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MIGHÉE (LE LIVRE DE)


blés, vii, 1-14 ; Dieu se laisse toucher et promette retour d’Israël, et une gloire bien plus grande que celle des autres peuples, ꝟ. 15-17 ; enfin il termine en louant la bonté et 1^ miséricorde de Dieu, ꝟ. 18-20. — Sous le rapport des événements ou de l’objet des prophéties, Michée prédit : l’invasion de Salmanasar, i, 6-8 (cf. IV Reg., xvii, 4-6) ; celle de Sennachérib, i, 9-16 (cf. IV Reg., xviii, 13) ; la destruction de Jérusalem, iii, 12 ; vu, 13 ; la captivité de Babylone, iv, 10, et le retour, iv, 1-8 ; vii, 11 ; l’établissement du royaume messianique, iv, 8, et la gloire de Bethléhem, v, 2.

II. Authenticité. — L’authenticité de la prophétie de Michée en général n’a jamais été niée ni contestée ; deux preuves surtout l’établissent : 1° la citation qu’en fait Jérémie, xxvi, 18 ; 2° les rapports qui existent entre Michée et Isale, son contemporain. En voici quelques exemples : Mich., ii, 11, et Is., xxviii, 7 ; Mich., m r 5-7, et Is., xxtx, 9-12 ; Mich., iii, 12, et Is., xxxii, 13-14 ; Mich., iv, 1-5, et Is., ii, 2-5 ; Mich., v, 2-4, et Is., vii, 14 ; vin, 9-15.

III. Intégrité. — La critique, par une minutieuse dissection du texte, a plutôt dirigé ses attaques contre l’intégrité. Tous les chapitres ont été soumis à l’examen le plus rigoureux. Pour procéder avec ordre, nous diviserons cette matière en trois points.

I. chapitres i-ni. — La prophétie de la fin de la captivité de Juda, ii, 12-13, a été attribuée par Stade et Kuenen à un auteur contemporain de l’exil, et par Wellhausen à un auteur postexilien ; la raison, c’est que, d’après eux, ce passage ne s’enchaîne nullement à ii, 11.

— Mais, comme le fait remarquer Driver, Introd., p. 328, cette hypothèse ne repose sur aucun fondement solide. L’idée de dévastation ou d’exil se trouve déjà énoncée dans i, 16k ; ii, 4, 5, et reviendra dans iii, 12 ; de plus ii, 12-13 a son parallélisme dans IV, 6-7 ; enfin la préservation d’un petit « reste » avait déjà été annoncée bien avant par Amos, ix, 8-9 ; cf. aussi Ose., xi, 11. Ce qu’on peut dire c’est que ii, 12-13 n’est peut-être pas à sa place naturelle.

il. cBAPirnss iv-v. — Wellhausen regarde ces deux chapitres qui traitent de la gloire du Messie et du Messie lui-même, comme un appendice ajouté à iii, 12 par une main postérieure ; il pense cependant qu’ils contiennent des paroles de Michée, comme v, 10-14, et probablement iv, 9-10, excepté dans le ꝟ. 10, ce qu’on appelle « la clause babylonienne », c’est-à-dire les mots « et tu viendras jusqu’à Babylone ». Cheyne paraît être du même avis. — Le rejet en bloc de ces deux chapitres n’est pas possible, car la critique interne remarque que le style est le même que celui du reste de la prophétie.

— C’est pourquoi d’autres critiques ont été plus modérés : Stade, dans la Zeitschrift fiir die Alttest. Wissenschaft ^SSi, p. 165 ; 1883, p. 1 ; 1884, p. 291, regarde.’iv, 1-3, 11-13 ; v, 1-4, 7-15, comme des additions postexiliennes, destinées à atténuer, par une perspective d’espérance, le sombre tableau de iii, 12 ; ces passages auraient cependant été regardés comme l’œuvre de Michée lui-même, et dans cette persuasion, une main plus récente y aurait ajouté iv, 5-10 ; v, 5-6. Kuenen, a critiqué cette opinion, s’appuyant sur cette raison que la perspective historique n’est pas la même dans les deux chapitres ; il croit toutefois que certaines parties supposent encore l’existence de la monarchie ; conséquemment il n’assigne à un auteur exilien ou postexilien que iv, 6-8 (supposant l’exil de Babylone), 10 (la clause babylonienne), 11-13 (qui supposerait la période assyrienne et rappellerait la défaite des ennemis imaginaires d’Ézéchiel, xxviii-xxix, et de Zach., xii, 14), et peut-être l’allusion aux Astarthês (Vulgate : luci, « bois sacrés » ), v, 13-14. — W. R. Smith et Nowack, dans la Zeitschrift fur die Alttest. Wissenschaft, 1884, p. 285, regardent iv, 11-13, comme une addition postérieure. Driver, Introd., p. 330, tout en reconnaissant que les raisons de ces deux critiques

ne manquent pas d’une certaine force, remarque cependant qu’elles ne sont pas décisives ; car les prophètes, dans leurs descriptions de l’avenir, ne sont pas toujours cohérents avec eux-mêmes (cf. par exemple, Is., iii, 25-26 et xxix, 5-8). De plus iv, 11-13, peut ne pas être de la même époque que iii, 12 et iv, 9-10, et par conséquent refléter une nouvelle phase des conceptions de Michée. Toutefois, le même auteur regarde comme une glose marginale la « clause babylonienne », iv, 10, parce qu’elle serait incompatible avec la victoire promise aux Juifs, iv, 11-13, et le ton général de v, 2-6. Toutes ces objections ne reposent au fond, comme on le voit, que sur la négation à priori de l’inspiration prophétique.

