Page:Dictionnaire de la Bible - F. Vigouroux - Tome IV.djvu/665

Cette page n’a pas encore été corrigée
1277
1278
MORÉH (COLLINE DE)


Les indications bibliques et la suite du récit ne permettent pas d’en douter. Le texte hébreu, en effet, place le camp de Madian au nord de la fontaine Harad et du camp de Gédéon." « Gédéon se leva, dit-il, et tout le peuple qui était avec lui, et ils campèrent à la fontaine Harad ; et le camp de Madian était pour lui au nord, à partir de la colline Môréh, dans la vallée, » hâyâhlô mi$-fàfôn. Jud., vii, 1, Les Septante ont lu de même : TrapÊjjLëoX-r) Moc8cà[i rjv a>z& àito pop£â ânà ra8aa8|Ao>pat li xofXavt. C’est le Djebel Dahy clairement indiqué. Le camp de Madian se développait au pied de la colline, entre elle et la fontaine, dans la vallée, c’est-à-dire partie sans doute dans le Merdj et partie dans Vouâta’Djâloud. — Les allées et venues de Gédéon se comprennent ainsi facilement. Il en est de même de la suite du récit. Quand le bruit des trompettes et l’éclat des lampes de l’armée de Gédéon eurent répandu le trouble et la terreur dans le camp ennemi, les Madianites prirent la fuite en se dirigeant vers Bethsetta et la vallée du Jourdain. Jud., vii, 23-21. Le nom de aillah se retrouve aujourd’hui dans celui du petit village de Satta’, situé à 12 kilomètres au sud-est de Soulam, au pied des collines qui prolongent le Djebel Dahy vers l’est et sur le chemin qui, suivant leur base méridionale, se dirige toujours au sud-est, vers le Jourdain. C’est la direction que devaient suivre les fuyards pour regagner leur pays ; leur point de départ pour fuir était donc au nord-est de Satta’, là où est Soulam et le Dahy.

II. Le récit de la Vulgate^ — Le récit de la Vulgate est loin d’être aussi précis. « Gédéon, y lit-on, se levant de nuit, et tout le peuple avec lui, but à la fontaine qui est appelée Harad ; le camp de Madian était dans la vallée, au côté septentrional de la grande colline, in valle ad septentrionalem plagani collis excelsi. Au lieu de rattacher l’indication, mis-sdfôn, « au nord, » à Gédéon et à son camp, le traducteur la rapporte à la colline et fait de hàyâh-lô, « se trouvait » au lieu de « était (avec le complément lô), par rapport à lui ». Avec cette interprétation la situation de la colline n’est plus déterminée, alors que le narrateur semble cependant avoir voulu faire connaître la positon respective des deux camps. Et puis, grammaticalement aussi bien que logiquement, lô, masculin, se rapporte nécessairement à Gédéon et non à mahânéh, féminin ; pour traduire « se trouvait » il faudrait, hdyâh-lâh ; enfin le récit lui-même ne comporte pas cette traduction.

Malgré tout il faudra toujours chercher la colline de Môréh au Djebel Dahy ou à l’un des sommets du petit massif auquel il appartient. On ne peut en effet supposer une des collines de la chainede Carmel ni des monts de Nazareth bordant la plaine où les démarches de Gédéon seraient absolument impossibles ; on ne peut davantage s’arrêter au^ Djebel Foqou’a ou mont de Gelboé, où la fuite vers Sat(a’, au nord, serait un contresens. Mais en plaçant le camp de Madian au nord du Djebel Dahy, le chemin de 12 kilomètres environ qu’a à faire trois fois Gédéon serait une course un peu longue avant le combat. Puis Gédéon avec sa petite troupe, arrivant du sud, coupait la retraite aux Madianites qui ne devaient plus fuir vers le sud-est, et vers Sa((a’, mais se trouvaient contraints de s’échapper par le nord, pour gagner Vouadi Sarrâr qui sépare le massif du Dahy du Thabor, et aboutit, par Vouadi el-Bireh, à la vallée du Jourdain. De toute manière, il appparait que le traducteur a été induit en erreur par la particule mi, a, mig-gibe’af Môréh, laquelle était peut-être primitivement a, be-gib’at, et qu’on lisait : « le

camp de Madian était par rapport à lui (Gédéon) au nord, près du mont Môreh, dans la vallée. » En tout cas, et si l’on admet la lecture d, la seule interprétation

possible n’en est pas moins celle des Septante indiquant

clairement, avec le texte hébreu, le mont Môréh au Djebel Dahy, ou, si l’on aime mieux (ce à quoi rien ne paraît s’opposer), à tout le petit massif dont le Dal.nj fait partie.

