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JOUR — JOURDAIN


le mot’éréb désigne la dernière partie de l’après-midi et appartient au jour précédent. Ideler voit une confirmation de sa manière de voir dans l’expression : « entre les deux soirs, » qui désigne le temps où doivent être célébrés la pâque et le sacrifice du lendemain. Exod., xii, 6 ; Num., ix, 3 ; xxviii, 4. Sur le sens de cette expression, les sectes juives différaient. Les pharisiens, dont les Juifs d’aujourd’hui suivent encore l’interprétation, pensaient que le temps ainsi désigné était celui qui s’écoule entre la neuvième et la onzième heure, c’est-à-dire, d’après notre manière actuelle de compter, entre 3 heures et 5 heures de l’après-midi. Les Samaritains, au contraire, pensaient qu’il s’agissait du temps compris entre le coucher du soleil et la nuit noire. Us s’appuyaient sur un passage parallèle, Deut., xvi, 6, où le coucher du soleil est indiqué comme l’heure de la Pâque. Les Caraites comptaient comme les Samaritains. A. Reland, Dissertationes Miscellanex, t. ii, De Samaritanis, 22, in-8°, Utrecht, 1707 ; J. Trigland, De Karseis, iv, in-8°, Leyde, 1703. Cependant tous ces passages peuvent très bien s’accorder avec l’opinion qui fait commencer le jour hébraïque au coucher du soleil. L’expression « entre les deux soirs » désignait très probablement le temps très court qui s’écoule en Orient entre le coucher du soleil et la nuit complète. Peut-être aussi faisait-on commencer un peu plus tôt la fête des Expiations, à cause des longs préparatifs que nécessitaient les sacrifices. On trouve aussi l’expression renversée ïjjj.spovôxTiov, Ps. I, 2, pour indiquer le jour et la nuit pendant lesquels on doit invoquer le Seigneur.

3° Les jours de la semaine n’étaient pas désignés par des noms spéciaux, on comprend aisément pourquoi. Chez tous les peuples où existent ces noms, ils sont empruntés à des divinités à qui ces jours sont consacrés. Pareilles dénominations ne pouvaient exister chez le peuple hébreu qui adorait le Dieu unique. Les jours otaient numérotés de façon à ce que le sabbat fût le septième. Les fêtes étaient indiquées par le mot « jour » suivi d’un autre mot qui rappelait la nature de la fête. C’est ainsi qu’on disait : « le jour des Sorts, » Esth., ix, 28, 31 ; « le jour de la Purification, des Tabernacles, des Azymes, de la Préparation, de l’Expiation, de la Pâque, de la Pentecôte, » etc. Num., xxviii, 26 ; xxix, 1 ; xxxiii, 3 ; Lev., xvi, 29, ’xxvi, 21 ; II Mach., i, 9 ; x, 5 ; Luc, xxii, 1, 7 ; xxiii, 54 ; Act., ii, 1 ; xx, 16, etc.

4° Le jour servait d’unité pour mesurer la longueur du chemin. Exod., iii, 18 ; v, 3 ; Jon., iii, 3, 4 ; Luc, ii, 44. Il était divisé en parties portant des noms particuliers et en heures. Voir Heure, t. iii, col. 683.

5° Le mot jour suivi d’un génitif indique un événement mémorable, une bataille, un désastre. Ps. cxxxvi (cxxxvii), 7 ; Is., ix, 4 ; Ezech., xxx, 9 ; Ose., ii, 3 (hébreu, i, 11) ; II Mach., xv, 37. C’est ainsi que Jérémie, l, 27, 31, appelle le jour où Dieu châtiera ses ennemis : « leur jour. »

6° Au pluriel, le mot jour désigne une époque de l’année, les jours du printemps, de l’été, de la moisson, de la vendange. Eccli. L, 8, 9 ; xxiv, 35 ; Judith, ii, 17 ; vin, 3 ; Prov., xxv, 13, etc. Il est également employé pour signifier l’ensemble de la vie, l’époque, la période d’activité, etc. Dans ce sens, on le trouve même quelquefois au singulier. Gen., xxxv, 28, etc. ; xlvii, 9 ; jud., v, 6 ; xvii, 6 ; xviii, 1 ; I Reg. (I Sam.), xvii, 12 ; II Reg. (II Sam.), xxi, 1. De là, l’expression « les jours anciens », pour dire l’antiquité. Amos, IX, 11. De là aussi la longueur, la brièveté ou la rapidité des jours pour celle de la vie. Ps. xx (xxi), 5 ; xxii (xxm), 6 ; xxxviii (xxxix), 6 ; Job, ix, 25 ; xiv, 5 ; xvii, 1. Les annales dans lesquelles sont racontées l’histoire des rois de Juda et celle des rois de Jérusalem sont appelées le Livre des paroles (actions ! t’es jours des rois de Juda ou de Jérusalem. III ^I) Reg., xiv, 19, 20, 29 ; xv, 7, 23, 31 ; xvi, 5, 14, etc.

