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Y Iliade, 909 vers, dans YOdyssée 847. C’est la mesure à laquelle les poètes, tant grecs que latins, se conformèrent. A part Apollonius de Rhodes et Lucrèce, ils sont très rares les poètes épiques, lyriques oudidactiques, dont les chants dépassent un millier de vers. Voir les statistiques dans Birt, p. 289-307. — Les livres de prose étaient plus considérables. Voici comment on les évaluait. On convint de prendre pour unité de mesure l’hexamètre grec renfermant en moyenne quinze ou seize syllabes et trente-cinq ou trente-sis lettres. Cette unité s’appela stique, ou « rrtjcoç, « rangée, ligne, » ou encore ênoç, « vers épique, hexamètre, » en latin versus. On obtenait le nombre de stiques d’un ouvrage soit en écrivant un exemplaire type en lignes normales, soit par une évaluation approximative. On en consignait le résultat à la fin du volume. Les grammairiens anciens et les manuscrits nous ont conservé un grand nombre d’évaluations stichométriques qui concordent suffisamment avec les faits. Voir Birt, p. 162-209. — Les Muses d’Hérodote avaient de 2000 à 3000 stiques. C’est la mesure qu’observèrent plus tard les prosateurs : historiens, philosophes, géographes, auteurs de traités didactiques. Quelques auteurs ne donnent exceptionnellement à leurs livres que 1500 ou même 1200 stiques, d’autres atteignent ou dépassent le nombre tout à fait anormal de 4000 ou même de 5000 stiques, mais la très grande majorité oscille entre 1 800 et 3000 stiques. — La stichométrie ainsi entendue — plus tard on désigna quelquefois par ce mot l’habitude de terminer la ligne avec le sens, la colométrie — offrait un triple avantage. D’abord elle permettait les références. On renvoyait au stique comme on renvoie maintenant au chapitre et au verset. De plus elle fermait la porte aux suppressions et aux interpolations au moins trop considérables. Enfin elle servait à déterminer une fois pour toutes le prix de l’ouvrage et la rétribution due au copiste. C’est même cette troisième raison d’ordre pratique qui contribua le plus sans doute à la généraliser.

3° Stichométrie des livres de la Bible. — Beaucoup de manuscrits grecs et latins offrent, à la fin de chaque livre, des indications stichométriques et on possède en outre plusieurs listes donnant la stichométrie des divers livres. Ces listes se trouvent : 1. dans le Codex Claromontanus (D de Paul, Paris, Biblioth. nat. Grec 107) entre l’Épître à Philémon et l’Épître aux Hébreux et en latin seulement ; 2. dans le manuscrit de Freisingen (Munich, lat. 6243), publié par Turner en 0000 ; 3. dans le manuscrit de F. Arevalo (Vatican, Reg. 199, fol. 84) ; 4. dans un manuscrit de la Bibliothèque Barberini, m, 36, maintenant au Vatican ; 5. dans un manuscrit du mont Athos (n. 507 du monastère de Vatopedi ) ; 6. enfin dans Nicéphore. Ces listes sont publiées en colonnes parallèles dans un article de M. D. Serruys paru dans les Mélanges d’archéologie et d’histoire (École française de Rome), 1902, fasc, 2-3 p. 196-207. Les résultats sensiblement pareils, sauf les erreurs de scribe, confirment les recherches de Ritschl, Opusculaphilolog., Leipzig, 1866, et de Graux, Nouvelles recherches sur la stichométrie, dans la Revue de philologie, 1878, p. 97-143.. Le stique renferme en moyenne de 34 à 36 lettres et le etichisme devait être établi une fois pour toutes. — S. Berger, qui a spécialement étudié la stichométrie des Bibles latines arrive à cette conclusion que, si les manuscrits latins copient quelquefois les résultats trouvés dans les manuscrits grecs, c’est l’exception : « Jusqu’à plus ample informé nous devons croire que le texte ordinaire des manuscrits latins est en général indépendant de la stichométrie des Grecs. On peut établir que ce système a été, en grande partie, créé directement, sur les manuscrits latins, par les libraires. » Cf. S. Berger, Histoire de la Vulgate, 1893, p. 322 ; pour les listes, p. 323.

