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NOMBRE


des journées d’ouvriers à payer le soir, et, au moins à partir des Machabées, le change de l’argent à Jérusalem même, la pratique de la banque, le fermage et la perception des impôts, etc., opérations qui nécessitaient une certaine habitude du calcul. D est vrai qu’avec les Séleucides, les méthodes grecques commencèrent à s’introduire en Palestine ; mais elles ne furent jamais à l’usage du commun des Israélites, qui ne poussèrent pas leurs connaissances arithmétiques au delà de ce qu’exigeait la routine des transactions locales.

3° De deux passages bibliques, III Reg., vii, 23 ; II Par., iv, 2, on a conclu que les Hébreux ne possédaient qu’une notion sommaire du rapport qui existe entre le diamètre et la circonférence. Si la mer d’airain avait 10 coudées de diamètre et 30 coudées de circonférence, c’est que les Hébreux identifiaient ce rapport à celui de 1 à 3. Archimède l’estimait par la fraction 22/7, qui est trop forte à partir de la troisième décimale. Ce rapport est exprimé par la fraction continue 3, 14159…

II suit de là que, dans le cas de la mer d’airain, un diamètre de 10 coudées ou 5 m 25 supposait une circonférence, non de 30 coudées ou 15 m 75, mais en réalité de 16 m 48, c’est-à-dire de m 73, soit d’une coudée et demie de plus. Si la circonférence était réellement de 30 coudées ou 15 m 75, elle supposait un diamètre de 5 iii, soit seulement de 9 coudées et demie. Il est évident que dans la pratique on ne descendait pas à ces précisions, et que, spécialement dans une description, on se contentait d’une simple approximation.

4° Certains calculs plus importants s’imposaient aux autorités religieuses d’Israël. Il leur fallait d’abord déterminer l’époque de la Pâque, qui se célébrait normalement le 15 du mois de nisan, mais qu’il y avait lieu parfois de retarder par suite de l’état des récoltes et de î’intercalation d’un second mois de adar avant celui de nisan. Voir Année, t. i, col. 642. D’après la date de la Pâque, on fixait aisément celle de la Pentecôte. Il y avait aussi à déterminer le commencement officiel de chaque mois. Voir Néoménie, col. 1588. Mais le calcul qui préoccupa le plus les Juifs, fut celui de la venue du Messie, d’après la prophétie de Daniel. Voir Daniel, t. ii, col. 1277-1282. Ils supputèrent longtemps l’époque à laquelle devait apparaître le Messie, tel qu’ils l’imaginaient. Toujours déçus dans leur espérance, ils finirent par constater officiellement leur déception et la fin de leur inutile attente. « Tous les termes marqués pour la venue du Messie sont passés… Combien d’années sabbatiques écoulées où sont apparus les signes nécessaires du Messie, et cependant il n’est pas venu ! … Puisque la fin est arrivée et que le Messie n’est pas venu, il ne viendra plus ! » Sanhédrin, 97 a, b. Quelques-uns pensaient que les péchés des hommes arrêtaient seuls cette venue et que la pénitence attirerait le Messie. D’autres disaient : « Maudits soient ceux qui supputent le temps du Messie ! » Gem. Babyl. Sanhédrin, ꝟ. 97. « Que leur cœur éclate et que leurs calculs, s’évanouissent ! » Maimonide, Iggereth Hatteman, ꝟ. 125, 4. Les Juifs ne s’étaient pas trompés dans leurs calculs, mais dans l’idée qu’ils se faisaient du Messie.

II. La. représentation des nombres. — 1° Les anciens peuples éprouvèrent vite le besoin d’exprimer les nomhres par des signes spéciaux, permettant d’indiquer des sommes considérables sous une forme beaucoup plus abrégée que par le détail en toutes lettres. Bien avant qu’Abraham quittât la Chaldée, il existait en ce pays tout un système de signes conventionnels destinés à exprimer les nombres. On employait dans ce but les coins qui servaient déjà pour l’écriture. Des clous verticaux, juxtaposés ou superposés, indiquaient les

unités : | = 1 ; || = 3 ; ||| = 3 ; TjT= 4 ; |T{_= 5 ;

