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PARALIPOMÈNES (LES DEUX LIVRES DES)
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quoique moins clairement, que les paroles des voyants (ou. d’Hozaï) faisaient partie du livre des rois. Cette identification toutefois n’est qu’une hypothèse, qui serait renversée s’il était démoutré qu’un des écrits prophétiques cités, tel que, par exemple, le midrasch du prophète Addo, II Par., xiii, 22, était un ouvrage distinct. L’identité admise, on peut conjecturer que le livre des Rois était divisé en sections, dont la plupart étaient attribuées à un prophète contemporain des faits rapportés.

Quant au Midras séfer ham-meldkîm, cité II Par., xxiv, 27, on ne peut affirmer avec certitude qu’il était identique au livre des rois de Juda et d’Israël ni qu’il formait une œuvre indépendante, dérivée du premier qu’il développait sous forme de midrasch. Dans la première opinion, qui est’celle de Berthëau, Hâverniek, Keil, Nôldeke, Kuenen et Wildeboer, le chroniste n’aurait eu qu’une source unique, portant le titre de midrasch ou, au moins, en ayant le caractère. Elle aurait été une rédaction plus développée des livres de Samuel et des Rois, faite en vue de l’édification. Dans la seconde, qui est celle de Strack et de Driver, il y aurait eu, à côté du livre des rois de Juda et d’Israël, reposant sur les mêmes documents que les livres canoniques des Rois, un midrasch, qui aurait été l’histoire des mêmes rois envisagée au point de vue religieux. Cf. Budde, Bemerkungen zum Midrasch des Bûches der Kônige, dans la Zeitschrift fiir die alttest. Wissenschaft, 1892, p. 37 sq.

Quoi qu’il en soit, tout en dépendant des livres canoniques de Samuel et des Rois, les Paralipomènes ont eu pour source principale le livre des rois d’Israël et de Juda, qui dérive lui-même des mêmes documents. Driver a résumé ces conclusions dans le schéma suivant :

1. Livre des chroniques des rois d’Israël.

2. Livre des chroniques des rois.de Juda.

.1.

Livre canonique des Rois.

Livredesroisd’IsraëletdeJuda.

_l

Livre canonique des Paralipomènes.

Cependant, il n’est pas démontré absolument que le chroniste ait consulté directement le livre canonique des Rois, et il se pourrait qu’il n’en dépende que médiatement, par le moyen du livre des rois d’Israël et de Juda. Cette dernière source étant perdue, on ne peut trancher la question. Seule, l’intluence, directe ou indirecte, du livre canonique des Rois sur les Paralipomènes est certaine.

3° Sources traditionnelles, écrites ou non. — En dehors des sources précédentes, le chroniste a consulté encore d’autres sources, soit des souvenirs traditionnels, soit des documents écrits. Ainsi, selon Driver, dans le livre des généalogies, les renseignements fournis I Par., iv, 22, 23, 39-43 ; v, 10, 19-22, viennent de cette origine. Ces listes étaient peut-être déjà rédigées, étant donné l’intérêt que les exilés portaient aux listes anciennes. De I Par., IX, 1, ce critique conclut que le livre des rois de Juda et d’Israël contenait des généalogies et des statistiques, reproduites ou utilisées par le chroniste.

Le P. de Hummelauer, op. cit., p. 207-211, a ébauché une théorie différente des sources du chroniste. Celuici, voulant écrire l’histoire suivie du sanctuaire de Jérusalem, depuis le règne de David jusqu’à la captivité, combine et relie les récits, relatifs à son sujet et empruntés au livre des Rois, avec quelques narrations spéciales concernant le Temple. Peut-être toutes les additions et modifications qu’il fait à sa source principale ne sont-elles pas tirées de documenta particuliers, et quelques-unes pourraient, sans détriment pour la vérité historique, avoir la forme du midrasch et n’être que des développements édifiants des récits des Rois. En outre,

DICT. DE LA BirLE.