II. Division actuelle des livres bibliques..— Les traducteurs grecs de la Bible se trouvèrent en présence

de plusieurs ouvrages qui dépassaient de beaucoup l’étendue d’un volume normal. La Thora renfermait la matière de quatre ou cinq rouleaux de longueur moyenne. Quand on eut séparé la Genèse et le Deutéronome, qui se détachent naturellement, le reste fut divisé en trois rouleaux et on donna à chacun un titre, résumant assez bien le contenu, pour l’inscrire, suivant l’usage alexandrin, sur l’étiquette (<x ! XXyëa ; ), appendue à l’extérieur. Ces cinq volumes furent enveloppés ensemble dans une feuille commune ou disposés dans une même boite à compartiments : on eut ainsi le Pentateuque (71 îtsvrâreuxoC) sous-entendu auyyptxpri, <n l’écrit aux cinq casiers, aux cinq compartiments » ). La division du Pentateuque est aussi logique qu’il est possible de le désirer.

— Samuel, les Rois, les Paralipomènes, qui en hébreu ne formaient respectivement qu’un livre, furent aussi coupés en deux à cause de leur longueur. Le point de division de Samuel, à la mort de Saûl, et celui des Paralipomènes, à la mort de David, fut bien choisi ; mais celui des Rois, en plein règne d’Ochozias, ne fut pas heureux. Esdras et Néhémie, qui ensemble ne forment pas un volume de longueurnormale, ne furent point divisés par les Septante. Ils comptaient Esdras-Néhémie comme second livre d’Esdras ; celui que nous nommons troisième d’Esdras étant le premier dans les Bibles grecques. Esdras ne fut séparé de Néhémie que dans les copies de la Vulgate, et cela malgré l’autorité de saint Jérôme et de saint Isidore. Quant aux cinq divisions des Psaumes, appelées quelquefois livres, elles n’ont pas pour origine le sectionnement des Alexandrins : il est probable qu’elles représentent cinq collections diverses, entrées successivement dans le canon. — Les Juifs n’acceptèrent pas en général les divisions nouvelles, introduites par les traducteurs de la Bible. Samuel, les Rois, les Paralipomènes continuèrent à être regardés par eux comme un seul livre respectivement. La division des Septante n’était encore indiquée que par un astérisque et une note dans la Bible hébraïque de Daniel Bomberg, Venise, 1516-1517. En revanche, les cinq livres de la Thora furent très anciennement connus des Juifs palestiniens ; ils s’appelaient les « cinquièmes », J}ômesim, de la Loi et étaient désignés par les premiers mots hébreux : Berêsîp, la Genèse, etc. — C’est une question de savoir si le Livre de Ruth fut ajouté par les Septante aux Juges et les Lamentations à Jérémie afin d’avoir des rouleaux complets, ou si, au contraire, Ruth fut détaché des Juges et les Lamentations de Jérémie à l’époque où les Juifs rangèrent ces deux écrits parmi les Megillôth. Le Talmud favorise expressément la première alternative, celle de l’autonomie primitive de Ruth et des Lamentations, qui est admise par la plupart des érudits contemporains. La seconde nous paraît plus probable. En effet, l’ancien canon palestinien, au témoignage de Josèphe, d’Origène et de saint Jérôme, ne comprenait que vingt-deux livres et il semble que les Lamentations ne devinrent un écrit indépendant que lorsqu’on commença à les lire publiquement, le jour anniversaire de la ruine du Temple. Nous croyons que le chiffre de vingt-quatre représente plutôt la tradition de l’école de Jamnia qui fut le berceau du rabbinisme ; et voilà pourquoi leTalmud l’a adopté. — Nous pensons du reste que les nombres fatidiques exercèrent un certain rôle sur l’admission et la classification des livres du canon. On ne voulait avoir que quatre rouleaux de prophètes, et Daniel, qui aurait fait le cinquième, fut relégué parmi les hagiographes. De même, le nombre de douze petits prophètes était sacramentel. — Les volumes se rouvraient quelquefois pour recevoir des additions admises dans le canon. Sans parler des Psaumes, formés de cinq collections distinctes, et, semble-t-il, successives, le Livre des Proyerbes comprend des parties assez hétérogènes : 1. un petit traité sur la sagesse, i-ix ; 2. les Proverbes de Salomon, ix-xxrv ; 3. les Proverbes recueillis du temps du roi