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NICODEME — NICOLAÏTES


passé aux Juifs par l’intermédiaire de la langue qu’on parlaitdans la plus grande partie des paysde la dispersion. Ct.~Vigouroux, Le Nouveau Testament et les découvertes modernes, Paris, 1896, p. 27. On le trouve dans le Taltnud, Taamith, 20, 1, sous la forme pleine de naqàimôn, et défective de naqdim, dérivée des racines ndqi, « innocent, » et ddm « sang. i> Dans Josèphe, Ant. jud., XIV, iii, 2, Ntx<S871|io ; est le nom d’un des ambassadeurs d’Aristobule à Pompée.

Saint Jean, parmi tous les écrivains sacrés du Nouveau Testament, est le seul qui parle dans son Évangile de cet éminent personnage juif. Joa., iii, 1, 4, 9 ; vii, 50 ; xix, 39. Nicodème appartenait à la secte des Pharisiens. Joa., m, 1. Voir Pharisiens. Il était un des premiers, un chef (apxwv) des Juifs, Joa., iii, 1, en tant que membre du Sanhédrin. Joa., vii, 50. Jésus-Christ, dans son premier entretien avec lui, l’appelle maître en Israël (6 SiSàuxaXo ; toû’laparfi.), Joa., iii, 10, faisant probablement allusion à sa double qualité de pharisien et de sanhédrite, et plus sûrement à sa qualité de scribe ou docteur de la Loi. Nicodème à en juger par Joa., xïx, 39, devait être assez riche, et jouissait d’une certaine influence dans le Sanhédrin. Quelques-uns pensent qu’à l’époque de son premier entretien avec le Sauveur, Joa., iii, 2, Nicodème était d’un âge déjà avancé, Joa., m, 4 : « Comment un homme peut-il naître lorsqu’il est vieux ? » mais on s’appuie sur ce passage trop général sans raison suffisante. Cet entretien eut lieu au moment de la manifestation publique de Jésus-Christ à Jérusalem, lorsque déjà les premiers ferments de la révolte des Juifs contre le Messie se faisaient jour ; il montre combien peu, même les meilleurs d’entre eux, étaient ouverts aux clartés de la foi nouvelle. Nicodème avait reconnu en Jésus l’Envoyé de Dieu, Joa., iii, 2, mais sa connaissance était imparfaite ; il était certain due celui qui accomplissait le miracle dont il était le témoin, disposait d’une puissance surnaturelle, mais là se bornait sa science. Il venait donc à Jésus pour s’instruire. Cf. Th. Calmes, L’Évangile selon S. Jean, Paris, 1904, p. 180. — Suivant le texte sacré, iii, 3, Jésus, répondit à la pensée intime de son interlocuteur, qui associait aux miracles de Notre-Seigneur l’idée de l’avènement très prochain du royaume de Dieu et du Messie. La question posée par Nicodème peut se formuler ainsi : « Que faut-il faire pour avoir la vie éternelle ? » Jésus répond : « Il faut naître de nouveau, il faut naître d’en haut, avwŒv, si on veut voir le royaume de Dieu. » Voilà la condition nécessaire : la régénération ou la transformation radicale de l’êlre intérieur. Nicodème ne comprend pas ce langage, Joa., iii, 4, 9, mais le divin Maître insiste, et dans ces explications, Joa., m, 5, on doit voir le signe sensible de l’initiation, cette régénération intérieure, c’est-à-dire le baptême chrétien.

— Dans cet entretien, dont l’évangéliste ne donne probablement qu’un résumé fort restreint, le caractère intime de Nicodème apparaît : pharisien croyant, qui ne le cédait ni en intelligence, ni en savoir à aucun des sanhédrites, mais en même temps timide et peu susceptible d’être initié aux mystères de la foi nouvelle. — Cependant son àme était droite, car on peut déduire de Joa., vii, 50, que, dès qu’il connut la vérité, il s’y donna.

Dans cette seconde circonstance, l’hostilité systématique du monde officiel des Juifs se montre à découvert. Les gens du peuple se déclarent en grande partie favorables à Jésus, Joa., vii, 40-41 ; mais la haine des sanhédrites éclate ; ils maudissent cette foule ignorante qui se prononce à rencontre des prêtres et des docteurs de là Loi. Joa., vii, 49. Nicodème, dont la foi en Jésus de Nazareth depuis le premier entretien avait grandi, s’élève contre ces dispositions hostiles de se3 collègues : « Notre loi condamne-t-elle un homme sans qu’on l’entende d’abord, et sans qu’on sache ce qu’il a fait ? » Joa., vii, 51. Mais son observation ne change rien aux dispositions

des sanhédrites : « Serais-tu Galiléen, toi aussi ? Scrute les Écritures, et tu verras que de la Galilée il ne sort pas de prophète. » Joa., vii, 52.

