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MANAHEN — MANASSÉ


educat. pueror., 6, édit. Didot, Script, moral., t. i, p. 4. C’est ainsi qu’avait fait Salomon pour son fils Roboam. III Reg., xii, 10. D’après d’autres, Manahen, au lieu d’être fils de la nourrice d’Hérode Antipas et son frère de lait, était donc simplement son ami d’enfance. Entre ces deux opinions, il est impossible de se prononcer avec certitude. — Quoi qu’il en soit, la Providence, en faisant élever Manahen avec un des fils d’Hérode le Grand, l’avait ainsi préparé à devenir un des docteurs de son Église. Il devait avoir une cinquantaine d’années lorsque se passa l’événement raconté dans les Actes, xiii, 1-2, en l’an 44 de notre ère. Manahen dut être connu particulièrement par saint Luc, qui était d’Antioche, et l’on a supposé que c’était de sa bouche que l’évangéliste avait appris les détails, qu’il est le seul à donner, sur saint Jean-Baptiste, mis à mort par Hérode Antipas. Luc, i, 57-80 ; iii, 7-14. Antipas avait été élevé a Rome. Josèphe, Ant. jud., XVII, i, 3, et il y retourna aussitôt après la mort de son père, Hérode le Grand, pour tâcher de recueillir sa succession (4 avant notre ère). Josèphe, Ant. jud., XVII, ix, 5 ; Bell, jud., II, II, 3. Manahen l’avait-il accompagné dans la capitale de l’empire ? On l’ignore. — Josèphe, Ant. jud., XV, x, 5, mentionne un Manahen qui jouissait parmi les Esséniens d’une grande réputation de sagesse et de sainteté et qui prédit à Hérode le Grand dans sa jeunesse, qu’il deviendrait roi. C’est par anachronisme que quelques commentateurs l’ont confondu avec le Manahen des Actes, qui était de beaucoup plus jeune. Il est aussi question d’un Manahen dans le Talmud. On célèbre la fête de saint Manahen le 24 mai. Voir Acta sanctorum, maii t. v, 1685, p. 273.

F. Vigouroux.

    1. MANAIM##

MANAIM, orthographe, dans la Vulgate, Jos., xiii, 26, 30 ; xxi, 37 ; III Reg., iv, 14 ; I Par., vi, 80, du nom du lieu qu’elle a écrit plus correctement M ahanaim dans Gen., xxxii, 2, et traduit par castra, « camps, » II Reg., il, 8, etc. Voir Mahanaïm, col. 571.

    1. MANASSÉ##

MANASSÉ (hébreu : Menassêh, « qui fait oublier [ ?] » ), nom de plusieurs personnages bibliques et d’une tribu d’Israël.

1. MANASSÉ (hébreu : MenasSéh ; Septante : Mavacrtrfi), fils aîné du patriarche Joseph et de l’Égyptienne Aseneth. Gen., xli, 50, 51 ; xlvi, 20. La joie causée par sa naissance lui fit donner le nom de Manassé (de la racine nâsâh, « oublier, » au participe actif de la forme piêl, « faisant oublier » ) ; son père, en effet, s’écria : « Dieu m’a fait oublier (nassani) toutes mes peines. » Il vint au monde avant le commencement de la famine. Gen., xli, 50. Jacob, en l’adoptant et le bénissant, fit passer son frère Éphraïm avant lui, malgré les efforts de Joseph pour lui maintenir son droit d’aînesse. Gen., xlviii, 1-19. Cf. Éphraïm 1, t. H, col. 1873. Le vieux patriarche prédit cependant que Manassé serait aussi chef de peuples, et que sa race se multiplierait ; mais, ajouta-t-il, « son frère, qui est plus jeune, sera plus grand que lui, et sa postérité se multipliera dans les nations. » Gen., xlviii, 19. L’histoire des deux tribus nous montre, en effet, la prééminence de l’une sur l’autre. Voir Manassé 7 : Éphraïm 2, t. H, col. 1874. L’Écriture nous dit que Joseph put voir encore les fils de Machir, fils de Manassé. Gen., L, 22. Ces détails sont les seuls qu’elle nous ait/’conservés sur la personne de ce dernier ; les autres passages où se lit son nom se rapportent à la tribu

dont il fut le chef.

A. Legendre.

2. MANASSÉ, ancêtre de Jonathan, fils de Gersam, qui devint prêtre de Michas et des Danites de Laïs, Jud., xviii, 30, d’après le chethib du texte massorétique et d’après les Septante (Mocva<r<rij), mais le nom est altéré et il faut lire « Moïse », comme le portent le keri et la Vulgate. Voir Jonathan 1, t. iii, col. 1614.


