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1979
1980
PALESTINE


Ha-ru. C’est du moins l’avis de Max Mûller, Asien und Europa, p. 148-156, qui restreint l’extension de ce mot au pays de Chanaan, tandis que H. Brugsch, Geographische InschriftenaltâgyptischerDenkmôler, Leipzig, 1857, t. i, p. 59-60, l’applique à la Syrie tout entière. L’identification de ce nom avec celui des ïfôrîm de la Bible, Gen., xiv, 6 ; xxxvi, 20-30, etc., a été proposée par plusieurs auteurs, mais elle est combattue par Max Mûller, op. cit., p. 155-156. G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l’Orient classique, Paris, 1895-1899, t. ii, p. 121, place le Harû au sud, dans le massif du Séir. — Pour les Assyriens, la Palestine faisait partie du mât Akharri, « pays de l’Ouest, » c’est-à-dire de la côte méditerranéenne, mais ils connurent aussi ses deux grandes divisions, le royaume de Juda, mât Yaudu, et le royaume d’Israël, qu’ils appelaient mât Bît-Hwnri, « le pays de la maison d’Omri, » ou mât Ifutnrî, « le pays d’Omri. » Voir Amri 1, t. i, col. 524. Cf. E. Schrader, Die Keilinschriften und das Alte Testament, p. 90, 188.

II. Géographie physique. — À prendre strictement les noms qui viennent d’être examinés, nous n’aurions à étudier que l’étroite bande de terre, comprise entre le Jourdain et la mer Morte à l’est, et la Méditerranée à l’ouest. Celui de Palestine a la plus grande extension ; mais, s’il englobe des pays qu’on peut appeler bibliques, il dépasse les limites de la contrée où s’est proprement concentrée la vie du peuple hébreu. Aucun donc ne désigne parfaitement dans toute son étendue le territoire où ont si longtemps vécu les tribus d’Israël. Si la région cisjordane a pour elle les noms les plus glorieux, les souvenirs les plus chers au cœur du juif et du chrétien, la transjordane n’en a pas moins sa part dans l’histoire de l’Ancien et du Nouveau Testament. Notre étude, pour être complète, doit donc porter sur la double bande de terrain qui avoisine le Jourdain et la mer Morte à l’ouest et à l’est, et qui constitue vraiment le pays biblique, dans les limites que nous allons déterminer.

1. SITUATION, LIMITES ET ÉTENDUE. — Ce pays

appartient à la Syrie, dont il forme l’extrémité méridionale. Dans son ensemble et ses lignes générales, il se trouve placé entre le Liban et l’Anti-Liban au nord, le plateau du Hamad ou steppe syrien à l’est, la péninsule sinaïtique au sud, et la Méditerranée à l’ouest. Si nous voulons préciser ses contours, nous n’arriverons évidemment pas à la rigueur de nos frontières européennes ; l’état actuel de nos connaissances nous permet cependant une délimitation assez exacte. Cette délimitation n’est autre que celle des tribus israélites. Voir les cartes des tribus. Or, au nord, Aser et Nephthali ont une frontière que la nature elle-même semble avoir établie, c’est le fossé profond du Nahr el-Qasimiyéh ; aucune de leurs villes ne franchit cette barrière, que l’on peut prolonger par une ligne idéale vers l’est, jusqu’au pied du grand Hermon. Voir Aser 3, t. i, col. 1084, et Nephthali 2, t. iv, col. 1593, avec les cartes. En poursuivant cette ligne dans la même direction, on ferme, du côté du septentrion, le territoire de Manassé oriental. À l’est, cette dernière tribu, qui contenait les régions de Basan et d’Argob, Deut., iii, 12 ; Jos., xii, 4 ; xiii, 11, 30 ; xvii, 5, suivait les bords extérieurs du Ledjah, puis venait s’appuyer au Djebel Haurân, où deux points extrêmes marquaient sa limite : Chanath, aujourd’hui El-Qanaûât, et Salécha, Salhhad, plus au sud. Num., xxxii, 42 ; Jos., xii, 4 ; xiii, 11. De là, la frontière, revenant vers l’ouest, descend ensuite vers le sud avec le Derb el-Hadj ou « Route des Pèlerins », qui en dessine le tracé et clôt de ce côté les tribus de Gad et de Ruben. On arrive ainsi au torrent d’Àrnon, owadi Modjib, qui-forme la limite méridionale de la région transjordane. Voir Manassé 7, col. 644 ; Gad 4, t. iii, col. 27, et Ruben. La frontière

