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MOAB

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toire, le contexte, et les deux versions elles-mêmes dans les autres endroits où se retrouvent les mêmes expressions : be-arbôf. Môdb mê-êber le-Iardên Ier&hô, justifient la lecture massorétique ; les deux traducteurs se sont trompés en faisant de Jéricho le complément local non du Jourdain, mais du verbe « camper ». Les Septante ont confondu en outre, ici, be-’arbôf, nom de lieu, avec la locution adverbiale « à l’occident ». Ces erreurs incontestables ne peuvent être prises en considération pour la détermination des limites et de l’étendue du pays de Moab.

il. divisions et description. — 1° Division générale.

— Le pays de Moab, pris dans son ensemble, est naturellement divisé, par la gigantesque fissure appelée la vallée d’Arnon, en deux parties, qui, à cause de leur position respective, peuvent être appelées, l’une Moab méridional, l’autre Moab septentrional. La première partie, appelée encore au XVe siècle Madb, est connue aujourd’hui sous le nom de « pays de Kérak », belad el-Kérak ; la seconde est comprise pour sa plus grande partie, dans l’appellation de Belqâ, qui, d’après les Arabes, signifierait le « pays de Balaq », nom du roi de Moab bien connu qui appela Balaam. Jusque vers le xiv c siècle lé nom de Belqâ désignait toute la contrée depuis le Zerqà (Jaboc) jusqu’au delà du Kérak, non compris le Ghôr ou vallée du Jourdain. Cf. Et-Tahiry, Syria descripta, édit. Rosenmûller, Leipzig, 1828, p. 18 ; Yaqût, Géographie, édit. F. Wustenfeld, Leipzig, 1866, t. i, p. 710. Peu différentes par leur caractère physique, les deux parties de Moab le sont profondément par le caractère moral que leur a imprimé leur destin particulier politique, historique et religieux. — Tandis que Moab méridional demeure la possession constante des Moabites depuis leur origine jusqu’à leur dispersion en tant que peuple, Moab septentrional passa par les vicissitudes les plus diverses. Propriété primitive de Moab, cette partie passe aux mains de Séhon qui en fait un royaume amorrhéen ; les Hébreux le lui enlèvent peu après pour en faire la part de deux de leurs tribus, celles de Ruben et de Gad. Disputée plus tard entre les rois d’Israël et de Moab, ceux-ci finissent par la réunir à leur territoire. Reprise en grande partie par les Juifs, à cause d’eux, elle subira le choc terrible des Romains. Dans le déroulement de ces faits, elle tient constamment attachés sur elle les regards de l’histoire, tandis que Moab méridional n’apparaît qu’accidentellement. Mais ce qui distingue surtout chacune de ces deux parties, c’est la diversité de leur importance au point de vue religieux. Sans doute la partie méridionale n’est pas sans une supériorité relative par rapport aux autres nations, à cause de la parenté des ancêtres de son peuple avec les patriarches hébreux, et à cause de son voisinage de la Terre Promise et de ses relations avec Israël ; elle ne reste pas moins confondue avec le commun des pays profanes et demeure comme eux constamment souillée par les erreurs et les ignominies de l’idolâtrie. Il en est tout autrement de la partie septentrionale. Incorporée par la conquête de Moïse à l’héritage du peuple de Dieu, elle devient partie intégrante de la Terre Sainte, et sanctifiée par le culte du vrai Dieu, elle acquerra elle-même un caractère sacré. Des souvenirs nombreux et grands se rattachent d’ailleurs à elle. Pour l’Ancien Testament ce sont d’abord ceux de la dernière période de la vie du législateur d’Israël ; sa conquête, ses instructions suprêmes à son peuple, sa bénédiction aux douze tribus et sa mort sur le mont Nébo ; puis le souvenir non moins illustre de l’ascension d’Élie. Pour le Nouveau Testament, c’est le souvenir de la prédication de Jean-Baptiste et de sa mort, du baptême du Sauveur et de son dernier séjour avant sa Passion. La mémoire de ces faits donne au pays septentrional de Moab un reflet de gloire et le couronne d’une auréole de sainteté dont l’éclat ne le cède pas à celui des saints lieux les plus célèbres et les plus vénérés.

2° Division d’après le caractère physique. — Le pays de Moab, dans son ensemble, tant au sud de l’Àrnon ou du Môdjeb qu’au nord, est formé de trois régions s’étendant parallèlement dans le sens de la longueur du pays du nord au sud et complètement différentes l’une de l’autre par l’aspect comme par la nature : une région de haut plateau ou de plaine, une région accidentée ou de montagnes et une partie basse et déprimée.

