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    1. MATTHIEU##

MATTHIEU (ÉVANGILE DE SAINT)

s’enchaînent pas logiquement ; plusieurs se retrouvent en saint Marc et en saint Luc au même moment, mais dans des occasions différentes. Le discours est donc probablement formé, comme les précédents, de morceaux divers, dont le caractère collectif serait encore indiqué par la formule plurielle de la transition, xix, 1. — 3° section, Jésus quitte la Galilée et se dirige par la Pérée vers Jérusalem, xix, 1-xx, 34. Le début de cette section est nettement marqué dans l’Évangile. Abandonnant définitivement le pays de Galilée qu’il avait évangélisé jusqu’ici, Jésus passe le Jourdain ; il guérit des malades, discute avec les pharisiens sur l’indissolubilité du mariage et recommande à ses disciples la virginité, xix, 1-12 ; il bénit les petits enfants, xix, 1315 ; il s’entretient avec un jeune homme riche et expose à ses disciples les dangers des richesses et les avantages du renoncement, xix, 16-30 ; il prononce la parabole des ouvriers envoyés à la vigne, xx, 1-16 ; il annonce en secret aux seuls apôtres sa passion et sa résurrection, xx, 17-19 ; il répondà la demande indiscrète de la mère de Jacques et de Jean, xx, 20-28, et enfin il guérit deux aveugles à Jéricho, xx, 29-34.

3° La troisième partie, xxi, 1-xxviii, 20, raconte la passion et la résurrection plusieurs fois prédites. On peut la subdiviser en (rois sections. — 1™ section, xxi, 1-xxv, 46. Elle renferme une série de faits détachés, qui se produisent dans les premiers jours de la dernière semaine : l’entrée triomphale de Jésus à Jérusalem et l’expulsion des vendeurs du temple, xxi, 1-17 ; la malédiction du figuier stérile, xxi, 18-22 ; l’interrogation faite à Jésus par les membres du sanhédrin, xxi, 23-27 ; la parabole des deux fils, xxr, 28-32 ; celle des vignerons, xxi, 33-46 ; celle des noces du fils du roi, xxii, 1-14 ; Jésus réfute les pharisiens et les hérodiens, qui le questionnent au sujet de l’impôt, xxii, 15-22 ; puis les sadducéens à propos de la résurrection, xxii, 23-33 ; les pharisiens reprennent l’offensive et un docteur interroge Jésus sur le premier des commandements, xxii, 34-40 ; le Sauveur réduit tous les pharisiens au silence sur le Messie, fils de David, xxii, 41-46. S’adressant ensuite à la foule et à ses disciples, il blâme sévèrement les scribes et les pharisiens et les maudit, xxiii, 1-39. Sortant du temple et interrogé par ses disciples, il leur fait, au sommet du mont des Oliviers, un grand discours sur ce qui arrivera entre sa mort et sa seconde venue, sur la ruine de Jérusalem et sur la fin du monde, xxiv, 1-41 ; il y ajoute des conseils de vigilance, xxiv, 42-51, qui sont suivis de la parabole des dix vierges, xxv, 1-13, de celle des talents, xxv, 14-30, et de la description du jugement dernier, xxv, 31-46. Ce discours semble encore formé de morceaux différents, groupés par l’évangéliste, comme l’insinue de nouveau le pluriel : « tous ces discours, » xxvi, 1. — 2e section, la passion, xxvi, 1-xxvii, 66. Jésus annonce aux disciples qu’il sera crucifié deux jours plus tard, xxvi, 1, 2 ; les sanhédrites trament sa mort, xxvi, 3-5 ; à Béthanie, une femme pécheresse oint Jésus, xxvi, 6-13 ; Judas trahit son maître, xxvi, 14-16 ; préparatifs de la Pàque et la dernière cène, xxvi, 17-29 ; prédiction du reniement de Pierre, xxvi, 30-35 ; l’agonie à Gethsémani, xxvi, 3646 ; Jésus est arrêté et conduit devant le sanhédrin, xxvi, 47-68 ; triple reniement de Pierre, xxvi, 69-75 ; Jésus conduit à Pilate, xxvii, 1-2 ; désespoir de Judas, xxvii, 3-10 ; comparution de Jésus devant Pilate, xxvii, 11-26 ; livré aux soldats, Jésus est mené au Calvaire et y est crucifié, xxvii, 27-44 ; circonstances de sa mort, xxvii, 45-56 ; sa sépulture et une garde est placée au tombeau, xxvii, 57-66. — 3e section, la résurrection, xxviii, 1-20. Jésus ressuscité apparaît aux femmes qui venaient visiter son tombeau, xxviii, 1-10 ; les prêtres juifs répandent le faux bruit que les disciples, après avoir soudoyé les gardes, ont enlevé de’nuit le corps de leur Maître, xxviii, 11-15 ; Jésus apparaît aux onze en Galilée et les

envoie prêcher et baptiser dans le monde entier, xxviii, 16-20.

