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PAUL (SAINT)
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provoquer un éclat. Il se retira donc, pour prêcher, dans la Schola d’un rhéteur nommé Tyrannus, Act., xviii, 7, sans doute affilié à la nouvelle doctrine. Ce fut là que Paul fit entendre, tous les jours, pendant plus de deux ans, Act., xx, 12, 1a parole évangélique, s’adressant, indistinctement, aux Juifs et aux Gentils. Il ajoutait encore, à ces discours publics, un autre genre d’apostolat, celui des visites à domicile et des conversations privées. Act., xx, 20, 31. Son zèle franchit bientôt les murs de la métropole et se répandit dans les peincipales villes de l’Asie proconsulaire, ꝟ. 37, où il dut fonder des Églises florissantes. En même temps, d’étonnants miracles, fort au-dessus des pratiques de magie <n usage à Éphèse, avaient créé, autour du nom de Paul, une réputation de thaumaturge divin. On exaltait surtout son pouvoir de guérison. Des exorcistes juifs, voyant l’efficacité merveilleuse des formules de Paul, essayèrent de les imiter et d’employer, dans leurs exorcismes, « le nom de Jésus que prêche Paul. » Mais le diable se-jeta sur eux et les accabla de coups. L’événement fit du bruit. Bon nombre de ceux qui, même après leur conversion, avaient continué à se livrer à la sorcellerie, furent saisis de crainte et apportèrent à Paul leurslivres de magie et les brûlèrent.

JS) Paul écrit l’Épître aux (ialates. — Ce fut, à ce qu’il semble, dans les premiers mois de sa venue à Éphèse que Paul apprit les ravages exercés par les judaïsants dans le pays des Galates. Déjà, lors de son dernier voyage dans ces contrées, des tendances de ce genre s’étaient fait jour et avaient éveillé la vigilance de Paul. Gal., i, 9. On avait cherché à diminuer la confiance des fidèles dans l’enseignement de leur Apôtre. Paul avait tout remis en ordre et pouvait dire en les quittant : « Vous courrez bien. » Gal., v, 7. Mais, aussitôt après son départ, les troubles recommencèrent. Un phariséochrétien de marque, venu sans doute de Jérusalem, se mit à battre en brèche, avec la dernière violence, la doctrine et les titres de Paul à l’apostolat. Il réussit à ébranler la confiance des néophytes. Sous prétexte de stimuler leur zèle pour la perfection, il mettait tout en œuvre pour les amener aux observances légales, voire même à la circoncision. La séduction n’était pas encore arrivée à ses fins. Il restait, dans l’Église, un noyau d’hommes spirituels, vi, 1, qui paraît avoir résisté à l’entraînement. C’est peut-être par quelqu’un d’entre eux que Paul avait appris la crise dont était menacée la communauté tout entière. Les relations entre la Galatie du Nord et la province d’Asie étaient très fréquentes. Sans tarder, Paul dépêcha un de ces disciples avec cette Épitre admirable qu’on peut comparer, sauf l’art d’écrire, aux plus belles œuvres classiques, et où son impétueuse nature s’est peinte en lettres de feu. Renan, Saint Paul, p. 314. Par la même occasion, il prescrivait aux fidèles de ces contrées la collecte en faveur des pauvres de Jérusalem. I Cor., xvi, 1. On ignore l’effet que produisit la lettre apostolique. Mais on a lieu de croire qu’elle ramena la paix au sein des Églises troublées, puisque, peu de temps après, ces dernières vinrent grossir, avec leur épargne, les aumônes destinées au soulagement de l’Église-mère, en Judée. Gal., ii, 10 ; Act., xx, 34. / x

C) Relations avec l’Église de Corinthe. — Parmi les graves préoccupations qui ont pesé sur l’âme de l’Apôtre durant ses trois ans de séjour à Éphèse, aucune n’a égalé, en importance et en intensité, celle qui lui venait de Corinthe.

1° Il faut, apparemment, dater des premiers mois qui suivirent l’arrivée de Paul en Asie la première lettre, aujourd’hui perdue (la nôtre est donc en réalité la seconde) qu’il adressa aux fidèles d’Achaïe. ICor., v, 9. Elle avait été occasionnée, semble-t-il, par le retour de certains fidèles aux habitudes de la vie païenne. Pour couper court aux scandales de cette nature, Paul avait

ordonné de rompre toute relation avec de telles gens, et cela, dans des termes si absolus, qu’ils exigèrent plus tard des éclaircissements.