III = 6, etc. Les dizaines étaient représentées par des

crochets : ^ = 10 ; ^ = 20 ; /^ =30, etc. À partir

de 60, on pouvait continuer à se servir des crochets : JJ5 ou remplacer 50 par un clou vertical, avec des crochets pour les dizaines suivantes : | / = 60 ; | // = 70, etc. La centaine était indiquée par un clou vertical barré d’un trait horizontal et précédé d’un clou simple pour chaque centaine : 1 |— = 100 ; || J— = 200 ; ||| |— =

300, etc. On exprimait 1000 par 10 fois 100 : (|>~, et

ainsi de suite en combinant les signes précédents. Cf. Fr. Lenormant, Études accadiennes, Paris, 1873, t. iii, p. 225, 226 ; Pinches, The Akkadian Numerals, dans les Proceedings of the Society of fiibl. ArchmoL, t. iv, 1881-1882, p. 111-117 ; Maspero, Histoire ancienne, t. i, p. 772. Ces notations numériques se retrouvent dans le code d’Hammurabi. Cf. Scheil, Textes élamites-sémitiques, 2e série, Paris, 1902, col. vi, 63 ; viii, 17, 19, 56 ; x, 62, etc.

2° Les Hébreux eux aussi ont dû chercher de bonne heure le moyen d’écrire les nombres sous une forme abrégée. On ne voit pas trace chez eux de signes particuliers inventés dans ce but. Mais, à l’époque des Machabées, on trouve quelquefois, sur les monnaies juives, les chiffres des années exprimés par des lettres. Cf. Eckhel, De doctrin. num. veter., t. iii, p. 468 ; Cavedoni, Numismatica biblic., Modène, 1850, p. 19. On en conclut avec assez de vraisemblance que cette manière d’écrire les nombres était usitée antérieurement. Un bon nombre de variantes qu’on signale dans les textes primitifs ou dans les versions des Livres saints ne s’expliquent même, que si on suppose les nombres exprimés par des lettres qui, à raison de leur similitude de forme, se changeaient" aisément l’une pour l’autre. Cf. Reinke, Beiiràge zur Erklârung des A. T., Munster, 1851, t. i, p. 10 ; Corluy, Nombres (Expression des) chez les Hébreux, dans le Dict. apologét. de Jaugey, Paris, 1889, col. 2222-2225. Voici la valeur numérique qui était assignée à chaque lettre de l’alphabet :

N = 1 > = 10

3 = 2, 3 = 20

1 = 3 b = 30

1 = 4 D = 40

n = 5 3 = 50

1 = 6 D = 60

1 = 7 y = 70

n = 8 3 = 80

18 = 9 S = 90

p = 100

1 = 200

W = 300

n = 400

pn = 400 + 100 = 500

in =400 + 200 = 600

WI1 = 400 + 300 = 700

nn = 400 + 400 = 800

pnr = 400 + 400 + 100 = 900

Les massorètes exprimaient les dernières centaines au moyen des lettres finales : ") = 500 ; a = 600 ; i = 700 ; i = 800 ; y = 900 ; mais les rabbins préféraient se servir des lettres ordinaires, combinées comme on le voit dans le tableau. Dans les chiffres composés, celui des dizaines précédait celui des unités : v = 14 ; iaa — 29, etc. ; celui des centaines précédait celui des dizaines : nip = 138 ; nwn, =747, et ainsi de suite. Toutefois au lieu d’écrire : n> = 15 et v = 16, les Juifs mettaient tb = 9 + 6 = 15, et td = 9 + 7 = 16, les deux formules ht et }> pouvant être prises pour des abréviations du nom sacré de Jéhovah. Les milliers s’énonçaient au moyen des mêmes lettres de l’alphabet, qu’on reprenait

en les surmontant de deux points : n = 1000 ; a = 2000 ;

p = 100000 ; tin = 800000, etc. Ces deux points pouvaient d’ailleurs être omis dans les nombres composés de plusieurs chiffres. Enfin, pour indiquer qu’une lettre ou un groupe de lettres représentaient une valeur numérale et ne devaient pas recevoir de voyelles, on surmontait la première lettre du groupe de deux traits en

forme d’obèles : pn.-= 500 ; npnns = 1905, etc. Voir Hébraïque (Langue), t. iii, col. 467 ; Preiswerk, Gram-