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MERCENAIRE — MERCURE


mercenaire envisageait surtout son gain ; son dévouement n’égalait pas celui du propriétaire qui travaille pour son avantage personnel. Joa., x, 12, 13. Dans ce passage, Notre-Seigneur compare le faux pasteur au mercenaire qui ne sait pas donner sa vie pour son troupeau.

II. Soldats. — Au temps des Juges, Abimélech employa soixante-dix sicles d’argent à se constituer un corps de misérables et de gens prêts à tout pour l’aider dans ses projets ambitieux. Jud., ix, 4. Sur les mercenaires engagés dans l’armée à l’époque d’Amasias, IV Reg., viii, 2022 ; II Par., xxv, 6, et sous les Machabées, voir Armée chez les Hébreux, 1. 1, col. 981. Pour se défendre contre David, les Ammonites enrôlèrent des mercenaires recrutés en Syrie et dans les pays voisins. II Reg., x, 6 ; I Par., xix, 6, 7. Pendant que Bénadad, roi de Syrie, assiégeait Samarie, son armée, prise de panique, s’imagina que les Israélites avaient pris à leur solde des troupes héthéennes et égyptiennes, et elle prit la fuite. IV Reg., vii, 6. Jérémie, xlvi, 21, prédisant l’invasion de l’Egypte par Nabuchodonosor, dit : « Ses mercenaires sont au milieu d’elle comme des veaux engraissés ; eux aussi, ils tournent le dos et fuient sans résistance. » La décadence de l’esprit militaire s’était en effet accentuée chez les Égyptiens depuis les derniers Ramessides. Dès la xxie dynastie, « les mercenaires constituaient la portion la plus effective et la plus vivace des armées pharaoniques. » Cf. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, t. ii, 1897, p. 765-768. Ces mercenaires étaient des Libyens, qui envahirent ainsi peu à peu la vallée du Nil, y reçurent une haute solde, se firent une vie facile et large et devinrent à la longue les maîtres de leurs maîtres. À la veille de l’invasion chaldéenne, Apriès avait dû recourir aux mercenaires étrangers. Cf. Hérodote, ii, 163. Amasis, qui lui succéda après l’avoir détrôné et eut à subir le choc des Chaldéens, ne put le faire qu’à l’aide des mercenaires. Cf. Maspero, Hist. anc., t. iii, 1899, p. 554-558.

Le général syrien, Timothée, prit avec lui des mercenaires arabes pour attaquer Judas Machabée. I Mach., v, 39. Antiochus Eupator avait aussi des armées mercenaires, utrôwraf, conductitii, 1 Mach., yi, 29. Dans les armées grecques et les armées romaines, tous les soldats étaient mercenaires, en ce sens qu’ils touchaient une solde. Les auxiliaires romains qui servaient en j Palestine à l’époque évangélique se trouvaient naturellement dans ce cas. C’est pourquoi saint Jean-Baptiste les exhortait à se contenter de leur solde. Luc, iii, 14.