2° Quelques mois après, les Corinthiens députèrent à Éphèse trois délégués, chargés de porter une lettre où ils demandaient à l’Apôtre des explications sur divers points de morale. I Cor., vii, i. Dans l’intervalle, étaient arrivés les gens d’affaires d’une riche dame de Corinthe, qui révélèrent les désordres dans lesquels était tombce la jeune Église grecque.

3° Paul écrit une nouvelle lettre, qui est notre première Épître aux Corinthiens, I Cor., iv, 17 ; xvi, 10, et peu après, il envoie Timothée à Corinthe afin de veiller à l’exécution des mesures qu’il avait prescrites dans sa lettre. Le fidèle disciple devait annoncer la collecte en Macédoine et la faire commencer en Achaïe, pour préparer le voyage de son maître à Jérusalem. Ici, la fin de l’épître, I Cor., xvi, rejoint la narration dos Actes, v, 21, 22, et en précise la portée.

4° Timothée aborde à Corinthe au moment où l’orage allait éclater. Loin de calmer les esprits, sa présence les irrite. Les judaïsants profitent de cette situation embarrassée pour mettre à exécution leurs projets néfastes. N’y tenant plus, le jeune et timide disciple, I Cor., xvi, 10, revient à Éphèse apporter à l’Apôtre ces tristes nouvelles.

5° Celui-ci, a-t-on supposé, franchit par mer la distance qui le sépare de Corinthe, dans l’espoir de ramener l’ordre et la paix, mais si ce voyage eut lieu, ce que la plupart des exégètes n’admettent pas, son autorité fut méconnue. Il fut même gravement insulté dans une assemblée publique. I Cor., ii, 1-10. Il se retira -à Éphèse, l’âme accablée de tristesse et il adressa aux Corinthiens une lettre sévère, II Cor., vii, 8, lettre perdue, qu’il faut intercaler entre notre première et notre seconde Épitre aux Corinthiens. Inquiet de l’effet produit, il envoya Tite à Corinthe, peut-être à la suite d’une sorte de revirement qui s’était dessin ! dans l’Église infidèle, et dont il venait de recevoir la confidence par quelque frère de passage ou par quelque messager. Vers ce même temps, il quitta lui-même Éphèse et se rendit en Macédoine en passant par Troade.

jD) Paul quitte Éphèse. — Un incident qui aurait pu avoir, pour Paul et ses Eglises d’Asie, des conséquences excessivement graves, vint le forcer à devancer son départ ; ce fut l’émeute excitée par Démétrius, un des principaux orfèvres de la ville. Frappé d’une baisse progressive dans la vente des produits deson industrie

— ce qui prouve, mieux que tout autre argument, le progrès de l’Évangile à Éphèse et dans les contrées avoisinantes — l’habile artisan ameuta les ouvriers contre la doctrine nouvelle. Voir Démétrius 3, t. ii, col. 1361-.

3. Nouveau séjour en Macédoine. Act., xx, 1-2. — Dès que le calme fut rétabli, Paul fit ses adieux à la communauté d’Éphèse et prit la route du Nord. Il ne lui parut pas opportun de se rendre directement à Corinthe, par voie de mer, avant d’avoir reçu de Tite des nouvelles de sa troisième lettre. La prudence lui commandait d’aller attendre à Troade l’arrivée de son disciple et de n’agir qu’après l’avoir revu. Il partit donc, accompagné de Timothée ; peut-être même s’adjoignit-il, dès ce moment, les délégués d’Éphèse et de Galatie, t. 4, chargés de porter à Jérusalem les offrandes de leurs communautés respectives. La troupe apostolique dut arriver à Troade dans les premiers jours de juin de l’an 57. Paul comptait y trouver Tite. Mais contrairement à ses prévisions, il ne rencontra personne. Quelques semaines se passèrent ainsi, sans qu’il fût possible de savoir ce qu’était devenu Tite. L’âme de l’Apôtre fut alors livrée aux plus cruelles agitations. Par moment, il se croyait au bout de ses forces et de sa patience, au point de désirer la mort. II Cor., i, 8. Les plus graves appréhensions obsédaient son esprit. Il craignait