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NAVIGATION


n’est question de navigation réelle qu’à l’époque de Salomon.

II. Dans le Nouveau Testament. — 1° L’Évangile ne mentionne qu’une seule espèce de navigation, celle qui se pratiquait sur le lac de Tibériade. À l’époque de Notre-Seigneur, les barques qui le sillonnaient étaient fort nombreuses. Joa., vi, 23. Beaucoup de Galiléens exerçaient le métier de pêcheurs ; mais il ne leur était permis d’employer aucun moyen capable d’entraver la navigation. Cf. Gem. Bab. Baba Kama, 80, 2 ; Reland, Palsestina illustrata, Utrecht, 1714, t. i, p. 261. De violentes tempêtes agitaient parfois les eaux du lac et mettaient les bateliers en péril. Matth., viii, 23-27 ; Marc, iv, 35-40 ; Luc, viii, 22-25. Ceux-ci, instruits par l’expérience, savaient profiter du vent pour aller à la voile, ou, à son défaut, se servir des rames. Marc, vi, 48 ; Joa., vi, 19. La batellerie du lac joua un rôle assez important pendant la guerre de Judée. Cf. Josèphe, Vit., 32, 33 ; Bell.jud., II, xxi, 8-10 ; III, x, 1, 5, 6, 9.

2° C’est dans l’histoire de saint Paul, racontée par les Actes, qu’il est question de navigation avec le plus de détails. — 1. L’apôtre se rend d’abord à Cypre, avec Barnabe. Act., xiii, 4, puis de Paphos à Pergé, en Pamphylie, Act., xiii, 13, ensuite de Pergé à Antioche, Act.,

XIV, 25. Barnabe retourne à Cypre avec Marc Act.,

XV, 39. Dans un second voyage, saint Paul passe successivement de Troade à Samothrace, à Néapolis et à Philipes. Act., xvi, 11, 12. De Thessalonique, il est conduit par mer à Athènes. Act., xvii, 14, 15. De Cenchrées, il repart pour la Syrie, Act., xviii, 18, fait escale à Éphèse, Act., xviii, 19, et aborde à Césarée. Act., xviii, 22. Il passe ensuite d’Éphèse en Achaïe. Act., xviii, 27. D’Éphèse, il retourne encore en Macédoine, Act., xx, 1, puis en Grèce, Act., xx. 2. Comme il a le dessein de regagner la Syrie par mer, les Juifs lui préparent des embûches, et il se décide à abandonner la route directe, pour naviguer par Philippes, Troade, Act., xx, 6, Assos, Chio, Samos et Milet. Act., xx, 14-15. De Millet, il passe par Cos, Rhodes, Patare, et, trouvant là un vaisseau frété pour la Phénicie, il y prend passage, arrive à Tyr et enfin à Ptolémaïde, où il débarque pour se rendre à Jérusalem. Act., xxi, 2-7. Ces voyages s’exécutaient sur des bateaux de cabotage, qui ne s’éloignaient guère des côtes, et faisaient escale aux dsfférents ports pour y laisser ou y prendre des marchandises. Pourtant le voyage d’Éphèse à Césarée, Act., xviii, 19-22, a pu se faire directement en passant par le sud de Cypre ; c’est le trajet qui est formellement indiqué pour la traversée de Patare à Tyr. Act., xxi, 3.

— 2. Le principal voyage maritime de saint Paul est celui qui le conduisit de Césarée, t. ii, col. 458, en Italie, après son appel à César. Mais il fut alors embarqué comme.prisonnier d’État, en compagnie de soldats qui avaient un certain nombre de détenus à conduire. Un navire d’Adrumète, à bord duquel il prit place, partit de Césarée et fit escale à Sidon. La route directe, pour gagner Adrumète, t. i, col.J251, port de Mysie, passait’au sud de Cypre, t. ii, col. 1168 ; mais le vent contraire obligea le navire à remonter par le nord et à gagner Lystre, ou plutôt Myre, en Lycie, par les côtes de Cilicie et de Pamphylie. Act., xxvii, 2-5. Voir Myre, col. 1362. Là se trouva un vaisseau d’Alexandrie en partance pour l’Italie. Le centurion y transborda ses prisonniers. Mais le temps devint mauvais. De Cnide, t. ii, col. 812, on descendit vers la pointe orientale de l’île de Crète, au cap Salmone, puis, en longeant la côte, on arriva à Bons-Ports. Voir Crète, t. ii, col. 1113 ; Bons-Ports, t. i, col. 1847. On était déjà à la fin de septembre, et, dans le monde gréco-romain, on considérait la navigation Comme impraticable à partir de la fin d’octobre. Cf. Végèce, De re milit., iv, 39 ; César, Bell.yall., iv, 36 ; v, 23. On se décida donc à hiverner à Phénice, au sud de l’île. Mais le vent du nord-est se mit à souffler,