Nicodème, le docteur qui, Joa., iii, 1, était venu d’abord auprès de Jésus pendant la nuit, reparaît dans l’histoire évangélique, Joa., xïx, 39, dès que le Christ eut expiré sur la croix ; et on le voit s’occuper activement à l’ensevelissement de Jésus en compagnie de Joseph d’Arimathie. Nicodème avait apporté environ cent livres d’une composition de myrrhe et d’aloès pour l’embaumement : et tous les deux réunis prirent le corps de Jésus, et l’enveloppèrent de linceuls, avec les aromates, comme c’est la coutume d’ensevelir chez les Juifs. Joa., xïx, 40.

Le reste de sa vie est très incertain. Il joue un rôle particulier dans la première partie d’un ancien écrit apocryphe, les Acta Pilali. Cf. Tischendorf, Evangelia apocrypha, p. 210-332 ; Conybeare, Studia biblica, t. IV, Oxford, 1896, p. 59-132. La deuxième partie de cet écrit apocryphe contient le récit grec de la descente du Christ aux enfers. Ces deux récits, en réalité indépendants, depuis le XVIe siècle ont été publiés sous le titre d’Evangelium Nicodemi. Voir Évangiles ai>ocryphes, I ro classe, t. ii, col. 2116. Un document légendaire du v « siècle relate que l’ancien sanhédrite Gamaliel apparut au prêtre Lucien et lui révéla qu’il s’était converti au christianisme avec son fils Abib et avec Nicodème. Celui-ci-, en apprenant de la bouche du Sauveur la nécessité de renaître par le baptême, Joa., iii, 2, se fit baptiser par les disciples de Jésus. Alors les Juifs lui ôtèrent sa charge de sanhédrite et le chassèrent de Jérusalem, parce qu’il croyait en Jésus-Christ. Ils l’eussent même fait mourir si Gamaliel n’eût intercédé en sa faveur. Gamaliel l’aurait recueilli chez lui jusqu’à la fin de ses jours, et l’aurait fait enterrer à côté de saint Etienne à Caphargamala distante de vingt milles de Jérusalem, où dans l’endroit indiqué par Gamaliel furent retrouvés ses restes mortels. Cf. Epistola Luciani ad omnem Ecclesiam, Patr. Lat., t. xli, col. 807. — On ne connaît pas l’époque de sa mort. Le martyrologe romain mentionne l’invention de ses reliques avec celles de saint Etienne, de Gamaliel et d’Abibon au 3 août. Cf. Acta Sanctorum, augusti t. i, p. 199. Les Ménologes grecs et le Ménologe de Sirlet au contraire en font mention le 15 septembre. Cf. Acta Sanctorum, septembris t. v, p. 5. — Une légende chrétienne nous représente Nicodème comme sculpteur. On lui attribue le Volto Santo, très vénéré à Lucques, en Italie. Cf. Dobschutz, Christusbilder, dans Texte und Untersuchung., 1899, p. 280 et suiv.

On a aussi essayé d’identifier Nicodème avec Bunai ou Nicodème Ben Gorion dont on parle fréquemment dans le Talmud, et qui vécut jusqu’à la destruction de Jérusalem ; mais il n’y a pas de preuves suffisantes de cette identification. Cf. Lightfoot, Horse Hebraicx in Joa., iii, 1 et suiv., Cambridge, 1658.

A. Molini.

2. NICODÈME (ÉVANGILE DE) ou Actes de Pilate. Voir

    1. ÉVANGILES APOCRYPHES##

ÉVANGILES APOCRYPHES, t. II, Col. 2116.

    1. NICOLAÏTES##

NICOLAÏTES (Grec : NtxoXaïTaï ; Vulgale : A’icolaitm), hérétiques dont saint Jean signale la présence et l’action à Éphèse et à Pergame. Apoc, ii, 6, 15. A Éphèse, il y en a qui se disent apôtres et ne le sont pas ; leur mensonge a été constaté. L’ange de cette église a cela de bon qu’il déteste les actes des Nicolaïtes, odieux à Dieu même. À Pergame, il y a des sectateurs de Balaam, qui apprit aux fils d’Israël à manger les viandes idolâtriques et à commettre la fornication. Il y a aussi dans cette ville des sectateurs des Nicolaïtes. — 1° D’après saint Irénée ; Cont. hères., i, 26, 3, t. vii, col. 687, le nom de ces hérétiques leur viendrait de Nicolas, l’un des sept diacres ordonnés par les Apôtres.