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PAUL (SAINT)


mais nulle part, dans ses Épîtres, il ne fait allusion à l’évangélisation de ces contrées désertes et l’on ne voit aucune trace d’église dans le Hauran avant l’émigration des chrétiens de Palestine, en l’an 70. Tout porte à croire, au contraire, que Jésus conduisit l’Apôtre dans ces solitudes pour l’instruire de ses doctrines et le préparer à sa future mission.

B) Retour à Damas. — Revenu à Damas, Paul s’attachait à prouver aux Juifs que Jésus était le Messie. Ceux-ci, exaspérés par le succès de leur contradicteur, voulaient le tuer. Ils s’entendirent avec l’ethnarque qui gouvernait la ville au nom d’Arétas, pour se saisir de sa personne. On plaça des gardes aux portes de la. <iité. Mais les frères le firent échapper la nuit, en le descendant dans un panier qu’on fit glisser le long des remparts. Act., ix, 24, 25 ; II Cor., xi, 32.

C) Premier voyage à Jérusalem. — Sorti de ce péril, Paul se rendit à Jérusalem. Il désirait voir Pierre. Gal., i, 18. Il reconnaissait donc son autorité et voulait s’entendre avec lui. Les premières entrevues avec les frères de Jérusalem furent, on le conçoit, extrêmement pénibles et pleines d’embarras. Tout d’abord, les disciples le tenaient à l’écart, nul n’osait approcher de lui ; on craignait peut-être, de sa part, un horrible stratagème pour perdre ceux qu’il n’avait pu atteindre. Barnabe rassura leurs craintes, prit Paul par la main, le présenta aux frères et se fit son garant. À partir de ce moment, Paul fut admis dans l’intimité des disciples, on le regarda désormais comme un frère. Il vit peu de monde, apôtres et diacres étaient alors absents de Jérusalem, occupés sans doute à évangéliser les contrées voisines. Gal., i, 18, 19. Du reste, Paul ne demeura que deux semaines dans la Ville sainte. Les Actes attribuent ce départ précipité, ici comme à Damas, à de nouvelles embûches de la part des Juifs helléniques. Les frères, pour prévenir ce malheur, reconduisirent l’Apôtre jusqu’à Césarée au bord de la mer, d’où il s’embarqua pour Tarse, sa ville natale. Ailleurs, Act., xxii, 17, 21, Paul raconte qu’un jour, présent dans le Temple, il eut une extase, qu’il vit Jésus en personne et reçut de lui l’ordre de quitter au plus vite Jérusalem, parce qu’on n’était pas disposé à recevoir son témoignage. Le Sauveur lui promettait, en échange, un apostolat beaucoup plus fécond auprès des nations lointaines, mieux disposées à écouter sa voix.

D) Retour à Tarse. — Le nouvel apôtre se mit à parcourir la Syrie, puis la Cilicie. Tarse devint alors pour un temps, deux années au plus, le centre de ses premières missions, d’où sortiront bientôt des églises florissantes, Act., xv, 23, 41.

E) Séjour à Antioche. — C’est là que Barnabe vint, une seconde fois, tendre la main à Paul et l’amena à Antioche où venait de se former une communauté florissante. Durant une année entière, Barnabe et Paul furent unis dans la plus active collaboration. Ce fut une des années les plus brillantes et sans doute la plus heureuse de la vie de Paul. La féconde originalité de ces deux grands hommes éleva l’Église d’Antioche à une hauteur qu’aucune Église n’avait atteinte jusquelà. Les fruits de leur apostolat furent si abondants qu’ils attirèrent l’attention publique. Les regards se portèrent du côté de la communauté naissante. On comprit bientôt, à certains signes extérieurs, qu’on avait affaire à une nouvelle secte religieuse, distincte du judaïsme, dont elle était sortie et comme on entendait souvent les nouveaux convertis répéter le nom de XpiiTT(Sç, on crut que c’était là le nom de leur chef et on les appela ^pianavof. Act., xi, 26.