et poussa le navire au sud-ouest de la petite île de Cauda, t. H, col. 350. Les matelots, craignant d’être emportés dans les parages dangereux de la Syrte africaine, ceintrèrent le vaisseau et abattirent ses agrès, afin de donner moins de prise au vent. La tempête se déchaînant de plus en plus, on jeta successivement à la mer la cargaison, puis les agrès. Quatorze jours après, toujours poussé par le vent d’est, le navire se trouvait dans l’Àdria, nom qui désignait alors la partie centrale de la Méditerranée. Voir Adriatique, t. i, col. 240. On aperçut alors un rivage. Les matelots y firent échouer le navire, en dressant la voile d’artimon de manière que le vent exécutât la manœuvre. Les matelots avaient d’abord voulu se sauver dans une barque, en abandonnant le navire à son sort ; après l’échouement, les soldats songèrent à leur tour à massacrer leurs prisonniers, pour les empêcher de fuir. Saint Paul s’opposa avec succès à cette double inhumanité, qui devait se produire fréquemment dans les cas analogues. Act., xxvii, 1-44. On avait abordé dans l’île de Malte. Voir col. 623. Les passagers y demeurèrent trois mois, probablement jusqu’en février. Un autre navire d’Alexandrie, qui avait hiverné dans l’île, prit alors saint Paul à son bord, le mena à Syracuse, en Sicile, passa le détroit de Messine, arriva à Rhegium, puis à Pouzzoles, où se fit le débarquement définitif. Act., xxviii, 1-14. On voit par ce récit que l’administration romaine utilisait les vaisseaux de commerce pour le transport de ses prisonniers. On profitait des occasions, à mesure qu’elles se présentaient, et la navigation était à la merci des vents, des tempêtes et des accidents de toute nature. Dans sa seconde Épitre aux Corinthiens, xi, 25, antérieure à peu près de trois ans à ce dernier voyage, saint Paul nous apprend qu’il avait déjà fait trois fois naufrage, et qu’il avait été un jour et une nuit dans les abîmes de la mer. On croit que cette dernière expression signifie seulement qu’en une circonstance particulière, il se trouva abandonné sur une barque désemparée au milieu des flots et fut ensuite recueilli par un navire de passage. Cf. Cornely, Epist. ad Corinth. altéra, Paris, 1892, p. 306. — 3. Le récit que fait saint Luc du voyage maritime de saint Paul est d’une exactitude parfaite. Il fournit d’utiles indications sur la navigation des anciens. Pour aller de Palestine en Italie, on se rendait d’abord à Alexandrie, t. i, col. 357, reliée à Césarée par un trafic assez considérable. A Alexandrie, on était sûr de trouver des vaisseaux en partance pour l’Italie. Cf. Suétone, Titus, 5. De fait, au cours de son voyage, saint Paul rencontra deux navires alexandrins, un à Myre, Act., xxvii, 6, et l’autre à Malte. Act., xxviii, 11. Il fallut la présence dans le port de Césarée d’un navire d’Adrumète pour qu’on se décidât à passer directement en Asie Mineure où il était facile, comme il arriva en effet, de trouver d’autres vaisseaux faisant route vers l’Italie. Un navire d’un fort tonnage était indispensable, à cause des prisonniers et des soldats qui devaient faire le voyage. Ce navire avait probablement une cargaison qui devait être débarquée par parties dans différents ports. C’est du moins ce que pratiquaient les bateaux montés par saint Paul dans ses précédents voyages. Les gros navires de charge ne pouvaient guère louvoyer quand le vent était défavorable. Ils préféraient allonger leur route et profiter à la fois des vents et des courants. C’est ce que fit habilement le vaisseau d’Adrumète. La difficulté que rencontra le navire alexandrin de Myre pour naviguer dans les parages de l’île de Crète s’est produite de tous temps. On n’a cessé de le constater depuis lors. Les anciens en souffraient beaucoup. Cf. S. Grégoire deNazianze, Orat., xviii in patrem, 31, t. xxxv, col. 1024 ; Poemata histor. , i, t. xxxvii, col. 993. L’armateur ou « maître du vaisseau » accompagnait ordinairement son navire, pour la conduite duquel il s’adjoignait un capitaine. Act., Xxvii, 11. Quand la tempête se déchaînait, il n’y avait