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JOSEPH


cette expression par « mariée » ou par « fiancée » ? Les Pères ne sont pas d’accord. Saint Thomas pense que le mariage était contracté, mais que la célébration solennelle n’avait pas encore eu lieu ; il croit que Matth., i, 20 : « Ne crains pas de recevoir Marie ton épouse, » doit s’entendre de la célébration solennelle du mariage, quoique Marie fût déjà dans la maison de Joseph. Sans rejeter comme impossible l’autre interprétation, il déclare que celle-ci s’accorde mieux avec le texte évangélique : Prirtium tamen, magis consonat Evangelio. III », q. xxix, a. 2, ad3° m. — De nos jours l’opinion que le mariage ne fut contracté qu’après l’Incarnation compte beaucoup de partisans : on en donne les raisons suivantes : 1° L’impression générale du récit. Matth., 1, 18-25. La lecture de ce passage, laite sans idée préconçue, porte naturellement à y voir la relation du mariage de Marie et de Joseph. — 2° Le vrai sens de desponsari, desponsata, [ivyjcttsusîv, n’est point « épouser », mais « se fiancer » ; c’est tellement vrai, que Luc, i, 27, unit desponsata à virgo : or on dit bien une « vierge fiancée », mais on ne peut pas dire une « vierge mariée ». — 3° Chez les Juifs les fiançailles solennelles précédaient le mariage, qui n’était célébré ordinairement qu’un an plus tard : la grande cérémonie consistait à conduire la fiancée dans la maison de son époux. Deut., xx, 7. C’est ainsi qu’il paraît plus naturel d’entendre antequam convertirent, Matth., i, 18 ; à cette époque Joseph et Marie n’habitaient pas dans la même maison ; par conséquent ils n’étaient pas mariés. Cf. Patrizi, De prima Angeli ad Josephum Mante sponsum legalione Comment., Rome, 1876 ; Id., De Evangfliis libri 1res’, Fribourg, 1855, t. ii, p. 123-124 ; Fillion, Evangile selon saint Matthieu, Paris, 1889, p. 41, 42. Il faut remarquer d’ailleurs qu’en soi la question n’a pas une grande importance, les fiancés ayant les droits des époux. J. Knabenbauer, Comment, in Matth., 1892, p. 17-18.

II. Marie devient mère de Jésus.

On peut conjecturer avec assez de fondement que Joseph était établi depuis longtemps à Nazareth avec Marie quand eut lieu le mystère de l’Annonciation. Luc, i, 26-27. — Joseph ne tarda pas à être soumis à une rude épreuve : la sainte Vierge avait conçu du Saint-Esprit. Matth., i, 18 ; Luc., i, 35. Saint Joseph ignorait complètement le secret du mystère de l’Incarnation ; Marie ne lui avait rien dévoilé. Quand le saint patriarche s’aperçut qu’elle allait devenir mère, il ne voulut pas la diffamer et la dénoncer pabliquement ; il songea à la répudier en secret, sans bruit, c’est-à-dire, en se tenant à la teneur même de la loi mosaïque, sans mentionner dans le document, le libellus repudii, les motifs du renvoi. Matth., i, 19. — Comme il méditait ce projet, l’ange du Seigneur lui apparut en songe, le rassura et lui fit connaître le mystère de la conception virginale : Marie enfantera un fils, et Joseph devra l’appeler Jésus, parce qu’il sauvera son peuple de ses péchés. Matth., 1, 20-21. Joseph, rassuré par ce songe, fit comme l’ange lui avait prescrit. Matth., i, 24.

III. Voyage a Bethléhem.

Joseph résidait à Nazareth, lorsque fui publié le décret de César Auguste, prescrivant le dénombrement des habitants de l’empire dans leur lieu d’origine. Il fut ainsi obligé de se rendre à Bethléhem, pour se (aire inscrire avec Marie, son épouse, qui était enceinte. Luc, ii, 1-5. Pendant qu’ils étaient dans cette ville, Marie enfanta son fils premier-né. Luc, h, 6-7. Les bergers des alentours, prévenus par l’ange du Seigneur, se rendirent à Bethléhem pour voir le mystère qui s’y était accompli, t. 8-15 ; ils y trouvèrent Marie Joseph et l’enfantcouché dans une crèche.^. 16. — Lorsque les Mages vinrent adorer l’enfant dans la crèche, il n’y a pas de doute que Joseph ne fût présent, quoique le texte ne le mentionne pas. Matth., ii, 11. — Les jours de la purification prescrite par la loi pour la femme qui relevé de ses couches étant accomplis, Joseph et Marie, se rendirent à Jérusalem pour y présenter l’enfant au

Temple et faire les offrandes légales. Luc, ii, 21-24. Le vieillard Siméon, homme juste et craignanfDieu, prit l’enfant dans ses bras, le bénit, et chanta un cantique de joie et d’action de grâces, Luc, ii, 25-32 ; le père et la mère de Jésus furent dans l’admiration : Siméon les bénit et annonça à Marie que l’enfant était établi pour la ruine et la résurrection d’un grand nombre en Israël. Luc, ii, 33-34. Il est difficile de déterminer si le voyage à Jérusalem eut lieu avant ou après la visite, des Mages.