sud de ïa cisjordane se confond avec celle de la tribu de Juda : partant de l’extrémité méridionale de la mer Morte, elle constitue un arc de cercle qui, après avoir atteint Cadès ( l iin Qedîs), rejoint vers l’ouest le « Torrent d’Egypte », ouadi el-Arisch, et se termine à l’embouchure de celui-ci dans la Méditerranée. Cf. Jos., xv, 1-4. Voir Juda 6, t. iii, col. 1756, et la carte. L’ensemble de ce tracé correspond, au nord, au sud et à l’ouest, avec celui de la terre de Chanaan, tel que nous le trouvons Num., xxxiv, 1-12, et Ezech., XL vii, 15-20. La partie septentrionale seule présente des difficultés. S’il fallait en croire certains auteurs, on devrait reporter cette ligne frontière cent soixante-dix ou cent quatre-vingts kilomètres plus au nord ; on aurait ainsi une limite « idéale » qui n’aurait jamais été atteinte. Nous croyons qu’il est beaucoup plus naturel de ne pas quitter le terrain sur lequel nous avons dressé nos jalons. Quels que soient les embarras du texte et des identifications, l’on a réussi à faire rentrer dans un tracé normal cette ligne de démarcation. Voir Chanaan 2, t. ii, col. 533. Cf. J. van Kasteren, La frontière septentrionale de la Terre Promise, dans la Revue biblique, 1895, p. 23-36. L’Écriture, en plusieurs endroits, Gen., xv, 18 ; Exod., xxii, 31 ; Jos., i, 4, étend les limites de la Terre Promise jusqu’à l’Euphrate. Ce développement du pays israélite au nord-est, aussi bien qu’au sud, ne fut que passager, sous David et Salomon ; nous n’avons pas à en tenir compte ici.

Le pays que nous venons de délimiter ainsi se trouve donc compris entre 30° 30’et 30° 18’de latitude nord, 31°. 30’et 34° 20’de longitude est. La Palestine cisjordane est une zone qui va en s’élargissant du nord au sud. D’une largeur de 37 kilomètres au début, elle arrive à €5 kilomètres au parallèle de Qaisariyéh ou Césarée (32° 30’), à 78kilomètres à celui de JafTa (32° 3’), à 94 kilomètres à celui de Ghazzéh ou Gaza (31° 30), et elle finit par atteindre au 31° près de 150 kilomètres sur une bande de latitude très étroite. La longueur de la frontière occidentale est ainsi de 260 kilomètres. La région transjordane, large de 90 kilomètres environ entre le lac de Tibériade et le Djebel Haurdn, se resserre à 50 et 40 kilomètres le long du Jourdain et de la mer Morte jusqu’à l’Arnon. Sa longueur est de 200 kilomètres. Les ingénieurs anglais ont calculé la superficie de la cisjordane, depuis le Nahr el-Qasimiyéh jusqu’à Bir es-Seba ou Bersabée, c’est-à-dire sur une longueur de 228 kilomètres, et l’ont estimée à 15643 kilomètres carrés ; celle de la transjordane équivaut à 9 481 kilomètres. L’ensemble du pays, à part la pointe méridionale de Bersabée à Cadès, comprend donc 25124 kilomètres carrés, à peu près l’équivalent de quatre départements français. ^

il. configuration générale. — Le trait caractéristique de la Palestine, c’est cette énorme et longue fissure qui la coupe dans toute sa longueur, du nord au sud, et la sépare en deux comme un vaste fossé. De son point de départ, qui est à 563 mètres au-dessus de la Méditerranée, elle descend jusqu’à une profondeur de 392 mètres au-dessous, s’enfonçant pour ainsi dire en terre par un phénomène géologique unique au monde. Voir Arabah, t. i, col. 820. Un fleuve, le Jourdain, qui a ses sources dans les flancs de l’Hermon, y a creusé son lit sinueux et y promène son cours rapide, formant d’abord le petit lac Hûléh, à peu près au niveau de la mer, puis, plus bas, le lac de Tibériade, à 208 mètres au-dessous, déversant enfin ses eaux dans l’immense cuve de la mer Msrte, dont le niveau est à 392 mètres, dont le fond atteint près de 400 mètres et se trouve ainsi à près de 800 mètres au-dessous de la Méditerranée. Voir Jourdain, t. iii, col. 1704. De cette vallée, assez étroite par endroits et qui va s’élargissant vers le sud, monte de chaque côté, à l’ouest et à l’est, un double rang de hauteurs, dont les points les plus