3. MANASSÉ, le treizième des rois de Juda (697-642.) Son règne de cinquante-cinqans fut le plus long de tous ceux qu’on vit en Palestine. Manassé était fils du pieux roi Ézéchias. Il n’avait que douze ans quand il monta sur le trône. Sa mère, d’origine inconnue, s’appelait Haphsiba. L’influence qu’elle exerça sur son fils fut nulle ou perverse, car Manassé s’appliqua à mettre toute sa conduite en opposition avec celle de son père. Isaïe, qui vivait encore, ne réussit pas à maîtriser les mauvais instincts du jeune roi.

La Sainte Écriture énumère toutes les abominations dont Manassé se rendit coupable : il rebâtit les hautslieux détruits par Ézéchias, rétablit le culte de Baal, d’Astarthé et de l’armée des cieux, éleva des autels aux fausses divinités dans le Temple même du Seigneur, osa y dresser l’idole d’Astarthé, fit passer son fils par le feu en l’honneur de Moloch, s’adonna à tous les genres de magie et favorisa ceux qui les pratiquaient. Les exemples donnés par le prince entraînèrent naturellement le peuple. La dépravation devint telle, qu’elle dépassa celle des anciens Chananéens que Dieu a /ait fait exterminer à l’arrivée des Israélites. IV Reg., xxi, 1-9 ; II Par., xxxiii, 1-10.

Le Seigneur fit prédire le châtiment par ses prophètes. Juda et Jérusalem auront le sort de Samarie. La capitale sera mise en tel état qu’elle ressemblera à un plat qu’on nettoie, dans lequel il n’y a plus rien et qu’on renverse sens dessus dessous. Les habitants du pays deviendront la proie des envahisseurs. IV Reg., xxi, 10-15. Jérémie, xv, 4, annonça plus tard les mêmes calamités, en leur assignant pour cause les crimes de Manassé. Celui-ci ne fit aucune attention à ces menaces. A l’impiété, il joignit la cruauté. Il répandit à profusion le sang innocent, de sorte que la ville de Jérusalem en était inondée. IV Reg., xxi, 16. Une tradition, qui du reste n’est pas certaine, lui attribue même la mort violente du prophète Isaïe. Voir Isaïe, t. iii, col. 944. Le grand châtiment ne tomba sur la nation que plus de cinquante ans après la mort de Manassé ; le prince n’en eut pas moins à subir personnellement les conséquenses de ses crimes.

Quand Asarhaddon vint faire campagne contre l’Egypte, en 673, et s’empara de ce pays, il soumit au passage tous les rois qu’il rencontra. Une de ses inscriptions en énumère vingt-deux, parmi lesquels Mi-na-si-i soi* Ya-u-di, « Manassé, roi de Juda. » Cf. Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, Giessen, 1872, p. 228. Voir Asarhaddon, t. i, col. 1059. Assurbanipal, fils et successeur d’Asarhaddon, fit deux campagnes contre l’Egypte. Il obligea aussi les vingt-deux rois à lui « baiser les pieds », c’est-à-dire à reconnaître sa suzeraineté. Voir Assurbanipal, t. i, col. 1145. Une de ses inscriptions met au second rang, parmi ces vassaux, Mi-nasi-i sar Ya-u-di, « Manassé, roi de Juda. » Ce dernier était réservé à un châtiment plus terrible que la simple vassalité et que le tribut qui en était naturellement la conséquence. Une armée assyrienne vint le saisir et le mettre aux fers. Chargé de chaînes, il fut mené à Babylone. Mais là, il se repentit et s’humilia devant Dieu ; il fut alors ramené dans son royaume. II Par., xxxm, 11-13. On a contesté la valeur historique de ce "récit, en faisant valoir que le livre des Rois n’en dit rien, qu’Assurbanipal aurait fait conduire Manassé à Ninive, sa capitale, et non à Babylone, et qu’il ne l’aurait pas renvoyé ensuite dans son royaume. Les inscriptions d’Assurbanipal confirment, autant qu’il est souhaitable, le récit des Paralipomênes.

Persuadé que Ninive et Babylone ne pourraient longtemps se maintenir d’accord sous le même joug, Asarhaddon avait, de son vivant même, divisé son empire en deux, donnant à son aîné, Assurbanipal, l’Assyrie avec Ninive pour capitale, et réservant la Chaldée et Babylone à un autre de ses fils, Samassoumoukin ou Sarnmu IV. - 21