IV. Fuite en Egypte.

Après le départ des Mages, sans qu’on puisse préciser le temps, l’ange du Seigneur apparut en songe à Joseph, il lui prescrivit de se retirer en Egypte avec la mère et l’enfant, et d’y rester jusqu’à nouvel ordre, parce qu’Hérode méditait la perte de l’enfant. Joseph obéit immédiatement et se rendit en Egypte, Matth., ii, 13, 14 ; il y resta jusqu’à la mort d’Hérode. Matth., ii, 15. À la mort de ce monarque, l’ange lui apparut de nouveau en songe et lui dit de retourner dans la terre d’Israël. Joseph se leva aussitôt, prit l’enfant et sa mère et se mit en route pour son pays. Mais, apprenant qu’Archélaùs régnait en Judée, à la place de son père, il craignit d’y aller, et, averti pendant son sommeil, il se retira en Galilée dans la ville de Nazareth. Matth., ii, 19-23.

V. Joseph a Jérusalem.

Saint Luc, ii, 40, raconte que chaque année les parents de Jésus allaient à Jérusalem pour la célébration de la Pâque. À l’âge de douze ans Jésus monta avec eux à Jérusalem. Après la fête, Marie et Joseph repartirent sans se douter que l’enfant ne les suivait pas. En chemin, ayant constaté que Jésus n’était pas avec les pèlerins, ils retournèrent à Jérusalem et, après trois jours de recherches, ils le trouvèrent dans le Temple discutant avec les docteurs. Aux questions de sa mère, Jésus répondit en disant qu’il devait vaquer aux affaires de son père. Il descendit alors avec eux à Nazareth et il leur était soumis. Luc, ii, 42-51.

VI. Mort de Joseph.— Les Évangiles ne nous apprennent plus rien sur la vie du saint patriarche. On peut induire seulement qu’il était mort avant la Passion du fait que Notre-Seigneur sur la croix confia sa mère aux soins de l’apôtre saint Jean. Joa., xix, 27. Cf. Act., i, 14. Comme il n’est pas nommé non plus, quand il est dit que Jésus était cherché par sa mère et ses frères, Matth., xii, 46 ; Marc, iii, 31 ; Luc, viii, 19, on conclut généralement de cette omission que le saint patriarche n’était plus vivant. L’opinion commune qu’il était mort avant* le commencement de la vie publique du Sauveur est probablement fondée. Quant à la durée de sa vie, elle n’est mentionnée que dans les Évangiles apocryphes. L’Histoire de Joseph le charpentier, 10, le fait mourir à 1Il ans. Evangelia apocrypha, 2e édit., Tischendorꝟ. 1876, p. 126. Il finit probablement ses jours à Nazareth et c’est là qu’il dut être enterré. Les plus anciens monuments figurés représentent saint Joseph encore jeune au moment de son mariage avec la sainte Vierge ; ce n’est que plus tard, sous l’influence des légendes des Évangiles apocryphes, qu’on l’a représenté comme déjà vieux à cette époque. De Waal, dans F. X. Kraus, Encyklopadie der christlichen Alterlhhmer, 1886, t. ii, p. 73.

VII. Prérogatives de saint Joseph.

Les prérogatives de saint Joseph ont été clairement énurnérées et expliquées par Suarez. — 1° Joseph fut vraiment l’époux de la sainte Vierge. — 2° De là il mérita d’être appelé et d’être regardé comme le père de Jésus-Christ. — 3° Joseph n’eut pas seulement le nom de père, il en eut aussi l’affection, la sollicitude et, s’il est permis de parler ainsi, l’autorité. — 4° Pour le même motif, Joseph fut en quelque sorte le chef et le supérieur de la sainte Vierge, et même de Jésus-Christ en tant qu’homme. — 5° Enfin Joseph fut uni à Marie et à Jésus par un lien tout spécial d’amour, et de parfaite amitié, qui résultait de sa grande dignité, Opéra, Paris, 1860, t. xix, Disp. Ylll, De sancto Joseph