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LAVEMENT DES PIEDS

David veut persuader à Urie de passer la nuit dans sa maison et d’y coucher, il lui dit : « Descends dans ta maison et lave tes pieds, » c’est-à-dire prends-y la précaution par laquelle commence tout hôte qui veut être reçu quelque part. II Reg., xi, 8. Aussi, lorsque l’Épouse endormie dans sa maison entend l’Époux frapper à la porte, elle lui répond : « J’ai ôté ma tunique, comment la remettre ? J’ai lavé mes pieds, comment les salir ? » Cant., v, 3. Le devoir de présenter à l’hôte de quoi se laver les pieds, encore en vigueur dans les pays d’Orient, cf. Shaw, Reisen, Leipzig, 1765, p. 208 ; Rosenmüller, Schol. in Genes., Leipzig, 179O, p. 196, l’était aussi au temps du divin Maître. Invité par le pharisien Simon, Notre-Seigneur put lui adresser ce reproche : « Je suis entré dans ta maison et tu ne m’as pas donné d’eau pour laver mes pieds. » Luc, vii, 44. C’était l’office des esclaves de laver les pieds de leurs maîtres (fig. 41).


41. — Antiphata lavant les pieds d’Ulysse. Vase de Chinai.
D’après Monumenti inediti dell’Instituto di Correspondenza archeologica, t. x, 1869-1873, pl. 42.


Demandée pour épouse par David, Abigaïl répond, en témoignage de son entière soumission : « Ta servante sera une esclave pour laver les pieds des serviteurs de mon seigneur. » I Reg., xxv, 41. Madeleine remplit cette fonction auprès de Notre-Seigneur ; elle baigne ses pieds de ses larmes et les essuie avec ses cheveux. Le Seigneur fait ressortir le contraste qui existe entre cet acte et la négligence du pharisien, qui a manqué au premier devoir de l’hospitalité. Luc., vii, 38, 44. Saint Paul veut qu’une veuve, pour être admise par l’Église, ait « exercé l’hospitalité et lavé les pieds des saints ». I Tim., v, 10. — « Se laver les pieds dans le beurre, » Job, xxix, 6, marque l’abondance de tous les biens. Les « baigner dans le sang des méchants », Ps. lviii (lvii), 11, c’est voir ces derniers subir le châtiment de leurs crimes.

Dans la liturgie mosaïque. — Avant d’entrer dans le Tabernacle, Moïse, Aaron et ses fils devaient se laver les mains et les pieds. Exod., xxx, 19, 20 ; xl, 29. Cette loi fut suivie plus tard par tous les prêtres. En entrant dans le sanctuaire, ils devenaient comme les hôtes du Seigneur, devant lequel ils ne pouvaient d’ailleurs se présenter qu’avec une pureté parfaite. Cette pureté devait surtout paraître aux pieds et aux mains, parce que les pieds les conduisaient dans le sanctuaire, où les prêtres ne pouvaient pénétrer et servir que pieds nus, et les mains leur servaient à offrir les sacrifices. Cf. Bähr, Symbolik des mosaischen Cultus, Heidelberg, 1837, t. i, p. 491-492. Les prêtres avaient à se soumettre à ces lotions liturgiques alors même qu’ils étaient en état de pureté légale. Yoma, iii, 3. À la fête de l’Expiation, le grand-prêtre était astreint par le cérémonial traditionnel à cinq ablutions complètes et à seize changements de costume, ce qu’il ne pouvait faire sansase laver autant de fois les pieds et les mains. Voir Expiation (Fête de l’), t. ii, col. 2137 ; Reland, Antiquitates sacræ, Utrecht, 1741, p. 249. Les prêtres se lavaient les pieds et les mains avec l’eau d’une grande cuve d’airain qui était placée entre le Tabernacle et l’autel, Exod., xxx, 17, et qui, dans le temple de Salomon, prit le nom de mer d’airain. III Reg., vii, 23-26. Voir Mer d’airain.

À la dernière Cène. — Avant d’instituer la sainte Eucharistie, Notre-Seigneur veut bien exercer lui-même l’office de l’esclave en lavant les pieds à ses Apôtres. Il ôte son vêtement de dessus, se ceint d’un linge, met de l’eau dans un bassin, lave les pieds des Apôtres et lés essuie avec le linge dont il est ceint. Il ajoute cette remarque, à l’adresse de Pierre, que celui qui a pris un bain, ὁ λελουμένος, qui lotus est, n’a plus besoin que de se laver les pieds, τούς πόδας νίψασθαι, ut pedes lavet, s’il vient du dehors. Joa., xiii, 4-10. Notre-Seigneur indique lui-même la triple leçon qu’il entend donner : leçon d’humilité, probablement pour répondre à la compétition sur la préséance qui a eu lieu ayant le repas, Luc., xxii, 24-30 ; cf. Luc, xxii, 26, 27, et Joa., xiii, 13-15 ; leçon de charité, Joa., xiii, 14, et leçon de pureté. Joa., xiii, 8-10. Ces trois dispositions conviennent très spécialement avant la participation au banquet eucharistique.

Dans la liturgie chrétienne. — Il était d’usage, dans