1. Le haut plateau. — Il est ordinairement nommé iedéh Môdb, « la campagne de Moab. » Ainsi Gen., xxxvl, 35 ; Num., xxt, 20 ; Ruth, iv, 3 ; I Par., i, 46 ; vih, 8 ; ou bien, au pluriel, sedê Môâb, « les champs de Moab, » Ruth, I, 1, 2, 22 ; ii, 6 ; l’un et l’autre rendus par to reeSc’ov Mmàëou àypô ; Muâê dans les Septante et par terra Moab, regio Moab, Moabitis, dans la Vulgate. Appliqué tantôt à la portion septentrionale, tantôt à la méridionale, ce nom, on n’en peut douter, était primitivement donné en général à tout le plateau. Jérémie, XLVHI, 8, semble attribuer la même extension au nom ham-Misôr, <t la plaine. » Voir Misor 1, col. 1132. Entre la conquête de Moïse et la réoccupation de la partie septentrionale par les Moabites, le nom de MUôr était particulièrement affecté à cette partie, soit d’une manière générale, soit en le précisant par le nom d’une des villes principales de la région, comme le MUôr [de] Mêdâba’. Cf. ûeut., iii, 10 ; Jos., xiii, 9, 17, 21 (texte hébreu). La portion de la plaine où fut la ville de Cariathaïm a été désignée du nom de Savé Cariathaïm, hébreu : Sdvêh Qiridtâini, « le plateau de Cariathaïm. » Gen., xiv. 5. Une autre portion, dans le voisinage de Bamoth et au haut du Phasga, était appelée èedêh Sôfîm, « la campagne des sentinelles, » Vulgate : locus sublirnis. Num., xxiii, 14. — Le plateau de Moab forme une large bande d’environ 30 kilomètres, s’étendant, du nord au sud, dans toute la longueur du pays, du côté de l’est, sur la lisière du désert oriental. Son altitude moyenne, comme celle du haut plateau de l’Asie occidentale dont il est le terme, est de 7 à 800 mètres. Son sol est ondulé, dominé çà et là de collines généralement en forme de mamelons, dont la base calcaire n’est que partiellement recouverte de terre végétale. Au nord de l’Arnon, le point appelé Umm el-Djereisât, à l’ouest de Médaba, a 896 mètres d’altitude, Ma’în 872, Djelûl 823 ; fle ? 6dn900, EVâl 934, es-Samik 927, Vmm cs-Summâq, sur la limite septentrionale, en a 968 ; plus à l’ouest, le Djebel Zabbûd a 1 140 mètres d’altitude. Au sud de l’Arnon, le plateau s’élève graduellement et plusieurs de ces sommets ont une élévation de 1100 à 1200 mètres au-dessus du niveau de la mer Méditerranée et de 1500 à 1600 au-dessus du niveau de la mer Morte. Ainsi Kérak est à 1026 mètres d’altitude, él-Môtéh, plus au sud, à 1167 mètres, Dat-Rds à 1165 et eUDja’far à 1254, c’est-à-dire à 1647 mètres au-dessus de la mer Morte. Le fond du plateau est une terre de couleur d’un brun plus ou moins sombre, d’une épaisseur de trois à quatre mètres et d’une grande fertilité. — Le plateau de Moab est sillnonë par une multitude de ravins, dont les principaux, Youadi Môdjeb, Vouadi Ledjjûn, Vouadi Sa’ideh, Vouadi Fiqréh, Youadi Oudléh, immenses fissures aux parois escarpées, se creusent jusqu’à 6 ou 700 mètres au-dessous du niveau de la plaine, en précipices d’un aspect à la fois terrible et grandiose. La plupart se ramifient au Môdjeb, ceux du sud en se joignant à Youadi Ledjjûn, qui traverse la plus grande partie du plateau méridional en se dirigeant du sud au nord, pour rejoindre le Môdjeb en face de’Ard’ér. Au nord, le plus grand nombre sont les confluents de Youadi Ouâléh, qui coupe le plateau septentrional en diagonale pour s’unir, sous le nom (Youadi fleiddn, an Môdjeb, à 4 kilomètres en amont de son embouchure. Les autres rejoignent les vallées moins importantes du Zerqâ-Ma’în, au nord, de Kérak, de Nenieirâ et û’el-Bîasd, au sud.

2. La région accidentée. — En s’approchant de la grande dépression du Ghôr, le plateau qui forme la par-.