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MICHEL

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Js., x, 240, t. xxx, col. 540 ; Adv. Eunom, , iii, 1, t. xxix, col. 656 ; S. Grégoire de Nazianze, Poem. dogm., vii, 13-26, t. xxxvji, col. 410 ; S. Jean Chrysostome, In Colos. , iii, 3, t. lxii, col. 322 : S. Cyrille d’Alexandrie, Cont. Jul., iv, t. lxxvi, col. 680 ; Théodoret, In Dan., x, 13, t. lxxxi, col. 1496 ; S. Hilaire, In Ps. cxxjx, 7, t. ix, col. 722 ; S. Jérôme, In Dan., x, t. xxy, col. 556 ; S. Augustin, In Ps, Lxxxrm, 3, t. xxxvii, col. 1121, etc. Cf. Petau, De angelis, II, viii, 10-15. La plupart d’entre eux s’appuient sur un texte du Deutéronome, xxxii, 8, où Moïse dit que « Dieu fixa les limites des peuples d’après le nombre des enfants d’Israël », ce que les Septante ont traduit : « d’après le nombre des anges, » ayant lu sans doute « fils de Dieu » au lieu de « fils d’Israël ». A ce texte ainsi compris en grec, plusieurs Pères, saint Basile, Théodoret, etc., joignent le texte de Daniel pour établir l’existence d’anges préposés à la surveillance et à la garde des peuples divers. Cf. Schabbath, 156.

2° Michel est appelé successivement « un des premiers chefs », puis « votre chef », par rapport au peuple auquel appartient Daniel, et enfin « le grand chef », au point de vue de la protection d’Israël. Il suit de là qu’il occupe un rang élevé dans la hiérarchie des anges et qu’il a été spécialement chargé par Dieu de prendre soin du peuple israélite. Aux yeux des Juifs cependant, le titre de « chef » donné à l’ange Michel n’empêchait pas que Dieu ne fût le chef direct et le protecteur immédiat d’Israël. Cf. Eccli., xvii, 14, 15 ; Targ. Jerus., sur Deut., xxxii ; Midrasch rabba, sur Deut., c. ii, etc. L’ange Michel est reconnu comme protecteur du peuple juif par Targ., sur Cant., viii, 9.

3° La vision de Daniel montre que les anges préposés à la garde des nations exercent activement leur ministère. L’ange de la Perse s’oppose pendant vingt et un jours à un dessein dont l’exécution paraît désirable, qui est cependant combattu par d’autres anges, et que l’ange Michel est seul à défendre. Ce dessein ne peut être que la délivrance du peuple israélite, annoncée dans cette vision du prophète. L’ange des Perses, puis celui des Grecs s’opposent à cette délivrance immédiate, parce que, croit saint Grégoire, Moral., XVII, xii, 17, t. lxxvi, col. 20, les Israélites n’ont pas encore suffisamment expié leurs fautes envers Dieu. Il y a lieu de penser que le châtiment d’Israël ne préoccupait pas exclusivement les deux anges des Perses et des Grecs, mais que ceux-ci voulaient prolonger le séjour des captifs au milieu de leurs vainqueurs, surtout à cause des avantages d’ordre moral qui en résultaient pour ces derniers. Cette discussion, qui dure de longs jours entre des anges chargés de peuples dont les intérêts sont différents, suppose que, pour ces anges, la volonté de Dieu reste mystérieuse dans le cas qui les intéresse. Chacun exerce alors son influence dans le sens qui lui paraît le plus conforme au bien. Sitôt la volonté de Dieu connue, tous s’inclinent, et c’est ainsi que l’ange Michel obtient la libération de son peuple. Cf. S. Grégoire, ibid. ; S. Thomas, Sum. theol., I", q. cxiii, a. 8 ; Petau, De mundi opific, IV, xiii, 16.

4° Le prophète Daniel est le premier à faire connaître les noms des deux anges Gabriel et Michel, et à attribuer à des anges la garde des nations. Ce dernier point n’est cependant pas sans analogie avec ce que la Sainte Ecriture raconte d’un bout à l’autre sur le rôle des^ariges vis-à-vis des hommes. Gen., xvi, 7 ; Num., xXn, 22 ; Jud., Il, 1 ; II Reg., xxiv, 16, etc. On a cherchée établir une relation de similitude entre les anges, gardiens des nations, et les génies intermédiaires admis par les Perses. Dans le système religieux de Zoroaslre, on trouve d’abord, au-dessous d’Ormuzd, six Ameshaspentas, génies supérieurs ou énergies qui président aux règnes et aux forces delà nature. Puis viennent des milliers de Yazatas, chargés de veiller dans le détail au jeu des organes du monde visible. Avec les derniers d’entre eux

