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URIM ET THUMMIM


dans l’Arche les labiés de la loi : ndtatld’él hd’ârôn, è|/.6aXetç et ; tt, v xiëtoTov, portes in arca. Exod., xxv, 16. On peut déjà conclure de là que l’objet en question est distinct du pectoral et qu’il est réel et visible. Sa destination fait donner au pectoral le nom de « pectoral du jugement », c’est-à-dire au moyen duquel Dieu fait connaître ses jugements, ses décisions. Il est nécessaire qu’il soit sur le cœur d’Aaron. Dans le poème chaldéen de la création, i, 137, on voit Tiamat donner à son lieutenant, Qingou, « les tablettes du destin » et les accrocher à sa poitrine. Cf. Dhorme, Textes religieux assyro-babyloniens, Paris, 1907, p. 19. De même, l’Urim et Thummim sont fixés sur la poitrine du grandprêtre. Après Aaron, Eléazar se servira de l’objet pour faire connaître à Josué les volontés de Jéhovah : c< Il se présentera devant le prêtre Éléazar, qui consultera pour lui le jugement de l’Urim devant Jéhovah ; c’est sur son ordre que Josué sortira, sur son ordre qu’il entrera, lui, tous les enfants d’Israël et toute l’assemblée. » Num., xxvii, 21. Il suit de là que l’Urim et le Thummim est comme l’oracle de Jéhovah, l’organe de son pouvoir théocratique. Il est aux mains du grandprêtre, qui seul peut le consulter devant Jéhovah, c’est-à-dire avec l’intention d’obtenir de Jéhovah une réponse. Cependant l’oracle ne s’occupe pas des intérêts particuliers ; il est seulement à l’usage du peuple tout entier et de son chef. Le texte sacré ne fournit pas d’autres détails précis sur la nature et le fonctionnement de l’oracle.

3° Consultations. — Les livres historiques enregistrent un certain nombre de consultations adressées à Jéhovah par l’Urim et le Thummim, sans qu’on puisse assurer qu’elles aient été les seules. Ces consultations fournissent certains renseignements sur la manière dont l’oracle répondait. Il est probable d’ailleurs qu’on ne recourait à l’oracle que quand on ne pouvait être éclairé par les moyens ordinaires. Quand Josué et les Israélites se laissèrent tromper par la feinte des Gabaonites, ce fut « sans consulter la bouche de Jéhovah. » Jos., ix, 14. Ils auraient dû, en cette occasion, en appeler à Jéhovah. Il est à croire que, conformément à l’ordre reçu, Num., xxvii, 21, Josué ne manqua pas de le faire en plusieurs autres circonstances importantes. Il est possible que les communications faites à Josué par Jéhovah aient eu l’Urim et le Thummim pour intermédiaire. Jos., i, 1 ; iii, 7 ; iv, 1 ; etc. — Après la mort de Josué, les Israélites demandent à Jéhovah qui doit prendre la tête de l’invasion contre les Chananéens, et l’oracle répond : « Juda montera ; voici que j’ai livré le pays entre ses mains. » Jud., 1, 2. — Pendant la guerre contre les Benjamites, l’oracle est consulté par trois fois, et il commande à Juda de marcher en avant, et à tout Israël de marcher contre Benjamin. Jud., xx, 18, 23, 28. — Après l’élection de Saùl, l’oracle révèle la cachette où se tient le nouveau roi. I Reg., x, 22. — Deux fois Saûl, devenu infidèle, consulte Jéhovah, pour savoir s’il doit poursuivre les Philistins, I Reg., xiv, 36, 37, et ce qu’il doit faire à Gelboé. I Reg., xxviii, 6. En ces deux circonstances, l’oracle ne répond pas ; les songes et les prophètes n’en disent pas davantage. Jéhovah se refuse donc formellement à diriger le roi réprouvé. — David, déjà oint par Samuel, se réfugie à Nobé, près du grand-prêtre Achimélech. Le traître Doëg rapporte ensuite à Saül qu’Achimélech a consulté Jéhovah pour David. Pour se défendre, Achimélech dit à Saùl : « Est-ce anjourd’hui que j’aurais commencé à consulter Dieu pour lui ? » faisant entendre, sans doute, qu’il avait déjà interrogé l’oracle à l’occasion des missions confiées par le roi à son gendre, mais qu’il n’aurait pas commencé à le faire le jour où Saül accusait David de rébellion. I Reg., xxii, 10-15. — À Ceïla, David dit à Abiathar, successeur d’Achimélech : « Apporte

l’éphod, » et il demande si Saül viendra et si les habitants de Céïla le livreront. L’oracle répond : « Il descendra » et « Ils te livreront. » I Reg., xxiii, 9-12. On voit ici que l’Urim et Thummim est inséparable du pectoral et de l’éphod. — Une autre fois, David demande de la même manière s’il doit poursuivre une bande d’Amalécites, qui avaient fait captives deux de ses femmes et celles de ses gens. Il lui est répondu de poursuivre et qu’il recouvrera ce qu’on lui a pris.

