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ULFILAS


la bibliothèque de l’université de Giessen, n. 651/20. Deux pages de parchemin reproduisent incomplètement le texte latin de Luc, xxiii, 2-6 ; xxiv, 5-9, et le teste gothique de Luc, xxiii, 11-14 ; xxiv, 13-17. Le fragment latin a été étudié par P. Glaue et le fragment goth par K. Helm, Das gotisch-lateinische Bibelfragment der Universitâls-bibliothek zu Giessen, Giessen, 1910. M. Glaue a montré que le texte latin se rapprochait de très près de celui du Codex Brixianus de l’ancienne Italique et il pense que le fragment bilingue a été apporté en Egypte par un soldat, un clerc ou un moine goth. Des indices paléographiques permettent de le dater du commencement du v B siècle, et le texte est écrit per cola et commata. La reconstitution du texte gothique a été d’autant plus difficile à M. Helm que le texte est incomplet et qu’il n’a pas son pendant dans les fragments connus jusqu’à présent. F. Ruhl a étudié l’origine de ce fragment bilingue, et il conclut que vraisemblablement il a été rédigé en pays vandale et apporté en Egypte par les soldats. Zur Herkunft der iateinisch-gotischen Bibelfragmente, dans Zeilschrift fàr neutestamentliche Wissenschaft, 1911, t. xir, p. 8586. Cf. Journal of theological Sludies, 1910, t. xi, p. 711-613. W. Streiberg s’en est occupé dans l’introduction de la seconde partie de Die gotische Bibel, Heidelberg, 1910. Cette découverte récente est venue confirmer les conclusions qu’on avait précédemment tirées sur les caractères de la version gothique du Nouveau Testament.

2. Caractères de cette version. — Ils se rapportent à deux points : a) dépendance directe du texte grec antiochien ou syrien ; b) ressemblances avec la version latine dite l’Itala. — a) Dépendance directe du texte grec d’Anlioche. — E. Bernhardt avait cru que la version gothique du Nouveau Testament se rapprochait de très près du Codex Alexandrinus B et il en avait conclu qu’Ulfilas avait traduit le texte grec sur un manuscrit parent de B. La comparaison exacte de la traduction gothique avec ce manuscrit n’autorise pas cette conclusion. En réalité, cette version a été faite sur un texte grec semblable à celui que présentent les manuscrits antiochiens du texte dit syrien, spécialement à celui que cite et commente saint Jean Chryspstome dans ses Homélies sur saint Matthieu et saint Jean, avec quelques divergences toutefois. Sur les rapports de saint Jean Chrysostome avec les Goths, voir Batiflol, dans la Revue biblique, 1899, p. 568-569. Tous les critiques antérieurs, depuis Fell, avaient reconnu cette parenté. F. Kauffmann, dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1897, t. xxix, p. 306-315. Les manuscrits onciaux, auxquels ressemble la version gothique, sont EFGHSUVAIT. F. Kauflmann, ibid., 1898, t. xxx, p. 143-183 ; 1899, t. xxxi, p. 181-190 ; 1903, t. xxxv, p. 433-453, 458-463 ; E. Dietrich, Die Bruchstucke des Skeireins, Strasbourg, 1903. H. von Soden a reconnu aussi à la base de la versiota gothique un texte grec tout à fait analogue à celui des Pères cappadociens et de saint Chrysostomei un texte de la KolvVJ, dans lequel des leçons de /avaient pénétré ça et là. Aussi comme cette traduction a peu de leçons particulières au sens propre du mot, elle peut servir à la reconstitution du texte de la Koivt|. Die Schriften des N. T., Berlin, 1907, 333, p. 1469-1470. Le traducteur, en effet, a suivi de très près le texte grec, sur lequel il travaillait, et dans la plupart des cas, il le traduit mot à mot ; le plus grand nombre des différences provient du génie propre de la langue gothique, desrègleB de sa syntaxe ; elles sont purement grammaticales. H. Stolzenberg, Die Uebersetzungstechnik des Wulfila unlersucht auf Grund der Bibelfragmente des C. A., dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1905, t. xxxvii, p. 145-193, 352-388. Le traducteur insère dans son œuvre des mots grecs et latins. C. Elis, Ueber die Fremdworte und fremden

Eigennamen in der gotischen Bibelùbersetzung in grammatischer und archâologischer Hinsichl (dissert.), Gœttingue, 1903 ; K. Gæbeler, Die griechischen Beslandteile in der gotischen Bibel, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1911, t. xliii, p. 1-118.

