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MINE

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1. MINE (grec : [UT(i}.}.a ; Vulgate : métallo), gisement de minéraux exploités au moyen d’excavations dans la roche ou le sol.

1° En Palestine. — Il est dit au Deutéronome, viii, 9, que dans le pays de Chanaan les pierres sont du fer et qu’on y taille le cuivre dans les montagnes. Celte indication termine une énumération dans laquelle tous les termes sont pris au sens propre ; il est donc difficile de les entendre métaphoriquement de pierres dures comme du fer, la métaphore ne pouvant d’ailleurs s’appliquer ensuite au cuivre taillé dans les montagnes. Toutefois, il ne suit pas de là que la Palestine ait été à proprement parler un pays minier ; on ne peut croire non plus que l’écrivain sacré ait voulu faire allusion à des mines cachées, que les Israélites n’ont jamais découvertes. De telles mines ne pouvaient constituer pour eux une richesse. Dans la bénédiction d’Aser, il est bien dit aussi : « Que tes verroux (Vulgate : calceamentum) soient de fer et d’airain. » Deut., xxxiii, 25. Il ne résulte pas davantage de ce texte que le territoire d’Aser ait renfermé des minerais de fer et de cuivre. C’était une riche contrée ; Aser devait « plonger son pied dans l’huile ». Deut., xxxiii, 24. Il lui était donc aisé de se procurer les métaux par des échanges avec les Phéniciens, ses voisins immédiats. Cf. Wichmanushausen et E. Cob, Aser metallifossor, dans le Thésaurus de Hase et Iken, Leyde, 1732, t. i, p. 449-470. Du désert de Tib à Hébron, il. est vrai, et ensuite à l’est et au nord-est de Jérusalem, en Samarie, en Galilée, dans le Liban et PHermon, la dolomie qui se mêle parfois au calcaire néocomien contient des pyrites de fer. Cf. Tristrarn, The natwal history of the Bible, Londres, 1889, p. 19. Mais en fait, il n’y avait pas de mines de fer ni de cuivre dans la Palestine proprement dite. Voir Cuivre, t. ii, col. 1157 ; Fer, t. ii, col. 2207. On n’a trouvé de minerais de fer que dans le Liban. Cf. Volney, Vogage en Egypte et en Syrie, Paris, 1823, t, i, p. 233 ; Russegger, Reisen in Europa, Asien und Africa, 1841-1849, t. i, p. 693 ; t. iii, p. 284. À Deïr el-Kamar, à vingt kilomètres au sud de Beyrouth, des Juifs exploitaient encore naguère le minerai de fer du Liban et en fabriquaient des fers à cheval qu’on expédiait dans toute la Palestine. Cf. Schwarz, Dos heilige Land, 1852, p. 323. À l’est de la même ville, dans les montagnes du Kesrouan, d’autres mines sont exploitées, particulièrement à Masra. La malléabilité du fer qu’on y trouve le fait préférer au fer étranger pour la clouterie et les menus ouvrages. Cf. Chauvetet Isambert, Syrie, Palestine, Paris, 1890, p. 87. Mais ces mines n’étaient pas au pouvoir des anciens Israélites. Josèphe, Bell, jud., IV, viii, 2, donne à la chaîne montagneuse qui s’étend du nord au sud à l’est du Jourdain le nom de x<S o1571poCv xaXoijjjLEvov opô ; , « la montagne qu’on appelle de fer. s À quelque distance au sud-ouest du village de Bourmah, situé sur le Jaboc, entre le Jourdain et Gérasa, voir la carte de Gad, t. iii, col. 28, on a retrouvé en effet les trous d’une ancienne exploitation de minerai de fer. Il , y a là un grés très ferrugineux qu’on a recommencé à exploiter à plusieurs reprises au siècle dernier. Cf. Wetzstein, dans Frz. Delitzsch, Dos Buch lob, Leipzig, 1876, p. 358. Le basalte abonde dans la région montagneuse de la Palestine ; il renferme une forte proportion d’oxyde de fer, mais cet oxyde n’est pas exploitable pour fournir le métal. Voir Basalte, 1. 1, col. 1485. Les raines de cuivre n’existaient pas non plus en Palestine. H y en a une à Antabès, au nord d’Alep, mais elle n’est pas exploitée. On tirait beaucoup de cuivre de Phunon, en Idumée, entre Pétra et Soar. Cf. Reland, Paleestxiia illuslrata, Utrecht, 1714, p. 951 ; Revue biblique, 1898, p. 114. La grande quantité de cuivre que David prit à Adarézer, I Par., xviii, 8, prouve au moins qu’en Syrie l’on n’était pas en peine pour se procurer ce métal. Il résulte de ces constatations que le texte du Deutéronome, viii, 9, doit s’entendre dans ce sens assez large que les Israé lites auraient toute facilité pour trouver autant de fer et de cuivre qu’ils voudraient dans le pays de Chanaan, soit par des échanges, soit par une action directe sur les mines des régions limitrophes, qui d’ailleurs furent assez souvent soumises à leur domination.

