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MARIE-MADELEINE

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pouvait être la résidence habituelle de Marie, de Marthe et de Lazare, sans empêcher les deux sœurs d’avoir une maison dans un autre bourg, en Galilée. Si d’autre part on observe que saint Luc, ix, 44-xix, 40, raconte tout d’un trait le dernier voyage de Nôtre-Seigneur de la Galilée à Jérusalem, il est difficile de placer à Bëthanie, par conséquent au terme du voyage, un épisode qui, dans le récit de l’évangéliste, vient presque au commencement et a dû se passer en Galilée. Ou bien il ne faut tenir aucun compte de l’ordre que saint Luc, i, 3, déclare avoir mis dans son récit et admettre que l’écrivain sacré, qui ailleurs nomme deux fois Béthanie, ’xix, 29 ; xxiv, 50, a ici des raisons pour ne le désigner que par une vague appellation. Ces remarques ont, ce semble, plus de poids que celles qu’on met en avant pour identifier avec Béthanie le bourg dont il est ici question. — 2. Marthe reçut dans sa maison le Sauveur et son cortège, et pendant qu’elle se multipliait pour tout préparer, sa sœur, Marie, se tenait aux pieds du Sauveur et l’écoutait. Sur une observation de Marthe, le Sauveur dit de Marie : « Elle a choisi la bonne part, ttjv âfafi-rjv (j-epi’Sa, optimam partem, qui ne lui sera pas ôtée. » Luc., x, 38-42. Cette bonne part, la part par excellence, c’est celle qui consiste à écouter le Sauveur, à recevoir ses lumières, à méditer ses enseignements, à vivre de sa grâce. Voir Marthe.

2° La résurrection de Lazare. — 1. Lazare n’était pas avec ses deux sœurs dans le bourg de Galilée où s’arrêta Notre-Seigneur. Quand celles-ci furent revenues à Béthanie, leur frère tomba dangereusement malade. Saint Jean, xi, 2, dit ici que « Marie était celle qui oignit le Seigneur avec le parfum et lui essuya les pieds avec ses cheveux ». — 2. Les deux sœurs envoyèrent avertir Notre-Seigneur de la maladie de leur frère. Plusieurs jours après, le Sauveur arriva quand le malade était mort depuis quatre jours. Marthe alla au-devant de lui. Marie silencieuse et contemplative, telle qu’elle s’était montrée dans la précédente rencontre, était demeurée à la maison. Informée par sa sœur de la présence de Jésus, elle alla à lui aussitôt et, se jetant à ses genoux, elle lui répéta les mêmes paroles que Marthe : « Seigneur, si vous aviez été ici, mon frère ne serait pas mort. » Les larmes de Marie et celles de tous les Juifs qui se trouvaient là émurent le Sauveur, qui alors ressuscita Lazare. Joa., xi, 1-44.

3° Le festin de Béthanie.

1. Quelque temps après cette résurrection, six jours seulement avant la Pâque, Simon le lépreux, de Béthanie, offrit un festin à Notre-Seigneur. Lazare fut au nombre des convives. Marthe servait, c’est-à-dire présidait au service ; car elle se trouvait dans une maison amie et les femmes ne prenaient pas ordinairement part au festin, surtout avec des docteurs juifs. Pendant le repas, une femme que saint Matthieu, xxvl, 7, et saint Marc, xiv, 3, ne nomment pas, mais que saint Jean, xii, 3, appelle Marie, entra avec un vase de parfum précieux, le brisa, en répandit le contenu sur la tête et sur les pieds du Sauveur, et essuya ses pieds avec ses cheveux. C’était, de la part de Marie, le même silence discret, la même générosité et le même amour que dans la première onction. Mais cette fois la pécheresse pardonnée, comblée de nouveaux bienfaits et admise dans l’intimité du divin Maître, s’enhardissait jusqu’à répandre son parfum sur la tête même de celui qu’elle vénérait. Quelques assistants, Judas surtout, murmurèrent de ce qu’ils tenaient pour une profusion inutile. Notre-Seigneur leur dit : « Pourquoi êtes-vous désagréables à cette femme ? Ce qu’elle a fait pour moi est bien. En répandant ce parfum sur mon corps, elle a préludé à ma sépulture. Je vous le dis en vérité, partout où sera prêché cet évangile, dans le monde entier, xrn racontera à sa louange ee qu’elle a fait. » Matth., xxvj, 6-13 ; Marc, xiv, 3-9 ; , Joa., xii, 1-11. Saint Matthieu et saint Luc racontent ce 1 festin après avoir dit qu’on était à deux jours de la

; Pâque. Matth., xxvi, 2 ; Marc, xiv, 1. Mais l’indication  précise fournie par saint Jean, xii, 1, autorise à penser

que les deux premiers évangélistes ont assigné cette place à leur récit non pour qu’il soit commandé par la date qui précède et qui se rapporte au complot des princes des prêtres, mais pour le rattacher à ce qu’ils disent immédiatement après du marché conclu par Judas.

