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LOI MOSAÏQUE


s’attendre à trouver, dans la législation mosaïque, un certain nombre de prescriptions déjà en vigueur parmi le peuple, consacrées par une expérience plus ou moins longue et simplement renouvelées et codifiées par Moïse. — 2. La Genèse suppose, déjà observées par les patriarches, des lois qui se retrouvent dans le code mosaïque. Le récit de la création a pour conclusion la sanctification du septième jour par Dieu lui-même, c’est-à-dire la mise à part de ce jour qui termine la semaine. Gen., ii, 2, 3. On est d’autant plus fondé à penser que le repos sabbatique a été observé par les patriarches, que la formule même du Décalogue : « Souviens-toi du jour du sabbat pour le sanctifier, » Exod., XX, 8, indique formellement le rappel d’une loi déjà en vigueur. La distinction des animaux purs et impurs est connue, avant le déluge. Gen., vii, 2 ; viii, 20. Moïse spécifie cette loi par rapport à l’alimentation, Lev., xi, 2-47 ; on en retrouve les détails dans le Deutéronome, xi, 4-21. La loi du lévirat, Deut., xxv, 5-10, apparaît dans la famille de Jacob à l’état de coutume obligatoire et indiscutée. Gen., xxxviii, 8-9. Des lois naturelles, comme celle du mariage, Gen., ii, 23, 24, la pénalité contre le meurtre, Gen., ix, 6, et la fornication, Gen., xxxviii, 24, et des lois positives, comme la prohibition du sang, Gen., ix, 4 -, la circoncision, Gen., xvii, 10-14, etc., ont également leur attache historique dans des temps bien antérieurs à Moïse. Il en faut dire autant de l’institution des sacrifices, qui remonte aux premiers âges du monde. Gen., iv, 3-5 ; vii, 20. — 3. La législation égyptienne ne paraît pas avoir eu d’influence appréciable sur le droit coutumier des Hébreux, vivant à part dans la terre de Gessen, ni sur la législation mosaïque, bien que Moïse eût été élevé dans la connaissance des sciences de l’Egypte. Act., vii, 22, Moïse a seulement emprunté à la religion égyptienne quelques formes particulières de culte et l’idée d’un certain nombre d’objets qui devaient servir dans le sanctuaire de Jéhovah. Par contre, l’influence de la législation chaldéenne est devenue indéniable, depuis la découverte du code d’Hammourabi (fig. 108 et 109). Cf. Scheil, Textes élamites-sémitiques, 2e série, Paris, 1902. Le monarque babylonien, qui vivait du xxme au xx » siècle av. J.-C, n’a sans doute pas créé de toutes pièces, lui non plus, la législation dont son code nous a conservé une partie. Toujours est-il que ces lois, antérieures à Moïse d’au moins cinq siècles, et peut-être de huit, devaient être connues et observées par les ancêtres d’Abraham, originaires d’Ur en Chaldée. Gen., xi, 28-31. Elles ont servi de base au droit coutumier de la famille d’Abraham, puis de ses descendants, enfin des Hébreux établis en Egypte. Moïse n’a eu ensuite qu’à transcrire ces lois, déjà connues et observées par son peuple, en y apportant les modifications exigées par la religion de ce peuple et en vue de son futur séjour dans laterredeChanaan. Ces lois avaient déjà la consécration du temps, elles s’adaptaient aux besoins et au caractère de la race sémitique, et beaucoup d’entre elles étaient remarquables par le bon sens et l’équité dont elles faisaient preuve. La législation mosaïque a conservé certains usages chaldéens. Voir Mariage, TalionNéanmoins des différences assez sensibles se manifestent entre les deux législations dans les articles qui leur sont communs. Le code babylonien est fait pour une société déjà avancée, dans laquelle la centralisation adminisfrative est très puissante, tandis que le code mosaïque s’adresse à un peuple qui a gardé des coutumes plus primitives, se gouverne plus simplement et doit rester plus voisin de la vie nomade des ancêtres. Sur certains points, le code babylonien paraît plus parfait que celui des Hébreux : il favorise davantage la monogamie, autorise la femme à demanderle divorce, assure l’indépendance de la veuve vis-à-vis de ses enfants, fixe à trois ans seulement le service de celui qui s’est vendu comme esclave volontaire, alors que la

loi mosaïque ne le libère qu’à l’année sabbatique. Par contre, il permet au mari de vendre sa femme pour payer une dette, ce dont la pensée ne viendrait même pas à l’Israélite. Au point de vue civil, la législation de Moïse peut paraître en retard sur la législation beaucoup plus ancienne d’Hammourabi. Elle reprend sa supériorité au point de vue religieux et ne connaît ni certaines infamies morales, ni les ordalies superstitieuses, ni les pratiques magiques que sanctionne le code babylonien.

108. — Bas-relief de la stèle d’Hammourabi, sur laquelle est gravé le code de ce roi. D’après l’original du Musée du Louvre,

Cf. Lagrange, La méthode historique, surtout à propos de l’A. T., Paris, 1903, p. 160-171.

3° Lois attribuables à Moïse. — Parmi les lois qui apparaissent pour la première fois à l’époque de Moïse, il en est dont il est l’auteur, en ce sens qu’il les a rédigées par l’ordre exprès et l’inspiration immédiate de Dieu, et qu’il a promulguées comme telles. De ce nombre sont les lois sur la Pâque, Exod., xii, 14-20, 43-49 ; xin, 3-10 ; sur les premiers-nés, Exod., xiii, l, 11-16 ; le respect de la liberté et de la vie humaine, Exod., xxi, 2-xxiii, 11 ; sur le culte nouveau et le sacerdoce d’Aaron et de ses descendants, Exod., xxiii, 14-19 ; xxv-xxxi ; Lev., i-vii ; xvi ; xvii ; xix ; xxi-xxiv, 9 ; sur les années sabbatiques et jubilaires, Lev., xxv, 1-55 ; sur les vœux et les dîmes, Lev., xxvii, 1-34 ; sur les lévites, Num., iv, 1-33 ; sur la pureté du camp, la restitution, la femme soupçonnée d’adultère et le nazaréat, Num., v-vi ; sur les lampes du sanctuaire, Num., viii, 1-4 ; sur la consécration des lévites, Num., viii, 5-19 ; sur les trompettes d’argent, Num., x, 1-10 ; sur la verge d’Aaron, Num., xvii, 1-11 ; sur les revenus des prêtres et des lévites, Num., xviii ; sur la vache rousse et l’eau de purification, Num., xix ; sur les temps des sacrifices, Num., xxviiixxix ; sur les villes lévi tiques, les villes de refuge et le vengeur du sang, Num., xxxv ; sur les héritières. Num., xxxvi, 5-9. Il est assez probable que Dieu n’a luit connaître à Moïse que le und même de ceslois, en lui laissant le soin de les rédiger et même d’en régler certains détails. — 2. D’autres fois, Moïse ordonne sans se référer directement à Dieu. Ainsi, il institue les an-