le chroniste complète son récit par des narrations relatives aux lévites et tirées d’un autre document. Enfin, il y insère, ne pereant, des documents statistiques qui n’ont pas un rapport étroit avec son but propre et qui auraient pu être omis sans qne la trame de son histoire en fût brisée. Le P. de Hummelauer range encore dan* J cette dernière catégorie le Psaume chanté à la solennité de la translation de l’arche. I Par., xvi, 8-36. Ces sources se distinguent par leur caractère propre. Les narrations sur le Temple, qui sont très ressemblantes, formaient probablement un écrit unique, composé dans le même style diffus et ample, et contenant un récit non strictement historique, mais plus libre, présentant, sous la forme d’une véritable histoire, quelque liberté épique. Celles qui concernent les lévites ont un autre caractère et proviennent d’un auteur différent qui se complaît dans les noms de personnes et de lieux. Elles se rapprochent donc des documents statistiques qui, eux, quoique semblables par la forme extérieure, peuvent être distincts d’origine.

X. Autorité historique ou crédibilité. — Suivant l’expression de Cornill, la question de la valeur historique des récits des Paralipomènes est la question capitale. Pour les faits racontés à la fois dans ce livre ou dans les autres livres canoniques antérieurs, il n’y a pas de grave difficulté. Les termes étant souvent identiques eu à peu près, on en conclut que l’auteur des Paralipomènes a emprunté à ces livres les récits qui allaient à son but. Leur valeur historique est donc la même que "celle de là source utilisée. Mais la difficulté naît au sujet des récits propres au chroniste, à propos de ses particularités et des nombreuses additions qu’il a faites au livre des Rois et qui concernent en majeure partie le Temple et les lévites.

D’anciens critiques déclaraient catégoriquement que toutes les particularités du chroniste étaient de son invention, qu’il avait imaginé même les titres des ouvrages auxquels il se réfère, qu’il n’avait pas eu d’autres sources que les livres canoniques antérieurs, , et qu’il ne les avait pas compris, les remaniant, les embellissant et les altérant volontairement. Ces critiques rejetaient donc en bloc comme dénués de toute crédibilité tous les renseignements propres au chroniste. Telles étaient les conclusions de de Welte, Historischkritische Untersuchung ûber die Bâcher der Chronik, dans Beitràge zur Einleitung indas A. T., Halle, 1806, t. î, p. 3-132 ; Einleitung, 7e édit., Berlin, 1852, p. 237259 ; deGramberg, Die Chroniknach ihvem geschichtlichen Charakter und ihrer Glaubw iirdigkeit geprùft, Halle, 1823 ; de Graf, Die geschichtliche Bûcher des A. T., Leipzig, 1866, p. 114-247 ; et en partie de Reuss, Geschichte des A. T., p. 517. Wellhausen, Prolegomena zur Geschichte Isræls, 2e édit., Berlin, 1883, p. 177239, a accumulé les objections contre les récits du chroniste. Il lui a reproché ses omissions, le silence qu’il garde sur les faits défavorables à David et à Salomon, l’altération de ses sources, la couleur qu’il donne à certains faits, dans lesquels interviennent les prêtres, les lévites, les chantres et les musiciens du Temple. Selon lui, le chroniste juge le passé d’après le code sacerdotal, qui est d’origine récente, idéalise les événements en conformité avec cette loi et façonne un ancien peuple d’Israël à l’image de la communauté juive des temps modernes. Il lui reproche d’exagérer les fails et de grossir les chiffres d’une façon démesurée, notamment dans les affaires militaires. L’armée de David, I Par., xii, 23-40 ; xxi, 5, atteint des proportions colossales. Les prisonniers cle guerre et les victimes immolées aux jours de bataille sont parfois augmentés d’une façon invraisemblable. Au sujet de la construction du Temple, IPar., xxii, xxix, les proportions de l’édifice sont réduites, tandis que les préparatifs de la construc tion sont exagérés. D’autres faits sont transformés et

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