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LECTIONNAIRES

la transcription des manuscrits privés, on continuait encore à se servir de l’onciale pour les manuscrits liturgiques. Cette tendance conservatrice des lectionnaires permet de conclure qu’ils ont retenu et transmis une ancienne forme du texte, alors que les manuscrits à L’usage des particuliers avaient adopté des textes divergents, retouchés ou corrigés. En fait, il est donc nécessaire d’examiner le texte transmis par les lectionnaires, et il ne faut pas les mettre absolument sur le même rang que les cursifs. D’autre part, les évangéliaires et les épistoliers sont des livres publics, des documents ecclésiastiques, transcrits pour l’usage d’une église, d’un couvent, pour le service liturgique. Leur transcription était par là même éloignée de toute nouveauté et elle était soignée et surveillée dans le dessein d’écarter des modifications, des usages nouveaux. Elle a donc de ce chef encore plus de chance de reproduire un texte ancien. Les savants qui font de la critique textuelle du Nouveau Testament l’objet de leurs travaux, si patients et si méritoires, ne doivent pas dédaigner les lectionnaires grecs, dont l’examen fera progresser leur art et leur fournira peut-être des éléments de solution de certains problèmes critiques.

Cf. F. H. Rheinwald, Kirchliche Archeologie, Berlin, 1830, p. 273-278 ; E. Reuss, Die Geschichte der heil. Schriften N. T., 6e édit., Brunswick, 1887, n. 384, p. 430431 ; Caspari, Dissertation sur les péricopes, Strasbourg, 1835 ; Scrivener, A plain introduction, 4e édit., t. i, p. 74-89 ; Smith et Gheetham, Dictionary of Christian antiquities, t. i, p. 740-745 ; 'Kirchenlexikon, 2e édit., Fribourg-en-Brisgau, 1891, t. vii, col. 1593-1602 ; P. Martin, Introduction à la critique textuelle du N. T., Partie théorique (lithog.), Paris, 1882-1883, t. i, p. 417-480 ; R. Gregory, Prolegomena, Leipzig, 1890, fasc. 2, p. 687791 ; Id., Textkritik des N. T., Leipzig, 1900, t. i, p. 327-478.

VII. Lectionnaires latins. — Sur les lectionnaires des diverses Églises arménienne, syriaque, copte, etc., il y aurait à dire à peu près les mêmes choses, sauf de nombreuses diversités de détails, que sur les lectionnaires grecs. Ajoutons seulement quelques mots sur les lectionnaires latins, qui nous intéressent : de plus près.