6) Ressemblances avec l’Itala. — Cependant la version gothique contient quelques leçons dites occidentales, qui se rencontrent notamment dans la version latine nommée l’Itala. Bangert, Der Einfluss lateinischer Quellen auf die gothische Bibelùbersetzung des TJlfila, Rudolstadt, 1880 (progr.), et Marold, Kritische Untersuchungen ùber den Einfluss der lateinischen auf die gotische Bibelùbersetzung (dissert.), Kœnigsberg, 1881, en avaient conclu qu’elle avait été revue au VIe siècle, à l’époque où les Goths occupaient l’Italie, sur la’ulgate latine, qui n’est qu’une revision de Yltala. Mais un examen plus attentif du sujet a montré que la version gothique ressemblait étonnamment au Brixianus et au Monacensis, deux manuscrits de Yltald non revisée. Cf. F. Kauffmann, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1899, t. xxxi, p. 177-180, 190194 ; F. Conybeare, dans The Journal of theological sludies, 1899-1900, t. i, p. 129-134 ; H. C. Hoskier et F. Conybeare, ibid., 1911, t. xii, p. 456-459 ; H. Stolzenberg, dans Zeitschrift fur deutsche Philologie, t. xxxvii, p. 388-392. Bien plus, le Brixianus a les mêmes lettres d’argent et la même écriture violette que le Codex Argenteus d’Upsal ; ils sont tous deux de la même école calligraphique italienne. Or, le Brixianus contient deux feuillets étrangers, que Bianchini avait édités, Evangeliarium quadruplex, et qui sont reproduits par Migne, Pair, lat., t. xii, col. 18-19, et par Bernhardt avec une traduction allemande, Zeitschrift fur deutsche Philologie, 1870, t. ii, p. 295 sq. Voir aussi J. Drâseke, Der Gothen Sunja und Frithila Prœfalio zum Codex Brixianus, dans Zeitschrift fur wisscnschaftliche Théologie, 1907, t. L, p. 107-117. Ils contiennent un fragment d’une polémique contre saint Jérôme et le mode de traduction, qui tient compte du sens plutôt que des mots, qu’il a suivi dans sa revision de l’Itala. Or, le saint docteur répond aux mêmes reproches que lui avaient faits deux prêtres goths, Sunnia et Fretella, au sujet de sa traduction des Psaumes. Epist. cvi, ad Sunniam et Fretellam, t. xxii, col. 857. Cf. J. Mûhlau, Zur Frage nach der gotischen Psalmenùbersetzung, Kiel, 1904, p. 19-26. Enfin, on remarque dans la version gothique des notes marginales sur les étymologies des mots grecs et latins. Toutes ces considérations ont amené F. Kauffmann, dans Zeilschrift fur deutsche Philologie, 1900, t. xxxii, p. 305-335, à conclure que Sunnia et Fretella sont les auteurs de la préface, intercalée dans le Brixianus, et qu’ils l’ont placée en tête d’une édition critique de la version gothique, faite, vers 410, par eux en vue de la rendre plus littérale. Au vie siècle, cette édition fut mise en rapport étroit avec le Bi-ixianus et la Vulgale de saint Jérôme, en un manuscrit bilingue ou peut-être même trilingue, dont nous avons un reste dans le Carolinus de Wollfenbûttel. Le Brixianus aurait été copié sur un manuscrit goticolatinus, dont le texte gothique est reproduit dans le Codex Argenteus, écrit, comme le Brixianus, dans le nord de l’Italie. La découverte du fragment goticolalinus d’Antinoé vient confirmer ces conclusions, et M. Glaue pense même que ce fragment, antérieur au VIe siècle, est un reste du travail de Sunnia et Fretella. Das gotisch-lateinische Bibelfragment der Universitâtsbibliothek zu Giessen, p. 9-14.

Toutefois, M. von Soden, loc. cit., n’admet pas cette revision de la version gothique et il croit que les manuscrits nous donnant le texte pur d’Ulfilas. Il explique autrement les ressemblances de cette version avec les manuscrits de l’Itala. Selon lui, elles proviennent de ce que l’Itala a subi l’influence de la recension I, dont