2. Après s’être demandé, à la suite de quelques autres, si le récit des quatre évangélistes ne se rapporterait pas au même fait, saint Ambroise, Evang. sec. Luc., vi, 12-30, t. xv, col. 1671-1676, commente le récit de saint Luc en y mêlant les traits particuliers aux autres évangélistes, comme s’il n’y avait eu qu’un seul repas et une seule onction. Depuis lors, un certain nombre d’auteurs ont affirmé l’identité des deux récits. A y regarder de près, on n’y voit de commun que le nom de l’hôte, Simon, le repas et l’onction. Toutes les circonstances diffèrent. On a d’un côté une pécheresse, de l’autre Marie, sœur de Marthe, désignée par son nom ; d’un côté, une onction sur les pieds, de l’autre une onction sur les pieds et sur la tête ; d’un côté un vase dont on répand le contenu, de l’autre un vase qu’on brise ; d’un côté, un murmure intérieur de Simon sur l’accueil fait par Jésus à l’acte d’une pécheresse, dé l’autre un murmure formulé à voix haute par Judas et des disciples sur la prodigalité de Marie ; d’un côté une parabole adressée à Simon et la rémission des péchés accordée à la pécheresse, de l’autre des observations aux disciples et des éloges à Marie. De plus, le premier Simon est un pharisien, le second un lépreux guéri. Le nom de Simon était si commun chez les Juifs que, sur douze Apôtres, deux le portaient. On ne doit donc guère s’étonner qu’il y ait eu un Simon invitant Notre-Seigneur en Galilée plus d’un ah avant sa mort, et un autre lui offrant un repas à Béthanie six jours avant sa mort. Enfin saint Jean, xi, 2, suppose deux onctions de Marie et il est excessif de dire avec Faillon, Monuments inédits sur l’apostolat de sainte Marie-Madeleine, Paris, 1865, t. i, p. 64, qu’on ne peut nier l’unité des deux onctions sans mériter une censure théologique.

III. Marie-Madeleine.

1° À la suite du Sauveur.

Marie-Madeleine apparaît pour la première fois parmi les saintes femmes qui accompagnaient le Sauveur dans ses courses apostoliques et le servaient à l’aide de leurs propres ressources. C’étaient donc des personnes do quelque aisance. La première nommée est « Marie, qui est appelée Madeleine », Magdalena, et qui devait très probablement son nom à la ville de Magdala, sur la côte occidentale du lac de Tibériade, voir Magdala, col. 539, soit qu’elle y fût née, soit qu’elle y habitât depuis longtemps et y fût bien connue. Saint Luc achève de la qualifier en disant « de qui sept démons étaient sortis ». Elle n’était pas seule dans ce cas ; car les quelques femmes qui accompagnaient ainsi le Sauveur « avaient été guéries d’esprits malins et de maladies ». Luc, viii, 2. C’est évidemment Notre-Seigneur qui les avait guéries, Marc, xvi, 9, et la reconnaissance inspirait leur dévouement. De ce que Marie-Madeleine avait été possédée de sept démons, il ne suit pas nécessairement qu’elle avait été pleine de vices, comme le croit saint Grégoire. Hom. in Evang., xxxiii, 1, t. lxxvi, col. 1239. La possession du démon pouvait à la rigueur s’expliquer par d’autres causes que le péché. Le Talmud réprésente Marie-Madeleine comme mariée d’abord à un Juif, Pappus ben Juda, qu’elle aurait abandonné pour suivre un officier d’Hérode Antipas, nommé Panther, et résidant à Magdala. i Ailleurs, il la traite de satda, « adultère, » et dit qu’elle était magdila, c’est-à-dire pliant des cheveux de femme. Cf. Lightfoot, Horse hebraicçe in Matth., xxvii, 56 ; in Luc., viii, 2 ; Buxtorf, Lexicon chald. talmud., p. 389, I 1459. On ne peut ajouter grande foi à ces renseigne’