se confondent presque les Fravashis ou nourriciers, sortes de génies féminins qui s’unissent à chaque homme pour le nourrir, combattre les démons et procurer la pratique et l’avènement du bien. Cf. J. Darmesteter, Lé Zend-Avesta, Paris, 1892-1893, t.i, p. 5-19, 23-25 ; t. ii, p. 296-322, 500-505. Alors même qu’il faudrait admettre un certain développement de Pangélologie hébraïque au contactdes doctrines perses, voirt.l, col. 590, une influence réelle serait ici difficile à prouver. Les Fravashis pourraient tout au plus être assimilés aux anges gardiens, avec cette différence essentielle que ces derniers sont de purs esprits qui ne s’unissent pas aux hommes. Quant aux Ameshaspentas et aux Yazatas, leur nature est assez mal définie et leur pouvoir ne s’étend que sur le monde matériel, tandis que les anges chargés des nations exercent leur tutelle sur des êtres raisonnables. Du reste, il est question des anges dans la Bible bien avant le contact avec les Perses, et, ni par leurs noms sémitiques ni par la nature de leurs fonctions, les anges bibliques ne dérivent des génies zoroastriens. Cf. de Broglie, Cours de l’hist. des cultes non chrétiens, Paris, 1881, p. 41 ; Lagrange, La religion des Perses, Paris, 1904, p. 50-51.

5° L’ange Michel est ordinairement compté parmi les sept anges qui se tiennent devant le Seigneur et dont il est plusieurs fois question. Tob., xii, 15 ; Apoc, i, 4 ; v, 6 ; viii, 2. Ces sept anges n’ont rien de commun avec les sept grands officiers des rois de Perse. Esth., i, 10 ; I Esd., vii, 14. L’histoire deTobie à pour théâtre l’Assyrie et non la Perse. Quant à saint Jean, il serait plus qu’arbitraire de rattacher ses inspirations à des usages perses. On sait aussi que les six Ameshaspentas sont parfois portés au nombre de sept par l’addition soit d’Ormuzd, soit d’un autre génie appelé Sraoscha. Cf. Darmesteter, Le Zend-Avesta, t. i, p. 357-372. Avec ces génies, les sept anges n’ont guère de commun que leur nombre ; or, le nombre sept était un des nombres sacrés et symboliques des Hébreux dès l’origine. Gen., XXI, 30 ; Exod., xii, 15 ; xx, 10 ; Lev., xxiii, 18, etc. Lés rapports sont donc trop superficiels entre les idées zoroastriennes et les données bibliques sur les anges, pour que l’on puisse admettre logiquement une influence directe des premières sur les secondes. Du reste, sur une question fondamentale, l’Écriture donne une solution très antérieure et très supérieure à celle de Zoroastre. Pour ce dernier, Ormuzd et Ahriman sont deux personnifications du bien et du mal, indépendantes l’une de l’autre et limitant mutuellement leur puissance. Dans la Bible, Jéhovah est le créateur tout-puissant, et Satan, le prince du mal, n’est qu’un être créé et subordonné. Job, 1, 12 ; il, 6 ; cf. Gen., iii, 14, 15.

II. L’Épître de saint Jude. — Parlant du démon, à l’occasion de ceux qui vivent dans l’immoralité, saint Jude, 9, s’exprime ainsi : « L’archange Michel lui-même, lorsqu’il contestait avec le diable et lui disputait le corps de Moïse, n’osa pas porter contre lui une sentence d’exécration, mais il se contenta de dire : Que le Seigneur te corrige ! » La Vulgate emploie ici le verbe imperet : « Que le Seigneur te commande ! » Le grec a le verbe ÊTceTi|13v, « blâmer » et « infliger » la peine due à un forfait. L’apostrophe est empruntée à Zacharie, iii, 2, : îg l ar Yehôvdh bekâ, « que Jéhovah te reproche, » te contraigne ; Septante : èjctTi|J.T|<Tai xiipto ; èv <rot ; Vulgate : increpet Dominus in te.

1° Michel est qualifié d’archange, àpxâxyi^at, nom qui correspond aux titres de « l’un des premiers chefs » ou de « grand chef » qui lui sont donnés par Daniel. Voir Archange, t. i, col. 911. Dans la classification théo- «  logique, les archanges n’occupent que le huitième rang de la hiérarchie angélique, et Michel appartient à cet ordre. Cf. Pseudo-Denys, De cœlest. hierarch., IX, 2, t. iii, coi. 259. Les titres qui lui sont attribués n’auraient donc qu’une valeur relative. Néanmoins, sons le nom