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NÉHÉMIE (LIVRE DE)


et lecture de la Loi, ix, 1-3 ; 4° prière des lévites, rappelant au Seigneur ses anciens bienfaits à l’égard d’Israël, les fautes du peuple et ses châtiments et renouvelant l’alliance avec Dieu, ix, 4-38, signée par les chefs, les prêtres et les lévites, x, 1-27 ; 5° promesses faites par tous d’observer la loi, de ne plus permettre les mariages mixtes, de ne pas acheter aux jours de sabbat et de fête, d’observer l’année sabbatique, de payer une imposition pour les sacrifices, d’offrir le bois nécessaire au service du Temple et de donner les prémices et les dîmes, x, 28-39. — III’section. Morceaux de nature et d’origine différentes, xi-xii. — 1° Liste des habitants qui repeuplèrent Jérusalem, des lévites et du peuple, qui demeurèrent dans leurs localités particulières, xi, 1-36 ; 2° liste des prêtres et des lévites revenus avec Zorobabel et Josué, xii, 1-26 ; 3° récit de la dédicace des murs rebâtis de Jérusalem, xii, 27-42 ; 4° commission nommée pour distribuer les revenus du Temple et séparation de tout élément étranger, xii, 43-xin, 3 ; 5° mémoires de Néhémie sur son second gouvernement, xiii, 4-31.

II. Caractère composite du livre nonobstant l’unité de plan. — Bien que le livre actuel de Néhémie présente une unité incontestable, tant par son contenu, puisqu’il raconte le double gouvernement de l’échanson royal et les réformes religieuses exécutées soit par lui seul soit avec la collaboration d’Esdras, que par son but qui est d’exposer la suite de la restauration sociale et religieuse des Juifs revenus de l’exil, il apparaît à la simple analyse comme une compilation de documents divers. L’unité de contenu et de plan révèle la main d’un auteur ou rédacteur, qui groupe les documents, les relie, les complète en les adaptant à son but. Tout en donnant à l’ensemble son empreinte propre, ce rédacteur a laissé aux documents qu’il utilisait leurs caractères distinctifs, qui les rendent encore aujourd’hui aisément reconnaissablés.

Les sept premiers chapitres se distinguent des trois suivants par le ton, le genre d’exposition et le style. L’auteur y parle à la première personne, et le récit présente une originalité qui décèle l’écrivain contemporain et l’acteur des faits racontés. C’est Néhémie lui-même qui a tenu la plume et qui a laissé, dans des Mémoires d’une authenticité inattaquable et avec un accent personnel très fort, l’exposé des actes de son premier gouvernement et l’expression saisissante de ses sentiments intérieurs. Son individualité s’y reflète, et la formule : « Souvenez-vous de moi, Seigneur, » etc., répétée, v, 19 ; VI, 14, est comme sa véritable signature. Lui-même a ajouté, vii, 6-73, un document de l’époque de Zorobabel, qu’il venait de retrouver. À partir du ch. vm jusqu’à la fin du ch. x, il y a interruption brusque, le ton change ; le récit à la première personne cesse, et il n’est plus parlé de Néhémie qu’à la troisième personne, viii, 9 ; x, 1. On lui donne aussi le titre perse d’athersatha, porté par Zorobabel. I Esd., ii, 63 ; II Esd., vii, 65, 70. Bien plus, le célèbre gouverneur cède presque la place au scribe Esdras, qui joue, comme scribe et comme prêtre, le rôle principal. Dans le récit lui-même, la personnalité de l’écrivain n’est plus si appareute ; la forme est moins individuelle et moins plastique. La plupart des critiques ont conclu de ces différences que les ch. viii-x étaient d’une autre main, et faisaient partie soit des Mémoires d’Esdras, soit d’autres Mémoires contemporains, x, 29-39. Ceux qui les rapportent à Esdras considèrent qu’ils contiennent un récit vivant et détaillé comme les autres parties des Mémoires d’Esdras, et ils rapprochent IEsd., x, 6, de H Esd., xii, 23, où il est parlé de Jonathan, fils d’Éliasib. Stade pense que IX, 9-x, 40, ont été extraits directement de ces Mémoires, parce que dans les Septante on lit : Kœ’s fljtsv’Eajpaç, ix„ 6. Cependant M. A. van Hoonacker, Nouvelles études sur la restauration juive après l’exil de Babylone, Paris, Louvain, 1896, p. 258-263, estime que ces chapitres figuraient

