de la Vulgate, et les manuscrits de cette époque contiennent un texte mêlé de leçons anciennes. On ne connaît qu’un seul essai de correction, qui fut entrepris, dans la première moitié du XVe siècle, au couvent de Windesem (Hollande) de la congrégation de Windesheim, de l’ordre des augustins. Le Chronicon Windeshemense, de l’augustin J. Busch, c. xxvi, édité par Grube, (Geschichtsquellen der Provinz Sachsen, Halle, 1886, p. 3Il sq., nous apprend que les Pères de ce couvent corrigèrent l’Ancien et le Nouveau Testament d’après les anciens manuscrits réunis de diverses bibliothèques, de façon à ramener la traduction de saint Jérôme à sa pureté première. Ils mirent plusieurs années à faire un correctoire, qui indiquait tous les passages à corriger, et le chapitre général de la congrégation ordonna que tous les exemplaires des couvents seraient corrigés d’après le correctoire de Windesem, ainsi que tous les livres qui servaient pour la récitation de l’office ecclésiastique. Grube ne connaissait aucun exemplaire de la Bible, corrigé d’après ce correctoire. Die literarische Tätigkeit der Windesheimer Congregation, dans Der Katholik, 1881, t. i, p. 48-59. La bibliothèque ducale de Darmstadt possède un manuscrit en cinq volumes in-folio, transcrit de 1428 à 1439 par le célèbre Thomas a Kempis et qu’on suppose conforme au correctoire de Windesem. A. Schmidt, dans Zentralblatt für Bibliothekswesen, 1896, t. xiii, p. 379. Cet exemplaire a servi à la lecture publique de la Bible. Cf. F. Falk, Die Bibel am Ausgange des Mittelalters, ihre Kenntnis und ihre Verbreitung, Cologne, 1905, p. 7-10.

b) Si on ne multipliait pas alors les correctoires, on savait, du moins, que la Vulgate n’était pas parfaite, et ceux qui connaissaient l’hébreu recouraient au texte original pour corriger les fautes du texte latin. Tel, le franciscain Nicolas de Lyre. Voir le second prologue de sa Postilla. Il publia, du reste, un Tractatus de differentia nostræ translationis ab hebraica littera in Vetere Testamento. Voir t. iv, col. 455. Pierre d’Ailly, étant encore simple bachelier en théologie du collège de Navarre, mais déjà professeur, écrivit, probablement en 1378, une Epistola ad novos Hebræos, adressée à Philippe de Maizières. Il y attaquait les vues de Roger Bacon et il y soutenait que la version de saint Jérôme était absolument parfaite, en s’appuyant sur l’autorité de l’Église, qui l’a approuvée. Devenu docteur, il composa une nouvelle apologie de la Vulgate, Apologeticus Hieronymianæ versionis, contre le docteur anglais, mais il reconnut avec Roger Bacon la nécessité d’en corriger les exemplaires et il exprima le désir que l’université de Paris entreprît cette correction. Ces deux traités ont été publiés pour la première fois par M. L. Salembier, Une page inédite de l’histoire de la Vulgate (extrait de la Revue des sciences ecclésiastiques, 1887, 1889, 1890), Amiens, 1890. Plus tard, l’humaniste Laurent Valla († 1457) rédigea, en 1440, une série de notes sur le Nouveau Testament dans lesquelles il proposait des corrections à faire à la Vulgate surtout au point de vue de la latinité. Annotationes in latinam N. T.interpretationem ex collatione græcorum exemplarium. Érasme les édita, Paris, 1505. Elles se retrouvent dans ses Opera, Bâle, 1540, p. 803 b -895 b. Jacques Revius réédita ce traité : De collatione Novi Testamenti libri duo, Amsterdam, 1638.

La Vulgate perdait ainsi peu à peu de la grande autorité dont elle avait joui durant plusieurs siècles. Les théologiens et les commentateurs recouraient de plus en plus aux textes originaux, hébraïque ou grec. On lui préférait des versions nouvelles, faites directement sur les originaux. Le cardinal anglais Adam Easton († 1397) traduisit l’Ancien Testament, sauf les Psaumes, sur l’hébreu ; sa version, qui eut une grande diffusion, est perdue. Par ordre du pape Nicolas V, l’Italien Manetti († 1459) commença une version latine de toute la Bible ; il ne traduisit que le Nouveau Testament et une partie des Psaumes. Son œuvre est inconnue. Le Psautier seul fut traduit par le carme Jean Creston de Pavie, en 1480, et par l’humaniste Rodolphe Agricola de Groningue (1485).

2. Après l’invention de l’imprimerie. — a) Les Bibles imprimées. — On sait que l’art de l’imprimerie fut