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PAQUE


II. Son institution. — 1° La Pâque fut instituée et prescrite par le Seigneur en Egypte, entre la neuvième et la dixième plaie. Les Hébreux reçurent l’ordre de prendre un agneau ou. Un chevreau par famille ou par maison, le dixième jour du mois, de l’immoler le quatorzième jour entre les deux soirs, de teindre de son sang les montants et le linteau de la porte, de le manger cette nuit-là rôti au feu, avec des pains sans levain et des herbes amères, les reins ceints, les sandales aux pieds, le bâton en main et à la hâte, et enfin de brûler tout ce qui en resterait. Exod., xii, 2-11. Ces prescriptions concernaient la première Pâque, à célébrer pendant la nuit même durant laquelle devaient être exterminés les premiers-nés des Égyptiens, et à la suite de laquelle ceux-ci allaient presser les Hébreux de partir. Exod., xii, 29-33. Ainsi s’expliquent les pains azymes, parce qu’on n’avait pas le temps de faire lever la pâte, l’attitude à prendre en mangeant l’agneau et la hâte avec laquelle on procédait, parce que le départ était imminent. Le sang de l’agneau mis sur les montants et le linteau des portes devait servir de signe pour que le Seigneur « passât par-dessus » les maisons des Hébreux, sans que la plaie meurtrière les frappât. Exod., xir, 13. Ce rite se retrouve dans le rituel babylonien, avec une signification analogue. Dans un sacrifice offert par le roi pour que ses fautes soient effacées aux yeux de Samas, le magicien devait sacrifier un agneau à Ja porte du palais et ensuite teindre de son sangles montants de cette porte. Cf. Fr. Martin, Textes religieux assyriens et babyloniens, l re série, Paris, 1903, p. 257.

2° À l’occasion de ce récit, le Pentateuque insère la législation qui devra par la suite régler la célébration de la Pâque. Voici les différents articles de cette législation : 1. La fête de la Pâque sera célébrée à perpétuité. Exod., xii, 14, 17, 24-27, 41 — 2. Elle aura lieu le premier mois de l’année, le mois d’abib, appelé depuis mois de nisan. Exod., xxxiv, 18. — 3. La victime pascale doit être immolée le quatorzième jour, « entre les deux soirs, » Exod., xii, 6 ; Lev., xxiii, 5 ; Num., ix, 3, 5, 11, ou « le soir, au coucher du soleil ». Deut., xvi, 6 ; Jos-, v, 10. — 4. La fête de la Pâque dure sept jours. Exod., xii, 15. — 5. Durant tout ce temps, on ne peut manger que des pains azymes et l’on ne doit pas conserver de levain à la maison. Exod., xii, 15, 1820 ; xxxiv, 18, 25 ; Lev., xxiii, 6 ; Num., xxviii, 17 ; Deut., xvi, 3, 4. — 6. On ne doit briser aucun des os de l’agneau pascal. Exod., xii, 46. — 7. On n’en peut rien emporter hors de la maison. Exod., xii, 46. — 8. Il faut qu’il soit consommé tout entier avant le matin ou que ce qui en reste soit brûlé. Exod., xii, 10 ; xxxiv, 25. — 9. La victime pascale ne peut être immolée et mangée que dans le lieu choisi par le Seigneur. Deut., XVI, 5-7. — 10. Ceux-là seuls ont le droit d’y prendre part, qui sont circoncis et en état de pureté. Exod., xii, 44, 45, 48, 49 ; Num., ix, 6, 7. — 11. Il y a assemblée du peuple le premier et le septième jour de la fête. Exod., xii, 16 ; Lev, , xxiii, 7, 8 ; Num., xxviii, 18, 25. —

12. Ces r deux jours, aucun travail n’est permis, sauf pour la préparation des aliments. Exod., xii, 16 ; Lev., xxm, 7 ; Num., xxviii, 18 ; Deut., xvi, 8. — 13. Pendant les sept jours, des holocaustes spéciaux doivent être offerts. Lev., xxiii, 8 ; Num., xxviii, 19-25. — 14. Le lendemain du sabbat pascal, le prêtre offre les prémices de la moisson. Lev., xxiii, 10-14. — 15. Ceux qui, pour cause d’impureté légale, n’ont pu célébrer la Pâque au jour marqué, la célébreront le quatorzième jour du second mois. Num., ix, 10-12. — 16. La peine du retranchement ou excommunication est prononcée contre quiconque mange du pain levé l’un des sept jours de la Pâque. Exod., xii, 15. — 17. La même peine frappe celui qui ne célèbre pas la Pâque. Num., ix,

13. — 18. Enfin, pour que le rite pascal fût compris, les Hébreux devaient dire à leurs enfants : « C’est un

sacrifice de Pâque en l’honneur de Jéhovah, qui a passé par-dessus les maisons des enfants d’Israël en Egypte, lorsqu’il frappa l’Egypte et sauva nos maisons. » Exod., xii, 27.