F) Second voyage à Jérusalem. — C’est vers cette époque qu’il faut placer le voyage de Barnabe et de Paul à Jérusalem. Voici à quelle occasion. Une famine étant sur le point de sévir, les disciples de Syrie avaient immédiatement recueilli des aumônes en faveur de leurs

frères de Judée. Act., xi, 28-30. On avait choisi les deux apôtres pour en porter le montant aux églises de Judée. Leur séjour à Jérusalem ne paraît pas avoir été de longue durée. Les deux envoyés n’y rencontrèrent point les Apôtres, ils ne trouvèrent que les anciens, sorte de sénat préposé, en l’absence des Douze, au gouvernement de la communauté. La plupart des critiques ont prétendu, il est vrai, que l’Épltre aux Galates, i, 22, excluait la possibilité de ce voyage mentionné dans les Actes, xi, 30, car alors, disent-ils, Paul s’exposerait à être taxé de mensonge, s’il omettait une seule circonstance dans laquelle il aurait pu rencontrer les Apôtres, On s’exagère la difficulté. Dès que Paul a prouvé qu’à son premier voyage à Jérusalem il n’a pas eu besoin de se faire instruire par les Apôtres, il est évident qu’une pareille instruction ne lui a pas été nécessaire plus tard, puisque son apostolat à Antioche et ailleurs était des faits suffisamment connus. Peu importait de récapituler tous les voyages qui ont suivi celui-là. II était surabondamment démontré que Paul avait prêché son évangile longtemps avant d’avoir rencontré un seul apôtre.

II. les missions. — Revenus à Antioche, Paul et Barnabe, qui avaient ramené avec eux le jeune Jean-Marc, cousin de ce dernier, Col., IV, 10, reprirent leur activité dans cette église où s’épanouissait une grande richesse de « dons spirituels », notamment ceux de prophétie et de didascalie. C’est alors que fut conçue l’idée d’une vaste propagande de l’Evangile dans le monde païen. Jusqu’ici l’annonce de la bonne nouvelle n’avait été que le résultat d’actions isolées, intermittentes, circonscrites dans un rayon relativement peu étendu. Maintenant l’apostolat va s’organiser, par l’initiative de Paul et de Barnabe, en un vaste système de forces et de dévouements, appliqués avec suite et méthode, à la conquête du monde juif, surtout du monde païen. La prédication chrétienne, limitée tout d’abord aux hauteurs de la Syrie, pénètre tout à coup presque simultanément dans les trois grandes péninsules d’Asie Mineure, de Grèce, d’Italie. Antioche est la base d’action de ces lointaines missions : c’est de là que les missionnaires partent ; c’est là qu’ils reviennent, après quelque temps, se reposer de leurs fatigues. C’est au retour de Jérusalem que les Actes placent le début des missions chrétiennes.

La chronologie de Luc, en cet endroit, Act., xir, 2425, n’est pas assez précise (xax’èxeïvov xbv xaipov, « vers ce temps-là » ) pour qu’on ose fixer la date. Il semble pourtant que d’après la contexture du chap. xii, il faut retarder le départ de nos missionnaires jusqu’à la mort d’Hérode Agrippa, vers l’an 45. C’est pendant une assemblée liturgique solennelle, précédée, comme c’était la coutume chez les Juifs, lorsqu’on se préparait à quelque chose d’important, de jeûnes et de prières spéciales, que l’Esprit intima, par la bouche de quelque prophète inspiré, l’ordre de mettre à part Paul et Barnabe pour les consacrer à l’œuvre qu’il leur destinait. Dès ce moment, les deux élus furent donc détachés du personnel apostolique de l’Église d’Antioche. L’émotion fut grande, parmi les fidèles, quand il fallut se priver du concours et de l’amitié de ceux que l’Esprit envoyait à la conversion du monde. On se prépara à la séparation par des jeûnes et des prières, puis, le jour des adieux étant arrivé, on leur imposa les mains, et on les livra à la grâce de Dieu. L’imposition des mains était, dans l’Église primitive, le rite habituel auquel on soumettait celui qui recevait quelque fonction spéciale ou quelque délégation. II Cor., viii, 19.

— Les deux Apôtres s’adjoignirent, à titre de subordonné, pour les seconder dans les soins matériels de leur entreprise, Jean-Marc, cousin de Barnabe. Voir Jean-Marc, t. iii, col. 715.

1° Première mission. Act., xiii, 4-xiv, 28. — Le par-