I Reg., xxx, 7-8. — Après la mort de Saùl, il consulte pour savoir s’il doit monter dans une ville de Juda et dans laquelle. L’oracle répond : « À Hébron. » II Reg., h, 1. — Plus tard, il demande s’il faut marcher contre les Philistins, et l’assurance lui est donnée qu’il legbattra. II Reg., v, 19. — Comme les ennemis reviennent à la charge, l’oracle lui dit de les tourner par derrière et que Jéhovah marchera avec lui pour lui assurer la victoire. II Reg., v, 23, 24. — Il est à remarquer que ces réponses ne sont pas faites seulement par « oui » et. « non », mais que plusieurs d’entre elles fournissent des indications circonstanciées qui dépassent les termes de l’interrogation. Ces réponses sont positives et claires ; elles n’ont rien du vague et de l’ambiguïté des oracles païens. Ce qu’elles indiquent s’accomplit toujours à la lettre. On ne les obtient que par l’intermédiaire du grand-prêtre, sans qu’un autre, pas même le roi, puisse les provoquer directement. Malgré le caractère officiel de la consultation et la promesse de Jéhovah, Dieu se réserve de refuser une réponse quand il le juge à propos, comme il le fait deux fois pour Saùl. L’exemple de Josué, dans l’affaire des Gabaonites, montre d’ailleurs que l’on n’était pas toujours fidèle à consulter l’oracle quand il l’aurait fallu. Enfin, il faut encore observer que Jéhovah ne prend jamais l’initiative de faire savoir sa volonté par l’Urim et le Thummim. Il ne parle que quand il est interrogé. Jéhovah parlait aussi dans le deblr ou sanctuaire proprement dit. Il s’y adressait à Moïse ou au grand-prêtre pour donner ses ordres, mais sans avoir besoin d’être consulté, ce qui distinguait le debîr de l’Urim et Thummim. Voir Oracle, t. iv, col. 1846. — Après David, l’histoire n’enregistre plus de consultations de Jéhovah par l’Urim et le Thummim, d’où il faut conclure probablement qu’elles cessèrent à partir de la construction du Temple. On voit dès lors les prophètes intervenir directement, et même dès les derniers temps de David, pour faire connaître les volontés de Dieu sur ce qui était à faire ou à éviter. Le prophétisme remplaça donc l’Urim et le Thummim. Après la captivité, on exclut du sacerdoce les prêtres qui ne pouvaient justifier de leur généalogie, « jusqu’à ce qu’il s’élevât un prêtre pour consulter l^Urim et le-Thummim, » c’est-à-dire pour consulter Dieu efficacement par l’ancien oracle sur la réalité de leur origine sacerdotale. I Esd., ii, 63 ; II Esd., vii, 65. Les versionstraduisent kohên le’ûrîm ûletàmmim par iepeùç toîç 9(ou’t ; ou<71 xat totc TSAst’ocç, « prêtre pour les choseslumineuses et parfaites », sacerdos dodus atque perfectus, « prêtre instruit et parfait ». Josèphe, Ant.jud., III, viii, 9, dit que l’Urim et Thummim n’était disparu, à son époque, que depuis deux cents ans. Mais son. renseignement est suspect. Les rabbins affirmaient que cinq choses manquaient dans le second Temple : l’Arche d’alliance, le feu céleste, l’Urim et Thummim, la Sekîndh (voir Gloire, t. iii, col. 252) et l’huile sacrée. Cf. Gem. Yoma, 21, 2. La disparition de l’oracle remontait donc très haut, peut-être même à la fondation du premier Temple. Dans son éloge d’Aaron, l’Ecclésiastique, xlv, 12, dit qu’il était vêtu, entre autres choses, Xoyeîcii xpioeut ; SVjXotç Hrfielcn ; , « t du pectoral du jugement, des manifestations de la vérité », judicio et veritate prsediti, <t doué de jugement et de vérité ».

II y a dans le texte hébreu : « du pectoral du jugement, .