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JUDA HALLÉVI — JUDAÏSANTS


phie, le christianisme, l’islamisme et le caraïsme. Pour établir la vérité du judaïsme et en montrer la sagesse et la valeur, il parcourt l’histoire d’Israël, en étudie les lois. Dans une importante digression du II" livre (paragr. 70 à 80) sur la grammaire et la prosodie hébraïque, digression souvent invoquée par les meilleurs hébraïsants, il montre, une grande pénétration et sagacité. Dans cet ouvrage il est aussi exégète de mérite ; il suit le sens littéral et le sens allégorique, avec une prédilection marquée cependant pour ce dernier sens. Il s’embarqua vers 1141 pour l’Egypte, de là il passa en Palestine où il visita Jérusalem, il alla ensuite à Damas. On ignore le lieu et la date de sa mort. L. Wogue, Histoire de la Bible et de l’exégèse biblique, in-8°, Paris, 1881, p. 231 ; Grætz, Histoire des Juifs, trad. Bloch, Paris, t. iv, 1893, p. 86-97. Pour les éditions du Khozari, voir J. Furst, Bibliotlieca judaica, in-8°, Leipzig, 1863, parꝟ. 2, p. 36-38. E. Levesque.

14. JUDA HAN-NÂSI’, « le prince ou patriarche, « appelé aussi Babbênu haqqâdôs, « notre saint docteur, » ou simplement Rabbi, comme s’il eût été le représentant par excellence de la Loi, était fils de Siméon et descendant de Hillel l’ancien. Né vers l’époque de la mort d’Akiba (vers 135 après J.-C), il mourut vers 210, renommé par sa piété, son savoir et son immense fortune. Grâce à ses richesses et à sa science, il fil conférer au nâsV ou patriarche une autorité sans contrôle, réunissant dans sa main tous les pouvoirs qu’avait autrefois le Sanhédrin. « Depuis Moïse, dit le Talmud, jusqu’à Rabbi, on n’a pas vu réunies à un si haut degré dans une seule et même personne, la Thorah et les grandeurs. » Il eut la plus grande part à la rédaction de la Mischna : il prit pour base de son travail la compilation d’Akiba, complétée et mise en ordre par Meir. Dans sa pensée, son travail n’était pas destiné à devenir le code définitil de la tradition, il l’avait composé pour faciliter son enseignement oral. Mais la considération dont il jouissait rejaillit sur son œuvre, et lit tomber dans l’oubli toutes les autres compilations de ce genre. La Mischna de Rabbi Juda devint bientôt la Mischna par excellence, il ne la rédigea pas d’une façon définitive : car elle fut complétée par ses disciples et successeurs immédiats et ne reçut sa forme dernière que vers le milieu du n s siècle. Il avait fixé sa résidence à Beth-Schearim au nord-est de Sepphoris, puis à Sepphoris, renommée par son air pur et son climat salubre, et c’est là qu’il mourut. Voir Mischna. Cf. L. Wogue, Histoire de la Bible et de l’exégèse biblique, in-8°, Paris, 1881, p. 183 ; Grætz, Histoire des Juifs, traduct. Bloch, Paris, t. iii, 1888, p. 124-136. E. Levesque.

45. JUDA (Léon de), théologien luthérien, né en 1482 à Ribeauvillé en Alsace, mort à Zurich le 19 juin 1542. S’étant rendu à Bâle en 1502 pour y terminer ses études, il s’y lia avec Zwingle d’une étroite amitié. Dix ans plus tard, il obtenait une cure en Alsace ; mais ne restait que peu dans son pays. Il retournait en Suisse à Bâle et à Einsiedeln où il retrouvait Zwingle. Tous les deux se mirent alors à prêcher contre l’Église romaine. En 1522, Léon de Juda était curé de Saint-Pierre de Zurich et, rompant entièrement avec Rome, il se maria et poussa à la guerre contre les cantons suisses demeurés catholiques. Il ne négligea rien pour faire triompher les erreurs nouvelles et, dans ce but, traduisit et vulgarisa les livres de Luther et de Zwingle. Parmi les ouvrages qu’il composa ou auxquels il collabora nous citerons : Biblia in. linguam Superioris Germanise seu helveticam conversa juxta hebraicam et grsecam fidem, in-f », Zurich, 1525 ; Annotationes in Genesim et Exodum usque ad caput xxiv ex ore Zwinglii excerptm, in-8°, Zurich, 1527 ; Novum Testamentum Germanicum cum Erasmi Roterodami paraphrasibus