H. Lesêtre.
    1. MERCURE##

MERCURE (grec : ’Epiir, ?), un des douze grands dieux de l’Olympe grec (iig. 262). — 1° Il est nommé dans les Actes, xiv, 11 (12). D’après la mythologie, il était fils de Jupiter et de Maïa, fille d’Atlas. Il accompagnait ordinairement son père Jupiter dans ses courses sur la terre, par exemple lorsque l’un et l’autre reçurent en Phrygie l’hospitalité de Philémon et de Beaucis. Ovide, Metam., viii, 620-724. Cf. Fast., v, 495. Ce conte était populaire en Asie Mineure et c’est là sans doute ce qui porta les habitants de Lystre en Lycaonie à s’imaginer que ces deux divinités leur apparaissaient en la personne de Paul et de Barnabe. À la vue d’un paralytique de naissance, qui n’avait jamais marché, et qui fut guéri miraculeusement par saint Paul, la foule émerveillée s’écria en lycaonien : « Les dieux se sont faits semblables aux hommes et ils sont descendus au milieu de nous. » Act., xiv, 10. Ils prirent donc les deux apôtres pour Jupiter et Mercure. Ce dernier, d’après la mythologie, était le messager des dieux, Homère, Odyss., v, 28 ; Hymn. in Herm., 3, et de Jupiter, Odyss., i, 38, 84 ; lliad., xxiv, 333, le dieu de l’éloquence, Odyss., i, 86 ; Horace, Od., i, x, 1 ; ©sô ; ô tûv Xéycov ï|-re[iwv, dit Jamblique. Cf. Roscher, Lexikon, t. i, col. 2362, 2388. Paul ayant porté la parole en cette circonstance devint Mercure à leurs yeux et son compagnon fut Jupiter. On voulut donc les honorer en cette

qualité et leur offrir un sacrifice de taureaux selon les rites païens, ce que les deux missionnaires ne purent empêcher qu’à grand’peine. Act., xiv, 11-17. — Mercure était communément représenté comme un jeune homme élancé et imberbe. C’est à tort que quelques commentateurs ont essayé de se représenter ce qu’était physiquement saint Paul en supposant que les Lystriens avaient dû trouver quelque ressemblance entre sa personne et les statues du dieu. L’Apôtre n’avait ni caducée, ni pétase, ni ailes aux talons, comme le dieu grec. Il fut simplement considéré comme le porte-parole de son compagnon et pris à ce titre pour le dieu Hermès, qu’on qualifiait d’ippuiveûî, interpres Divum. Virgile, Mneid., iv, 356. Cf. W. H. Roscher, Ausfûhrliches Leocikon der griechischen und rômischen Mythologie, Leipzig, t. i, 1884-1890, col. 2342-2432 ; cf. t. ii, col. 2802-2834.

2° Le pétase, nétairoç, chapeau à larges bords dont était coiffé Mercure, apparaît dans II Mach., iv, 12, dans une locution grecque (la Vulgate a traduit par fornix) qui signifie que le grand-prêtre hellénisant Jason (voir Jason 4, t. iii, col. 1141), ayant établi un gymnase à la

262. — Zeus et Hermès. Vase peint. D’après Gerhard, Etrusk Vasen, pi. viii, p. 10.

façon des Grecs, à Jérusalem, « y convoquait les jeunes gens aux exercices gymnastiques. » Cela se disait en grec, >iit> icéiaoov ^ev, parce que le dieu du pétase était le modèle et le protecteur des gymnastes. Cf., sur II Mach., iv, 12, J. Frd. Schleusner, Novus Thésaurus Veteris Testamenti, 1820, t. iv, p. 327.

3° Le dieu Mercure est nommé dans la Vulgate, dans le livre des Proverbes, xxvi, 8. Là où le texte hébreu porte :

C’est attacher une pierre à une fronde Que de rendre des honneurs à un insensé,

La Vulgate dit :

Comme celui qui jette une pierre dans le monceau de Mercure (acervus Mercurii),

Ainsi est celui qui rend honneur à un insensé.

h’acervus Mercurii était un tas de pierres. Nous lisons dans le Liber Glossarum publié dans les Œuvres de saint Isidore de Séville, t. Lxxxm, col. 1360, Mercurius, lapidum congeries in cacumine collium. Cf. Macri, Hierolexikon, 6e édit., 2 in-4°, Bologne, 1765-1767, au mot Acervus Mercurii, t. i, p. 11-12. Saint Jérôme a donc rendu le sens de l’hébreu par une sorte de proverbe latin : honorer un insensé est aussi déraisonnable* que de jeter une pierre dans un tas de pierres, comme qui dirait : jeter une goutte d’eau dans une rivière. Les Septante et la Peschito ont traduit l’hébreu (margêmâh)