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MORTE (MER)


supposant que àiddîm se rattache à èddéh, « champ. » Les Septante ont traduit, ꝟ. 3, par ^ $A ?a.yl  ?) àXyxrj, et, ꝟ. 10, par t, xoiXa ; ï| âXvx-r, , « la vallée salée, » et la Vulgate par vallis silvestris, « la vallée des bois. » Quoi qu’il en soit du nom, cette plaine avoisinait sans doute les villes de la Pentapole, puisque les rois envahisseurs se réunirent en cet endroit, et que les rois menacés y rassemblèrent aussi leurs forces pour défendre leurs cités et le territoire qui en dépendait. L’opinion la plus probable place ces villes au sud de la mer Morte. On a cependant cru autrefois qu’elles occupaient l’emplacement même du lac, qui se serait formé à cette époque par l’effondrement du sol, effet de la catastrophe. Les apologistes du xviif siècle ont soutenu cette fausse théorie. Cf. JBullet, Réponses critiques, 1826, t. i, p. 156 ; du Clôt, La Sainte Bible vengée, 1824, t. ii, p. 186. C’est une erreur qu’il n’est plus permis de défendre aujourd’hui. La géologie, nous l’avons vii, prouve que la mer Morte existait bien longtemps avant l’apparition de l’homme sur la terre. D’ailleurs, dans une pareille hypothèse, que seraient devenues les eaux du Jourdain, ces 6500000 tonnes qu’il verse journellement dans le

Haut plateau de Juda.

naturel de solution. À l’époque d’Abraham, cette mer existait, mais alors elle ne comprenait que le grand et profond bassin septentrional, qui s’étend jusqu’à la Lisàn. La Pentapole devait embrasser dans ses limites cette presqu’île, la lagune méridionale, le canal qui la rejoint à la zone antérieure, c’est-à-dire au lac proprement dit, et peut-être aussi le Sebkhah, qui s’arrondit en plaine marécageuse au sud de cette lagune. On peut supposer, si l’on veut, que ce territoire ainsi délimité était également arrosé par le Jourdain, qui aurait traversé le troisième lac comme il traverse ceux de Mérom et de Tibériade, et en serait ressorti à l’ouest de la Lisân, pour arroser la vallée de Siddim. Le lieutenant "Vignes a remarqué, après Lynch, que les courants occasionnés par le fleuve sont très sensibles dans la partie nord de la mer, et qu’on les retrouve encore avec une vitesse d’un demi-mille à l’heure dans le canal entre la.Lisân et le râs Senin. Le Jourdain, sortant avec un volume d’eau beaucoup moins considérable qu’il n’était entré, pouvait donc arroser, sans l’inonder, la grande plaine qui devint plus tard la lagune et la Sebkhah. Ses eaux n’avaient pas contracté assez d’amertume et de salure pour

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362. — Coupe géologique du plateau de Juda et du Djebel Usdum. D’après Hull, Memoir on the Geology, p. 84.

bassin, au moins en certaines saisons de l’année ? On pouvait autrefois, dans l’ignorance où l’on était de la nature du terrain, supposer qu’elles allaient, en suivant tout droit Youadi Arabah, se jeter dans le golfe Élanitique. Mais les explorateurs qui ont parcouru la vallée dans toute sa longueur ont constaté, entre la mer Morte et le golfe d’Akabah, une ligne de faite dont l’altitude est évaluée à 240 mètres au-dessus de la Méditerranée. Cf. Duc de Luynes, Voyage d’exploitation à la mer Morte, t. ri, p. 10-11. C’est un barrage que le Jourdain n’a jamais pu franchir. Inutile de recourir à l’hypothèse d’affaissements gigantesques, qui auraient, à une certaine époque, arrêté le cours du fleuve et concentré ses eaux dans le fond de la dépression. Elle est également condamnée par l’étude stratigraphique du terrain. Voir Arabah, t. ï, col. 820, et fig. 201, 202, col. 823, 825. Faut-il enfin imaginer un lac souterrain, recouvert d’une puissante couche végétale, qu’auraient fécondée de nombreux canaux dérivés du Jourdain ? Les eaux se seraient ainsi perdues à la fois par l’irrigation, l’évaporation et des infiltrations dans le sein de la terre. Au moment de la destruction des villes maudites, le feu du ciel, embrasant les nombreux puits de bitume qui parsemaient la vallée de Siddim, aurait communiqué au sous-sol une conflagration générale, d’où un affaissement des couches supérieures et l’apparition ou la réapparition du lac souterrain. Nous n’avons point besoin de toutes ces inventions pour mettre d’accord l’assertion biblique et les données de la science.

La disposition de la mer Morte, avec les deux parties si distinctes qui la composent, nous offre un élément tout

être impropres à féconder la plaine. Réparties de tous côtés, elles pouvaient s’épuiser et se perdre à la longue, en se divisant dans d’innombrables petits canaux, subdivisés eux-mêmes en rigoles, et soumises, par conséquent, à des infiltrations continues et à une évaporation incessante sous cette zone torride. Cf. V. Guérin, Samarie, t. ï, p. 91. C’est donc cette plaine méridionale, autrefois vallée de Siddim, que la catastrophe de Sodome a pu transformer en un lac peu profond. « Il suffirait d’un abaissement de sept à huit mètres seulement pour que la lagune, c’est-à-dire la portion méridionale du lac, fût mise à sec. Ce faible abaissement de niveau pourrait résulter de changements physiques presque insaisissables par l’attention humaine. Il n’y aurait donc rien d’improbable à ce que la mer Morte ait eu autrefois sa pqinte méridionale à la presqu’île de la Lisân. .. Des effets de glissements, comme ceux dont nous avons cru reconnaître la trace sur le ffanc oriental du Djebel Usdum, ont pu, à la suite des tremblements de terre, venir ajouter leur action à celle de ces fluctuations de niveau ; et, s’il est vrai, comme on s’accorde à le croire, que la montagne de sel porte encore le nom à peine altéré de Sodome, et lui soit voisine, cette ancienne cité a bien pu disparaître par suite de la dénivellation dont nous venons de mentionner les traces, puis se trouver recouverte par les eaux de la mer Morte et les alluvions des affluents méridionaux. » Telle est la conclusion du savant géologue qui a spécialement étudié le lac Asphaltite, M. Lartet, Géologie, p. 267. Remarquons-le cependant, la Genèse jie dit pas que les villes coupables ont été submergées dans cette mer ; elle