per Leonem Judas toanslatis, in-f°, Zurich, 1542 ; Biblia e sacra Hebrseorum lingua Grsecorumque fontibus, consultis simul orthodoxis interpretibus religiosissime translata in sermonem latinum per theologos tigurinos, in-f°, Zurich, 1543 ; Annotationes in 1 VEvangelistas, in Passionis dominicse historiam, in Epistolas Pauli ad Romanos, Corinlhios, Philippenses, Colossenses, Thessalonicenses et in Jacobi Epistolam, ex ore Zwinglii excerptse, in-f°, Zurich, 1581. — Voir Pestalozzi, Léo Judse, in-8°, Elberfeld, 1860 ; Dupin, Bibl. des auteurs séparés de l’Église romaine du xvw siècle (1719), t. i, p. 569 ; Rich. Simon, Hist. critique du Vieux Testament, p.338 ; Græsse, Trésordes livres rares, X. iii, p. 494.

B. Heurtebize.
    1. JUDAÏA##

JUDAÏA (hébreu : hay-Yehudiijyâk ; Septante : ’Agi’a), mère de Jared, d’Héber et d’Icuthiel. I Par., iv, 18. Le passage dans lequel elle est nommée semble altéré et a été expliqué des façons les plus diverses. Judaïa parait être un surnom plutôt qu’un nom, parce qu’il est précédé de l’article et signifie « la Juive » ou « de la tribu de Juda ». Dans le ꝟ. 19, c’est elle qui, d’après plusieurs commentateurs, est appelée Odaia par corruption. Le nom de son mari n’est pas désigné clairement. De là vient que les uns la font femme de Caleb, fils de Jéphoné, les autres d’Ezra, d’Esthamo ou de Méred, ꝟ. 15, 17-18. Dans l’état défectueux du texte, il est difficile de démêler la vérité. On peut cependant supposer qu’elle tut une des femmes de Méred et reconstituer avec quelque vraisemblance de la manière suivante le, texte original. « Ceux-ci furent les fils de Béthia (t. ii, col. 1686), fille du Pharaon, qu’épousa Méred, et les fils de sa (seconde) femme, Judaïa (ou la Juive), sœur de Naham, lequel fut père (ou fondateur) de Céila, dont les habitants sont Garmites, et d’Esthamo, dont les habitants sont Maachatites. » La femme « juive » est ainsi distinguée par sa nationalité de la femme égyptienne. Voir Frd. Keil, Chronik, 1870, p. 64-65.

JUDÀiSANTS.—I. Définitions. —D’après l’analogie, « judaïser » devrait signifier « imiter les mœurs ou les manières juives, sans être Juif soi-même ». Et c’est en ce sens que le mot est employé dans Esther, viii, 17 : Beaucoup de Perses, par crainte des Juifs, se faisaient circoncire et judaisaient (mityahâdim, participe hithpahel d’un verbe dénominatif de ydhad ; Septante : ïou8aiÇov ; la Vulgate paraphrase). Dans le même sens, saint Paul reproche à saint Pierre de forcer les gentils à judaiser, Gal., ii, 14, c’est-à-dire à recevoir les pratiques judaïques relatives aux aliments, aux purifications légales, etc. Le mot ne se trouve pas ailleurs dans la Bible. L’usage moderne est moins rigoureux. On appelle en général « judaïsants » les membres de l’Église primitive, qu’ils fussent Juifs ou gentils d’origine, qui regardaient l’observation totale ou partielle de la Loi mosaïque comme nécessaire au chrétien. Naturellement, ces lausses doctrines avaientdes degrés et les judaisants pouvaient se diviser en catégories distinctes, sinon nettement tranchées : 1° ceux qui concevaient le christianisme comme une secte juive, analogue aux pharisiens ou aux disciples de Jean-Baptiste, n’admettant par suite les non-Juifs qu’en vertu de la circoncision, moyen ordinaire d’incorporation au peuple élu ; — 2° ceux qui, regardant la circoncision comme obligatoire pour les Juifs d’origine, admettaient cependant les gentils dans l’Église, mais à un rang inférieur comparable à celui des prosélytes de second ordre ou <reë<5(j.svoi (timentes, metuentes Deum) ; — 3° ceux qui, sans croire la circoncision nécessaire au salut, la jugeaient imposée par les circonstances, pour ne pas éloigner les Juifs de l’Église et pour faciliter les rapports entre les deux portions de la communauté chrétienne ;

— 4° ceux enfin qui, n’ayant pas d’idées bien précises sur l’obligation de la Loi mosaïque, continuaient à l’observer par habitude, par piété, par scrupule de