dans les Mémoires authentiques de Néhémie. Selon lui, Néhémie avait des raisons spéciales de ne pas se donner comme l’inspirateur des mesures et des décisions prises dans l’assemblée de Jérusalem. C’est la communauté elle-même qui prend des engagements et qui établit des réformes. En sa qualité de laïque, Néhémie n’avait pas mission pour restaurer le culte et pour agir comme chef spirituel. Rapportant les faits, il s’efface et fait parler et agir la communauté. Son récit prend tout naturellement un tour plus objectif et plus impersonnel. Le document, contenant la liste des compagnons de Zorobabel, Vil, 6-73, qu’il avait reproduit, servit de transition à la narration faite à la troisième personne. L’exorde lui-même, vin, 1, fut imité du récit d’Esdras, I Esd., iii,

I, qui fait suite à la liste des premiers rapatriés. IEsd.,

II, 1-70. D’ailleurs, n’écrivant pas cette partie, de ses Mémoires au moment où les événements s’accomplissaient, Néhémie a pu donner à l’expression de sa pensée une spontanéité moindre que dans la narration des faits, dont il avait été le principal acteur. Enfin, la suite des Mémoires authentiques de Néhémie, xiii, 4-31, suppose les décisions qui ont été prises à l’assemblée de Jérusalem et dont elle ne raconte que les applications à l’exécution desquelles le gouverneur civil apportera plus tard l’énergique concours de son autorité. Cf., pour les termes eux-mêmes dans l’original, x, 40 ; xiii, 11. Un autre morceau des Mémoires, xii, 27-43, présente de nouveau le passage de la troisième personne, ji. 27, à la première, ꝟ. 31. Il n’y aurait donc pas de raison suffisante d’attribuer les ch. vm-x à un auteur distinct du rédacteur des Mémoires.

Les ch. xi-xm contiennent des documents d’origine différente. Le ch. xi se rattache par le contenu au recensement décidé, vii, 5, et continue immédiatement le ch. vii, quoique le récit ne soit pas de la même teneur. Les critiques ne sont pas d’accord sur l’époque à laquelle se rapporte cette liste d’habitants de Jérusalem et de la Judée. Cette liste est en partie identique à pelle qui se trouve I Par., ix, 3-17. Désigne-t-elle des contemporains de Zorobabel ou de Néhémie ? La place qu’elle occupe dans le livre de Néhémie permet de la rattacher aux dispositions prises à l’assemblée de Jérusalem pour la repopulation de la capitale. A. van Hoonacker, op. cit., p. 263-267. Aussi les critiques admettent-ils généralement que cette liste, dont le texte ne nous est pas parvenu intact, a fort bien pu figurer dans les Mémoires de Néhémie. La liste des prêtres et des lévites, xii, 126, n’a pas fait partie de ces Mémoires. Les cinq grandsprêtres nommés, j’. 10, 11, dépassent l’époque de Néhémie, quelle que soit, d’ailleurs, l’époque de Jeddoa, que Josèphe, Ant. jud., XI, vii, 2, fait contemporain de Darius Codoman, le dernier roi des Perses (336-332). Voir Jeddoa. De plus, la liste des lévites aurait été dressée sous le règne de ce prince, xii, 22. Enfin, la situation décrite est rapportée « aux jours de Néhémie, le gouverneur, et d’Esdras, le prêtre et le scribe », XII, 26. Cette formule est l’indice d’une époque postérieure. Les critiques y découvrent des parties de documents anciens, 1-7, 8, 9, 12-21, dont l’un serait nommé au t. 23, mais complétées, 10, 11, 22-26, par le dernier rédacteur. Cf. F. Vigouroux, Manuel biblique, 12e édit., Paris, 1906, t. ii, p. 165. La fin du livre, xii, 27-xiii, 31, où le récit reprend à la première personne, est regardée comme une partie des Mémoires de Néhémie ; la formule si caractéristique : « Souvenez-vous de moi, etc., » s’y retrouve, xiii, 14, 22, 31 ; quelques critiques y reconnaissent toutefois, xii, 27-30, 42-43, des modifications de forme introduites par le rédacteur, ou même de courtes gloses.

III. Auteur et date. — 1° Les commentateurs anciens pour la plupart attribuaient à- Néhémie lui-même la composition de tout le livre qui porte son nom. La tradition rabbinique, consignée dans le Baba Bathra, lui