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    1. MALÉDICTION##

MALÉDICTION, MAUDIRE

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    1. MALÉDICTION##

MALÉDICTION, MAUDIRE, le contraire de Bénédiction, Bénir, voir 1. 1, col. 1580-1583, par conséquent acte par lequel on appelle le malheur sur quelqu’un, ou même, par extension, sur des êtres inanimés. Voir aussi Imprécation, t. iii, col. 853-854,

I. Les termes employés. — La malédiction est ordinairement appelée qelâlâh, xftrapa, maledictio, maledictum, une fois mig^érét, âvâXaxriç, increpatio, Deut., xxviii, 20, et une fois, fa’âlâh, iiôxôoç, labor, « peine. » Lam., iii, 65. Les verbes suivants signifient « maudire » : ârar, analogue à l’assyrien arâru, zâ’am, nâqab, qâbab, qillêl ; dans les Septante : àpâ<r9ai, -*aTapS<r6ai, êntica-TapâaSai, xaxoXoysïv ; dans la Vulgate : maledicere ; d’où xaiâpaio ; , èiHxaTapaxot, maledictus, « maudit. » Le verbe bârak, qui signifie « bénir », a aussi quelquefois par antiphrase le sens de « maudire ». Job, i, 5 ; ii, 5 ; III Reg., xxi, 10, 13 ; Ps.x, 3. Ce double sens se retrouve dans l’éthiopien bdrâk et dans le maltais byrek ou bârek. Cf. Buhl, Gesenius’Handwôrterbuch, Leipzig, 1899, p. 127.

II. Les malédictions divines. — La malédiction divine est particulièrement redoutable, parce que, si les hommes peuvent appeler le malheur, la justice de Dieu va plus loin et l’inflige à qui le mérite. Heureusement, les malédictions divines ne sont souvent qu’à l’état de menaces, destinées à éloigner du péché ceux qui seraient tentés de le commettre. — l°Dans l’Ancien Testament, Dieu maudit le serpent qui a servi d’instrument à Satan, Gen., iii, 14, la terre souillée par le péché de l’homme, Gen., iii, 17 ; v, 29 ; viii, 21, et Caïn meurtrier de son frère. Gen., iv, 11. Il maudit ceux qui maudissent Abraham, Gen., xii, 3, et celui que ses crimes ont fait attacher au poteau après sa lapidation. Deut., xxi, 23. On lit ici dans le texte hébreu : « Malédiction de Dieu est le suspendu, » ce que les Septante traduisent : « Maudit de Dieu, tout homme suspendu au bois. » Saint Paul, Gal., iii, 13, reproduit la sentence sous cette forme : « Maudit tout homme qui est suspendu au bois. » Il accepte l’addition uSç, « tout homme, » des Septante, et il supprime le mot’Ëlohîm, ûub ©eoû, « de Dieu, » qui se lit dans les anciens textes. Mais il les sous-entend nécessairement, puisqu’il vient de dire que n. le Christ nous a rachetés de la malédiction de la loi, en se faisant maudit à notre place ». Or il est certain que la malédiction formulée par la loi émanait -de Dieu. Saint Jérôme reproduit le texte tel qu’il est dans l’hébreu et les Septante. Aussi est-ce sans raison <ræ In epist. ad Galat., iii, 14, t. xxvi, col. 363, il accuse les Juifs d’avoir ajouté les mots’ëlohîm et ûitb ©eoû aux anciens textes, pour déshonorer les chrétiens en donnant à croire que le Christ avait été maudit de Dieu. Il n’y a rien ici à reprocher aux Juifs, car le Christ a été vraiment maudit de Dieu, en tant que chargé des péchés du monde. De longues malédictions sont portées au nom de Dieu, contre les Israélites transgresseurs de la loi. Lev., xxvi, 14-45 ; Deut., xi, 26-29 ; xxvii, 13-26 ; xxviii, 16-45 ; xxix, 20, 27 ; xxxi, 1, 17-19 ; Jos., viii, 34. Des malédictions analogues, quant à la longueur et quant aux idées, avaient été proférées, longtemps avant Moïse, par le roi de Babylone, Hammourabi, contre ceux de ses successeurs qui contreviendraient aux lois qu’il avait promulguées. Cf. Scheil, Textes élamites-sémitiques, IIe sér., Paris, 1902, p. 123131. Les malédictions divines furent souvent répétées par les prophètes contre les Hébreux infidèles aux lois mosaïques. Jer., xxiv, 9 ; xxv, 18 ; xxvi, 6 ; xxix, 18, 22 ; xlii, 18 ; xliv, 8, 12 ; Zach., v, 3 ; viii, 13 ; Bar., i, 20, etc. Sous Josias, on lut solennellement au peuple les malédictions du Deutéronome. IV Reg., xxii, 19 ; II Par., xxxiv, 24. Daniel, IX, 11, constate que ces malédictions s’étaient réalisées. Elles frappaient également le pays, à cause de ses habitants. Is., xxiv, 6 ; Jer., xxiii, 10 ; snv, 22. C’est encore la malédiction divine que les