7° Pour exprimer l’avenir d’une manière indéfinie les prophètes se servent de l’expression : « en ce jour-là. » Is., ii, 11, 17 ; vii, 18, x, 27 ; Jer., iv, 9 ; Amos, ii, 16, etc. — La fin des jours désigne le moment où s’accomplira la prophétie et par conséquent s’applique à des périodes différentes, spécialement aux temps messianiques ou à la fin du monde. Gen., xlix, 1 ; Deut., iv, 30 ; Dan, iv, 31 ; Ose., iii, 5 ; Mich., iv, 1, etc.

8° Le jour du Seigneur est tantôt le temps de sa colère, Is., xiii, 13 ; Joël, ii, 11, 31 ; Amos, v, 18, 20 ; Sophon., i, 14-16 ; le temps de sa vengeance, du jugement ou du carnage. Is., xxx, 25 ; xxxiv, 8 ; Lam., i, 12 ; ii, 1. Cependant c’est quelquefois le jour de la consolation ou du salut. Is., xlix, 8 ; Lam., i, 21.

9° Dans le Nouveau Testament, pour dire vers cette époque, on trouve souvent les mots : t en ces jours-là. » Luc, i, 39 ; ii, 1 ; Act., iii, 24, etc. Le jour du Christ est parfois son avènement sur la terre, le temps de son incarnation. « Abraham a tressailli de joie de ce qu’il verrait mon jour. » Joa., viii, 56. « Il faut que je fasse mes œuvres tandis qu’il fait jour, » Joa., ix, 18, c’est-à-dire pendant que je suis sur la terre. Ailleurs ces mots signifient le dernier avènement, le jour du jugement dernier ; Phil., 1. 10. La fin du monde, le jour où le Christ viendra juger les vivants et les morts, est encore désigné par ces mots : « le jour, ce jour, » Heb., x, 25 ; Matth., vii, 22 ; II Tim., i, 12 ; « le dernier jour, » Joa., vi, 39, 40, 44 ; xi, 24 ; « le jour du jugement, » Matth., xi, 22 ; Joa., iv, 17 ; « le jour de la colère, » Rom., ii, 5 ; « le jour du Seigneur, » II Thess., ii, 2 ; cf. Luc, xvii, 22, 24, 30 ; Act., ii, 20 ; Rom., ii, 16 ; II Cor., i, 14 ; Apoc, vi, 17, etc. ; « le jour de Dieu. » II Pet., iii, 12. C’est évidemment par allusion au « jour du Seigneur », dans le sens de jour du jugement, que saint Paul, I Cor., IV, 3, emploie l’expression « le jour de l’homme »,-jm> àvôpwm’vï] ; TjHÉpaç, pour signifier un jugement humain.

10° Le contraste entre le jour et la nuit a donné lieu à certaines expressions métaphoriques. Les chrétiens sont « les enfants du jour », c’est-à-dire de la vérité et des bonnes œuvres, tandis que l’erreur et le mal sont « les œuvres de la nuit ». I Thess., v, 5, 8. Cf. Rom., xiii, 13. Le jour est le temps du travail. Joa., ix, 4 ; xi, 9. Par contre la vie présente avec ses obscurités, au milieu desquelles la prophétie luit comme un flambeau, est comparée à la nuit, la réalisation de la prophétie sera la lumière du jour, II Pet., i, 19 ; le jour c’est le temps du salut qui approche. Rom., xiii, 12. « Tel fait une distinction entre les jours. Celui qui distingue les jours agit ainsi pour le Seigneur, » dit saint Paul. Rom., xiv, 5, 6. Enfin, dans Matth., VI, 34, se trouve le proverbe : « À chaque jour suffit son mal. » E. Beurlier.

    1. JOURDAIN##

JOURDAIN (hébreu : hay-Yardên ; Septante : ’Iop-Sâvïi « ; Vulgate : Jordanis), fleuve de Palestine (fig.291).

I/Nom. — Son nom, en hébreu, est toujours précédé de l’article, excepté dans deux passages, dans Ps. xlii (xli), 7, et Job, xl, 23 (Vulgate, 18). En ce dernier endroit, il désigne, non pas le Jourdain proprement dit, mais un cours d’eau impétueux en général. Hay-Yardên est dérivé du verbe yârdd, « descendre, » et signifie « le descendant », sans doute parce que la pente de son cours est très considérable et qu’il « descend » avec beaucoup de rapidité. Cette étymologie est aujourd’hui généralement admise. Voir Gesenius, Thésaurus, p. 626. D’après saint Jérôme, Yardên serait composé de deux mots. « Le Jourdain, dit-il, Comment, in Matth., t. III, xvi, 13, t. xxxi, col. 114-115, prend naissance au pied du Liban, et il a deux sources, l’une appelée Jor et l’autre Dan, lesquelles réunies forment le nom de Jordanis. » Cette explication fut universellement acceptée, sur l’autorité du saint docteur, par les anciens pèlerins et par les commentateurs de l’Ecriture ; mais elle est certainement inexacte, comme l’a démontré