i/l. chapitres vi-vn. — Ces deux chapitres, qui contiennent un dialogue entre Dieu et son peuple, ont été intégralement attribués par Ewald à un prophète écrivant au temps de Manassé. Ce critique s’appuie sur les différences qu’on remarqne entre i-v et vi-vii : 1° Dans i-v, Michée ne s’élève que contre les chefs de la nation, tandis que les chapitres vi-vii, englobent dans leurs récriminations le peuple tout entier ; 2° dans VI, 16, les mots : « Les ordres d’Amri et toute œuvre de la maison d’Achab, » se rapportent directement au temps de Manassé ; 3° les différences de style sont sensibles : vi-vii est dramatique dans ses peintures ; la prophétie se déroule entre interlocuteurs, ce quiest étranger aux prophètes ; le ton élégiaque se rapproche de Jérémie. Wellhausen, Einleitung de Bleek, 4e édit., p. 425, admet les conclusions d’Ewald, sauf pour vii, 7-20, qu’il regarde comme une addition postexilienne ; Giesebrecht, Beitràge, 1890, p. 216, qui se range à cette opinion, s’appuie sur deux raisons : 1° l’état décrit dans vu, 7-20, est tout à fait différent de celui qui est décrit dans vii, 1-6 ; 2° vii, 7-20 aune grande ressemblance avec Is., XL-LXvl. Mais, remarque Driver, Introd., p. 334. ces deux arguments ne sont pas démonstratifs : le contraste entre vii, 7-20, et vii, 1-6, est réel et suppose un Intervalle d’au moins un siècle entre les deux situations ; mais le prophète décrit deux situations différentes, et d’autre part Je temps n’est rien dans la représentation prophétique ; quant à la ressemblance avec Is., xl-lxvi, elle est aussi sensible, comme le montra le tableau suivant : Mich., vii, 8 b, 9 b, et Is., xlii, 16 ; lxii, V> ; Mich., vii, 9 a, et Is., xlii, 24, 25 ; lxiv, 5t-Mich. , vii, 10, et Is., xlix, 25, 26 ; li, 23 ; Mich., vii, 11, et Is., lviii, 12 ; Mich., vii, 12, et Is., xliii, 5-16 ; xux, 12 ; Mich., vii, 14, et Is., lxiii, 17 b ; lxiv, 9 ; lxv, 9, 10 (cf. Jer., l, 19) ; Mich., vii, 15, et Is., xli, 18 ; xliii, 1617 ; xlvhi, 21 ; Mich., vii, 16-17, et Is., xlv, 14 ; liv, 15 ; Mich., vii, 18-20, et Is., xliii, 25 ; xliv, 22 ; liv, 8-9 ; lv, 7 b ; toutefois Mich., vii, 7-20, ne contient aucune de ces claires allusions à l’exil, comme on en trouve dans Is., xl-lxvi. Il faut ajouter que la mention de l’Assyrie plutôt que de Babylone dans Mich., vii, 12, et l’emploi, vu, 15, du mot -.Misrâîm, pour désigner l’Egypte, qu’on ne trouve que dans Is., xix, 6 ; xxxvii, 2 (cf. IV Reg., xix, 24), sont en faveur de l’authenticité des chapitres vi-vm.

IV. CaNonicité. — La canonicité de la prophétie de Michée n’a jamais été contestée ; elle a toujours fait partie du Canon juif ou chrétien. Voir Canon, t. ii, col. 138-167. Les Pères ont cité Michée comme Écriture canonique. Cf. Kilber, Analysis biblica, édit. Tailhan, in-8°, Paris, 1856, t. i, p. 499^500.

V. Texte, style et langue. — Le texte original est l’hébreu. La prophétie de Michée se trouve dans toutes les versions. Elle se distingue par l’élévation des pensées et la beauté des expressions. Ce qui caractérise le style de Michée, ce sont des jeux de mots, ce qui est d’ailleurs commun à tous les écrivains orientaux, Mich., i, 10-15 ; vi, 11 ; des images et des comparaisons pittoresques, Mich., i, 16 ; H, 12-13 ; iv, 9-10 ; des transitions brusques. Mich., iii, 12-iv, l ; iv, 9-11 ; vii, ll-12. La prophétie, iv, 1-3,