IV. Date. — Les critiques sur ce point sont en désaccord parce que les témoignages des Pères ne sont pas convergents et qu’on tire des conclusions différentes des critères internes. — 1° Données patrisliques. — Le sentiment général des anciens est que l’Évangile de saint Matthieu à été composé le premier des quatre récits évangéliques. S. Irénée, Cont. hœ>, iii, 1, t. vii, col. 844 ; Clément d’Alexandrie, cité par Eusèbe, H. E., w, 14, t. xx, col. 552 ; Origène, In Matth., tom. i, t. xiii, col. 829, qui invoque la tradition antérieure ; Eusèbe, H. E., iii, 24, t. xx, col. 265 ; S. Épiphane, flser. u> 5, t. xii, col. 393 ; S. Jérôme, De vir. M., 3, t. xxiii, col. 613 ; S. Augustin, De consens. Evangelist., i, 2, t. xxxiv, col. 1043 ; S. Jean Chrysostome, In Matth. Hom. iv, 1, t. lvii, col. 39. De cette première donnée l’on pourrait déduire approximativement la date du premier Évangile par comparaison avec celle du second. Voir Marc 2, col. 737. Quelques-uns de ces Pères, Eusèbe, loc. cit., ajoutent que saint Matthieu a rédigé son Évangile avant de quitter la Palestine pour aller convertir les païens. Or des critiques d’écoles et de tendances différentes fixent cette daté à l’an 42. Voir col. 875. Mais saint Irénée, Cont. hœr., iii, 1, t. vii, col. 844-845, tout en plaçant l’Évangile de saint Matthieu en tête des quatre Évangiles canoniques, semble reculer la date de sa composition à l’époque où saint Pierre et saint Paul se trouvaient ensemble à Rome : ’O (xév &t Maxfiato ; Iv toî ; ’Eëpaîoiç tÎ). tfit’a fiiaXévtxw aùrâv xeà fpaqwiv Hr^îyv.VJ EicffytV.ov, toO IJÉTpou xai to0 IlavXou Iv’Pw|ji ?) £ÙaYYsXt ! |o|Jilv(i>v y.at 6e|ieX[oûv™v triv’ExxXr)fffav. Il semble reporter aussi la rédaction du second Évangile après la mort de ces deux Apôtres. Voir Marc, col. 737. Or saint Pierre et saint Paul n’ont pu se trouver ensemble à Rome qu’après l’an 61. La composition du premier Évangile serait donc postérieure à cette dernière date. Par suite, il s’est produit parmi les critiques qui tiennent compte de la tradition deux courants d’opinion. Les uns se rangent à l’autorité, selon eux décisive, du témoignage de saint Irénée, qui est bien fondé et n’a jamais été expressément contredit, et ils reculent la composition de saint Matthieu à l’époque du commun séjour de saint Pierre et de saint Paul à Rome, entre 61 et 67. Les autres suivent la majorité des Pères et s’efforcent de concilier avec leur sentiment le témoignage divergent de saint Irénée. Quelques-uns ont pensé que saint Irénée indiquait la date de la version grecque du texte araméen de saint Matthieu. Mais cette interprétation est contraire aux paroles de l’évêque de Lyon qui dit expressément que saint Matthieu a rédigé son récit évangélique dans l’idiome des Hébreux. Quelques autres ont fait remarquer avec plus de vraisemblance que le génitif absolu, toù nèrpou xàl toû IlaûXou èv "P<i|j17) EÙayYsXiÇoiJiivcûV xai ÔejjieXioijvtwv de la phrase d’Irénée ne signifiait pas la simultanéité des travaux du premier évangéliste et des deux apôtres Pierre et Paul, mais seulement la différence des lieux (Palestine et Rome) et de la nature (écrit et prédication orale) de leurs travaux. D’ailleurs le texte de l’évêque de Lyon nous est parvenu incomplet et en mauvais état. La première phrase, qui n’est conservée qu’en latin, est inachevée et ne présente pas un sens clair. La phrase grecque concernant saint Matthieu, la suit immédiatement et contient un xaî qui ne répond rien de ce qui précède. Il y aurait donc un membre de phrase à suppléer. Le P. Cornely propose :-cà ûit’aÙToO xipvff<r<i|ieva ifoatyz xa’i… Ces mots établiraient un contraste entre le premier évangéliste qui a rédigé par écrit sa prédication et les deux suivants qui ont écrit d’après saint Pierre et d’après saint Paul. Quoi qu’il en soit, il semble qu’on ne puisse pas tirer d’un texte obscur et imparfait une conclusion ferme et certaine. Cf. A. Camerlynck, Saint Irénée et le canon du N. T., Louvain, 1896, p. 27-31. —