III. Le nom de « petit Hermon » attribué au Dahy. — Le mont Môréh, si l’on devait s’en rapporter à l’appellation des pèlerins étrangers, qui désignent fréquemment et depuis assez longtemps le Djebel Dahy sous le nom de « petit Hermon », serait identique aux Hermoniim a monte modico de Ps. xii, 7. Cette désignation prétend s’appuyer sur le mot de saint Jérôme, Epist. cviii, ad Eustochium, t. xxii, col. 889, montrant à sainte Paule romaine, du sommet de Thabor, « contemplant au loin, les monts Hermon et Hermoniim et la vaste plaine de la Galilée, » inspiré sans doute par la parole du Psaume lxxxviii, 13 : « Le Thabor et l’Hermon tressailleront à votre nom. » Outre l’inexactitude de la traduction de l’hébreu : mê-’éréç Yardën ve-Hêrmômm, niéhar Miç’âr, « de la terre du Jourdain et des Hermoniim, |et] du mont Misar » (hébreu : xlii, 7), la double hypothèse n’est point fondée. Le rapprochement idéal du Thabor et d’Hermon dans le Psaume n’implique aucunement un voisinage physique et saint Jérôme nous montre les Hermoniim « loin », procul, du Thabor et du Djebel Dahy. Voir Hermoniim, t. iii, col. 637, et Mitsar, t. iv, col. 1135.

IV. Description. — Le Djebel Datftj est le principal sommet d’un petit massif de collines, à base calcaire mais couvertes de pierres volcaniques, complètement séparé du Thabor et des monts de la Galilée inférieure par la large vallée du Sarrâr. Il s’avance sur la plaine semblable à un immense promontoire d’où l’on peut surveiller toute la contrée. Sa hauteur au-dessus de la Méditerranée est, d’après la carte de Palestine de VExploration Fund. de 515 mètres et 460 au-dessus du Merdj ibn-’Amer. Le Tell’Adjjoul qui le continue au nord-est n’a plus que 334 mètres d’altitude, la colline de Qoumiéh, au sud-est, et non loin de laquelle est le village de Satta’, 255, et celle de Taiibéh, à l’est, 126 seulement. À la partie supérieure du mont est un Maqdm, ou petit sanctuaire mahométan avec le tombeau d’un santon appelé néby Dahy. De là le nom donné à un village ruiné, situé tout auprès et à la colline elle-même. De ce point, la vue est des plus étendues et des plus belles. Au pied du mont se déroule l’immense et fertile plaine d’Esdrelon, prolongée vers l’ouest par le spacieux ouata Djâloud. Le Thabor, à la forme arrondie, la termine au nord-est. Au nord, se déroulent les montagnes de la Galilée inférieure au milieu desquelles apparaît Nazareth éclatante de blancheur. La chaîne de Carmel, par derrière laquelle étincelle comme un immense miroir d’argent la mer de Syrie, se développe à l’ouest, dominée par le Mul.iraqah, la montagne du sacrifice d’Élie. Au sud, en avant des montagnes de la Samarie se confondant avec l’azur du ciel, se dresse la Seih Sibel, là où il faut chercher la célèbre Béthulie, et plus près le djebel Foqou’a, le Gelboé où Gédéon réunit ses braves et où Jonathas tomba, avec son père Saùl. À l’est, par delà la large issue de Vouâta’Djaloud où se développe la campagne verdoyante de Bessdn, arrosée par de nombreux courants, et au-dessus du Ghôr où le Jourdain décrit ses méandres, les monts empourprés du Djaulàn et de l’Adjloûn ferment l’horizon.

Les pentes de la colline sont généralement pierreuses et dénudées ; mais sa large base sur laquelle s’élèvent les villages de Nain, la Naïm des Évangiles, el-Fouléh, . le castellum Fabse ies Croisés, et Soulam, la Sunam, souvent visité par Elisée, devient de plus en plus fertile à mesure qu’elle s’abaisse vers la plaine.

C’est là, aux abords de cette dernière localité, située en face du Gelboé au pied duquel jaillit la fontaine de Harad, que les Madianites avaient établi leur camp quand Gédéon, avec ses trois cents hommes munis de troinv