2° Dans la péninsule sinaîtigue. — L’auteur du livre de Job, xxviii, 1-2, parle de mines d’argent, d’or, de fer et de cuivre. Il fait sans doute allusion à différentes exploitations connues de lui dans le Liban, les monts de Galaad, l’Idumée, etc., et à celles des Égyptiens en Nubie, au Pouanit, et dans d’autres pays, voisins de la mer Bouge, d’Où ils tiraient l’or. Voir Or. Mais sa description parait viser spécialement les mines de cuivre et de turquoises que les Égyptiens exploitaient dans la presqu’île sinaïtique. Voir Cuivre, t. ii, col. 1157. Dans les flancs d’une vallée de la presqu’île, située à l’ouest, à peu près à mi-chemin entre les sources de Moïse et la pointe méridionale, et appelée ouadi Maghara, « vallée de la caverne, » les Monltou, qui fréquentaient anciennement ces parages, avaient découvert des veines de minerais

289. — Le pharaon Snéfrou aux mines du Sinaï. D’après Lepsius, Denlimâter, Abt. ii, Bl. 2.

métalliques et des gisements de pierres précieuses, particulièrement de turquoises, qu’ils se mirent à extraire et à exporter sur les bords du Nil. Ces objets excitèrent la convoitise des Égyptiens, qui organisèrent des expéditions pour aller exploiter la mine à leur profit. Un roi de la IIIe dynastie, Zosiri, paraît s’être occupé le premier de mettre la main sur la mine. Snofrou, premier roi de la IVe dynastie, organisa plus sérieusement l’exploitation et prit des mesures efficaces pour écarter par la force les premiers occupants. Sur une tablette qui se voit encore au versant nord-ouest de l’ouadi, Snofrou est représenté tenant de la main droite une massue avec laquelle il va frapper un Bédouin terrassé (fig. 289). Cf. Lepsius, Denkm., ii, 2. Un autre bas-relief montre son successeur, Chéops, dans la même attitude. Les Égyptiens appelaient mafka ou mafkait le produit qu’ils venaient chercher dans ces parages ; la déesse Hâthor était dans le pays la dame du mafka, et la mine ou baît se trouvait dans la région des grottes ou bibît. En quelques heures, les ouvriers pouvaient transporter les produits de l’exploitation jusqu’au rivage, dont ils n’étaient séparés que par une rangée de hauteurs et une plaine étroite. Pour se mettre à l’abri des bandes de Monltou, ils se retiraient, quand c’était nécessaire, dans une sorte de village fortilié, bâti sur le sommet d’un petit monticule à pic, qui se dressait au sud de l’ouadi. Le fond de la vallée avait été transformé en lac artificiel au moyen d’un barrage. Les galeries d’exploitation de la mine sont basses et larges, avec de gros piliers de soutènement ménagés dans la roche. Les mineurs détachaient les blocs