écrivains sacrés prononcent contre les méchants, Job, xxiv, 18 ; Ps. cxix (exviii), 21 ; JEecli., xxxiii, 12 ; Sap.. ni, 13 ; xii, 11 ; contre la mauvaise langue, Eccli., xxviii, 15 ; contre ceux qui manquent de fidélité à Dieu, Jer., xi, 3, qui mettent leur confiance dans les hommes, Jer., xvii, 5, qui accomplissent mal l’œuvre de Dieu, Jer., xlviii, 10, qui déshonorent le Seigneur par un culte indigne de lui, Mal., i, 14 ; ii, 2 ; m, 9, ou qui fabriquent des idoles. Sap., xiv, 8. Ces malédictions causent la ruine de quiconque les encourt. Ps. xxxvii (xxxvi), 22. — 2° Dans le Nouveau Testament, Notre-Seigneur maudit le figuier stérile, Marc, xi, 21 ; mais il ne maudissait pas lui-même ceux qui le maudissaient. I Pet., ii, 23. Cependant c’est sous cette forme de malédictions qu’il adresse de sévères reproches aux villes coupables d’incrédulité, Matth., xi, 21, aux riches et à ceux qui cherchent leur bonheur définitif en ce monde, Luc, vi, 24-26, aux scribes et aux pharisiens, adversaires de sa mission rédemptrice. Matth., xxiii, 13-39. La malédiction divine pèse encore sur ceux qui veulent rester soumis à la Loi ancienne, Gal., iii, 10, 13, sur les âmes qui ne profitent pas de la grâce et sont comme une terre stérile, Heb., vi, 8, et sur les faux docteurs, « fils de malédiction, » qui entravent la prédication évangélique. II Pet., H, 14. Enfin les maudits par excellence sont ceux que Dieu enverra au supplice éternel. Matth., xxv, 41.

III. Les malédictions et la. Loi. — 1° Il y avait peine de mort contre celui qui maudissait le nom de Dieu. Lev, , xxiv, 11, 15. Cf. III Reg., xxi, 10, 13. La même peine était infligée à quiconque maudissait son père ou sa mère. Exod., xxi, 17 ; Lev., xx, 9. Cette pénalité est plusieurs fois rappelée. Prov., xx, 20 ; xxx, 11 ; Eccli., m, 18 ; Matth., xv, 4 ; Marc, vii, 10. Il est défendu de maudire les’ëlohîm, et le chef du peuple. Exod., xxii,

28. Le mot’ëlohîm, que les versions traduisent par le pluriel, 9eoi, dii, « les dieux, » ne désigne ici ni Dieu lui-même, qui ne saurait être mis en parallèle avec le chef du peuple, ni les dieux des nations, comme l’ont imaginé Josèphe, Anl. jud., IV, viii, 10 ; Cont. Apion., n, 33, etThilon, De monârch., 1, 7 ; De vit. Mosis, iii, 26, édit. Mangey, t. ii, p. 219, 166, pour être agréables à leurs lecteurs païens, mais les magistrats, déjà appelés du même nom. Exod., xxi, 6. Il est encore défendu de maudire le sourd, qui ne peut entendre ce qu’on dit ni se défendre. Lev., xix, 14. Par contre, des malédictions spéciales sont prescrites contre la femme soupçonnée d’infidélité, malédictions qui devaient avoir leur effet si la femme était coupable. Num., v, 19-22. Voir Eau de jalousie, t. ii, col. 1522, 1523. — 2° L’esprit de la Loi se retrouve dans le conseil de ne maudire en secret ni le roi, ni le riche. Eccle., x, 20. Il est recommandé de ne pas s’attirer, par sa dureté, la malédiction du pauvre, car Dieu l’entendrait, Eccli., iv, 5, 6, bien qu’il n’exauce pas toujours celui qui maudit. Eccli., xxxiv,

29. — 3° Notre-Seigneur ordonne à ses disciples de bénir ceux qui les maudissent. Luc, vi, 28. Les Apôtres rappellent cet ordre, Rom., xii, 14 ; I Pet., iii, 9, et s’y conforment eux-mêmes. I Cor., iv, 12 ; I Tim., iv^IO.

IV : Malédictions contre les hommes. — 1° Noé maudit Chanaan, à cause de l’irrévérence de son père Cham. Gen., ix, 25. Jacob redoute la malédiction de son père Isaac, Gen., xxvii, 12, mais celui-ci maudit ceux qui maudiront Jacob et bénit ceux qui le béniront. Gen., xxvii, 29. Balac, roi de Moab, envoie chercher Balaam, afin qu’il maudisse le peuple d’Israël. Celui-ci, sur l’ordre de Dieu, se refuse à maudire et ne profère que des bénédictions. Num., xxii, 5-xxiv, 9. La formule par laquelle il termine : « Béni soit qui te bénira et maudit qui te maudira, » se retrouve déjà. Gen., xii, 3 ; xxvii, 29. La substitution des bénédictions aux malé-