1° À la messe, on lisait trois leçons : la leçon prophétique, tirée de l’Ancien Testament, la leçon apostolique, extraite des Épîtres des Apôtres, et l’Évangile. Saint Ambroise, Epist., xx, 13-15, t. xvi, col. 997-998, parle des leçons lues à l’église à l’occasion d’un passage de Job. C’était un enfant qui lisait le Ps. xxiii, 4, 6. De excessu fratris Satyri, i, 61, t. xvi, col. 1309. Au rapport de Grégoire de Tours, De miraculis S. Martini, i, 5, t. lxxi, col. 918-919, le lecteur avait coutume, à Milan, de venir, le livre en mains, demander à l’évêque l’autorisation de lire. Un dimanche, la leçon prophétique récitée, le lecteur étant déjà debout devant l’autel pour lire la leçon de saint Paul, saint Ambroise s’endormit sur l’autel. Au bout de deux heures, on l’éveilla pour qu’il permît au lecteur de lire l’Épître. Parmi les sermons attribués à saint Ambroise, le IIe, t. xvii, col. 608, indique que l’Évangile de la fête de Noël était le récit de la naissance de Jésus dans saint Luc, ii, 1 sq. Cf. Mabillon, Museum Italic., Paris, 1687, t. 1er, p. 101-104 ; Magistretti, La liturgia della Chiesa Milanese nel secolo IV, Milan, 1899, t. r. À Rome, la messe comprenait ces trois leçons. La suppression de la leçon prophétique eut lieu au cours du Ve siècle. Le Liber pontificalis, édit. Duchesne, Paris, 1886, t. i, p. 230, constate que sous le pontificat de Célestin I er (422-432), auquel il attribue l’institution de la psalmodie, on ne lisait à la messe que les Épîtres de saint Paul et le saint Évangile. La leçon prophétique a cependant persévéré jusqu’aujourd’hui à certains jours de Quatre-Temps et de Carême. Le graduel est placé entre cette leçon et Pépltre. On en conclut que ce Psaume était primitivement intercalé entre la leçon prophétique et la leçon apostolique, et que, la première ayant été supprimée, le graduel a été transporté après Pépître. Duchesne, Origines du culte chrétien, Paris, 1889, p. 159-160. — Saint Augustin parle plusieurs fois de trois leçons, mais il entend expressément par l’épître, le psaume intercalé et l’évangile. Serm., CLXV, 1, t. xxxviii, col. 902 ; Serm., clxxvi, 1, ïbid., col. 950. L’évêque commentait l’une ou l’autre et beaucoup d’Enarrationes in Psalmos sont de véritables sermons. Comme il explique l’Évangile selon saint Jean ex ordine lectionum, In Epist. Joa. ad Parthos, prol., t. xxxv, col. 1977, nous en pouvons conclure qu’on lisait encore un livre tout entier, d’autant que si Augustin interrompt son commentaire, il se propose de reprendre l’ordre momentanément interrompu. D’ailleurs, cette interruption s’est produite aux fêtes pascales, quibus certas ex Evangelio lectiones oportet in Ecclesia recitari, quæ ita sunt annuæ, ut aliæ esse non possint. Ïbid., prol., et tr. IX, col. 1977, 2045. En effet, on avait coutume de lire, ces jours-là, les récits de la résurrection de Jésus-Christ ex omnibus libris sancti Evangelii. Serm., ccxxxi, 1, t. xxxviii, col. 1104. On lisait d’abord le récit de saint Matthieu, puis celui de saint Marc, ensuite celui de saint Luc. Serm., ccxxxii, 1, ibid., col. 1107-1103. On n’omettait pas celui de saint Jean, Serm., ccxxxiv, 1, col. 1115. Cf. Serm., ccxxxv, CCXXXIX, CCXL, CCXLIII, CCXLIV, CCXLV, CCXLVII, col. 1115, 1117, 1118, 1127, 1130, 1143, 1147, 1151, 1156, 1157. On lisait en même temps les Actes des Apôtres. In Epist. S. Joa. ad Parthos, tr. II, t. xxxv, col. 1989. La passion n’était lue qu’une fois, le vendredi saint, et toujours selon saint Matthieu. Une année, saint Augustin, ayant voulu varier le récit évangélique, fit lire un autre évangéliste ; mais les fidèles, n’entendant pas la leçon accoutumée, en furent troublés. Serm., ccxxxii. 1, t. xxxviii, col. 1108. Cf. Enar. in Ps. xxi, en. ii, 2, t. xxxvi, col. 171. Le samedi-saint l’office comprenait beaucoup de leçons. Serm., ii, t, xlvi, col. 821. À Noël, on lisait le récit de la naissance de Jésus selon saint Luc. Serm., exem, t. xxxviii, col. 1013. À l’aide des Sermons, t. xxxviii, il serait facile de déterminer nombre de sections évangéliques, lues à Hippone, et de fixer parfois l’épître lue aux jours correspondants. — Les Sermons de saint Léon le Grand contiennent sur les leçons ecclésiastiques des renseignements, dont quelques-uns concordent avec le sectionnement qui a prévalu dans l’Église romaine. Ainsi, le 1er dimanche de Carême, l’épître était la même qu’aujourd’hui. II Cor., vi, 2. Serm., XL, c. ii, t. lix, col. 268. Le samedi qui précède le second dimanche de Carême, l’évangile était celui d’aujourd’hui. Serm., Li, col. 308. Toute une série de sermons sur la passion ont été prononcés sur les leçons faites les jours de dimanche et de mercredi et s’étendent jusqu’au samedi-saint. Serm., lii-lxx, col. 314-380, Le jour de Pâques, le récit de la résurrection servait d’évangile. Serm., lxxii, col. 390. — La liturgie gallicane comprenait deux leçons à la messe, l’Évangile compris : la leçon prophétique était tirée de l’Ancien Testament, l’épître de l’apôtre saint Paul. En carême, on lisait les livres historiques de l’Ancien Testament, et au temps pascal, les Actes des Apôtres et l’Apocalypse. S. Germain de Paris, Epist., i, t. lxxii, col. 90. Cf. Duchesne, Origines du culte, p. 185-186.

2° Peu à peu, il y eut un système déterminé de leçons ; mais les diverses Églises avaient leurs particularités. Les documents qui les reproduisent sont ou bien des lectionnaires séparés, qui portent différents noms, par exemple Comes, Liber comicus, Lectionnarium, ou bien des manuscrits à texte suivi et continu, surtout les quatre Évangiles, mais adaptés à l’usage liturgique au moyen d’une table des Évangiles, nommée Capitulare. Bornons-nous à quelques indications. — Le lectionnaire romain se retrouve dans le Comnes, précédé d’une préface