III. La célébration de la Pâqhe dans l’Ancien Testament. — 1° La première Pâque fut célébrée en Egypte même. Cette célébration présenta quelques particularités qui ne se retrouvent pas dans les Pâques suivantes : la mise â part de l’agneau dès le dixième jour, l’aspersion du linteau et des montants des portes avec l’hysope teint de sang, la manducation de l’agneau en lieu profane, à la hâte, sans hymne, par tous les Hébreux sans exception, purs ou non. Exod., xii, 2128. — 2° Une seconde Pâque fut célébrée un an après, au Sinaï, conformément aux prescriptions édictées précédemment. À cette occasion fut portée la loi concernant ceux que rendaient impurs le contact d’un cadavre. Num., ix, 1-14. La prescription de l’Exode, xii, 25 : « Lorsque vous serez entrés dans le pays que Jéhovah vous donnera, selon sa promesse, vous observerez ce rite sacré, » ne signifie pas que la Pâque ne devait ensuite être célébrée qu’en Palestine. La célébration au Sinaï prouve le contraire, et les divers règlements formulés au désert au sujet de la Pâque, Exod., xxxiv, 18 ; Lev., xxiii, 4-8 ; Num., xxviii, 16-25 ; Deut., xvi, 1-8, ne comportent aucune restriction. — 3° A l’entrée de la Terre Promise, Josué circoncit les Israélites et, à Galgala, on célébra la Pâque, sans que rien, dans le récit, fasse soupçonner que l’interruption de la circoncision, pendant le séjour au désert, se soit étendue à la célébration des fêtes pascales. Jos., v, 1012. — Il est probable que le voyage accompli chaque année par Elcana et ses femmes, Anne et Phénenna, pour adorer Jéhovah à Silo et lui offrir des sacrifices, se rapporte à la célébration de la Pâque. I Reg., i, 3, 7. — 4° Plus de sept cents ans après Josué, le roi Ézéchias fit célébrer une Pâque très solennelle à Jérusalem. Dans l’intervalle, la fête avait continué régulièrement chaque année, sans nul doute. Mais, à certaines époques, bien des négligences s'étaient produites et beaucoup d’Israélites se dispensaient trop facilement de l’obligation qui s’imposait à eux de se rendre annuellement à Jérusalem. Sous les rois impies, l’abstention était devenue plus générale. Du ' royaume schismatique, on venait beaucoup moins au Temple ; dans Juda même, on se négligeait d’autant plus que des rois comme Joram, Athalie, Joas, Achaz, décourageaient plus’efficacement la piété des Israélites fidèles. Ézéchias envoya dans tout son royaume et dans les tribus d'Éphraïm et de Manassé des messagers pour inviter à la Pâque. Mais les prêtres eux-mêmes ne furent pas prêts pour le premier mois. Un grand nombre d’entre eux ne se trouvaient pas dans les conditions requises de pureté légale. On remit donc la fête au second mois, comme la Loi en laissait la faculté. Num., ix, 10-12. L’invitation d'Ézéchias fut mal accueillie dans l’ancien royaume d’Israël. Quelques hommes d’Aser, de Manassé et de Zabulon vinrent seuls à Jérusalem. Ceux de Juda s’y portèrent en grand nombre. Beaucoup mangèrent la Pâque sans avoir été purifiés, tant était grande encore l’ignorance des anciennes prescriptions du Seigneur. Ézéchias pria pour que Jéhovah accordât son pardon à ces violateurs plus ou moins inconscients de la loi. L’enthousiasme fut si grand et le nombre des pèlerins si considérable qu’on se décida à prolonger la fête de sept autres jours. Les réjouissances furent telles qu’on n’avait rien vu de pareil depuis Salomon. Cette Pâque devint le signal d’une réaction vigoureuse contre l’idolâtrie. II Par., xxx, 127. — 5° Environ cent ans plus tard, la Pâque fut encore célébrée avec une solennité exceptionnelle sous Josias, à l’occasion dû renouvellement de l’alliance. Pendant les cinquante cinq ans de son règne, en effet, le fils d'Ézéchias, Manassé, avait multiplié les efforts