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JOËL — JOËL (LIVRE DE)


prophet., xiv, t. xun, col. 407. On a supposé aussi qu’il était prêtre ou lévite à cause de la mention qu’il fait des offrandes, des fêles du temple et des prêtres ; d’autres auteurs au contraire pensent qu’il n’était pas prêtre à cause de la manière dont il parle des prêtres, I, 13 ; II, 17. Kaulen, Einleitung, 3e édit., Fribourg, 1892, p. 406. L’époque où il a vécu est fort discutée. Voir ce qui est dit sur la date de sa prophétie dans l’article suivant.

16. JOËL (LE LIVRE DE). — I. OCCASION ET DIVISION.

— La prophétie de Joël fut écrite à l’occasion d’une invasion de sauterelles, dont nous chercherons plus loin à déterminer la signification, telle qu’on n’en avait jamais vu de pareille. Ce premier fléau fut suivi d’un autre non moins terrible : les sauterelles avaient tout dévasté dans les champs ; une grande sécheresse qui survint après et qui dura plusieurs années mit le comble à la désolation.

— La prophétie, outre un court préambule, 1, 1, se divise en deux parties, qui ont la forme de discours : 1° i, 2-n, 17 ; — 2° ii, 18-m. Les deux parties sont nettement marquées et séparées par deux versets qui servent en même temps de transition, ii, 18-19 : « Le Seigneur a montré du zèle pour sa terre, il a pardonné à son peuple. Et le Seigneur a répondu et dit à son peuple, etc. »

II. Analvse.

i" partie : i, 2-il, 17. — Elle peut se subdiviser en deux sections : 1° Description de l’invasion des sauterelles, i, 2-n, 11. — Le prophète décrit d’une manière générale l’horreur de cette invasion, i, 24 ; — puis il la décrit graduellement pour mieux montrer le deuil de chacun : les vignes sont détruites et les ivrognes ne peuvent plus satisfaire leur passion, ꝟ. 5-7 ;

— le peuple est convié à se lamenter, parce que, par suite de la dévastation des champs, on ne peut plus offrir le sacrifice, ꝟ. 8-12 ; — les prêtres aussi doivent gémir, eux qui sont chargés d’annoncer au peuple la gravité de la situation et de l’exhorter à la pénitence, ꝟ. 13-17 ; — le prophète décrit les souffrances des bêtes des champs et adresse une prière à Dieu, ꝟ. 18-20 ; — il annonce que le jour du Seigneur est proche et en décrit toutes les horreurs, ii, 1-11. — 2° Exhortation à la pénitence, ii, 12-17 ; Dieu, par la bouche de son prophète, exhorte le peuple à se convertir et à faire pénitence de ses crimes ; cette pénitence doit être avant tout « intérieure », ꝟ. 1214 ; — elle doit aussi se manifester par des « actes extérieurs », ꝟ. 15-17.

Il" PARTIE : ii, 18-IH. — Le prophète promet au peuple, qui s’est converti et a fait pénitence, une foule de biens ; cette partie embrasse quatre sections, dont chacune annonce un bien particulier : 1° L’ennemi du peuple de Dieu sera bientôt détruit, et une pluie abondante apportera la fertilité à la terre, ii, 18-27. — 2° Le deuxième bien sera une effusion du Saint-Esprit sur son peuple et sur toutes les nations, ꝟ. 28-29. — 3° Le troisième c’est le jour du Seigneur ; ence jour le Seigneur anéantira tous les ennemis des Juifs ; il indique les signes avant-coureurs de ce jour, ꝟ. 30-32, et décrit le jour lui-même, m, 1-17. — 4° Enfin le quatrième bien, suite du our du Seigneur, le plus précieux, sera la plénitude des bénédictions messianiques, iii, 18-21.

III. Authenticité.

Nous ne nous arrêterons pas à démontrer l’authenticité de la prophétie de Joël, parce qu’elle n’a jamais été contestée par personne, du moins dans son ensemble. Quelques auteurs ont bien mis en question l’authenticité de certains passages, car ils ont prétendu’reconnaître différents auteurs, différentes mains ; mais ceci touche à la question de l’unité littéraire dont nous allons nous occuper.

IV. Unité d’auteur. — I. théorie rationaliste. — Certains critiques, parmi lesquels se distingue M. Vernes, Le peuple d’Israël et ses espérances, p. 46, dans Méanges de critique religieuse, in-12, Paris, 1881, p. 221, cf. Trochon, Les petits prophètes, Paris, 1883, p. 94,

ont soutenu l’existence de deux Joël. Af. Vernes s’appuie sur les deux parties de la prophétie qui seraient, prétend-il, inconciliables ; ces deux parties contiennent la description du jour de Jéhovah ; pour l’auteur de la première description, i-ii, 27, 1e jour de Jéhovah consiste dans une invasion de sauterelles et dans une sécheresse, tandis que pour l’auteur de la seconde description, ii, 28-in (hébreu, m-iv), il consiste dans la victoire remportée par Jéhovah sur les nations ennemies ; ces deux conceptions ne peuvent appartenir au même auteur ; elles supposent deux auteurs différents et deux dates différentes : il faut donc distinguer, d’après lui, un Proto et un Deutéro Joël.

u. preuves de l’usité d’auteur. — L’unité d’auteur se prouve : 1° Par l’évidence interne : tout dans la prophétie est tellement enchaîné, tout se tient d’une manière si étroite et se suit d’une manière si régulière, tout y est si bien ordonné qu’il est impossible d’y reconnaître deux auteurs. — 2° Par la conciliation des deux descriptions : la différence de la double description du jour de Jéhovah s’explique si l’on se place dans la situation et les circonstances du prophète : « Pendant l’invasion des sauterelles, Joël invite ses compatriotes à voir dans ce fléau le signe avant-coureur du jour de Jéhovah, le début du châtiment du peuple d’Israël. Mais, après que le peuple s’est repenti, le prophète lui promet la bénédiction divine, le triomphe sur ses ennemis et le jour de Jéhovah désigne alors le jour du châtiment des nations païennes. » Bruston, Histoire critique de la’littérature prophétique des Hébreux depuis les origines jusqu’à la mort d’Isaie, Paris, 1881, t. i, p. 41. Cf. Ed. Montet, De recentissimis disputahonibus de Joelis setate, in-8°, Genève, 1880 ; H. Grætz, Der einheitliche Charakter der Prophétie Joels, in-8°, Breslau, 1873.

V. ÉPOQUE DE LA COMPOSITION DU LIVRE.

La date

de la prophétie de Joël est très discutée. Jahn, Einleitung, t. ii, p. 502, soutient qu’il vécut et prophétisa sous Manassé (688-633). — J. A. Theiner, Die zivôlf Propheten, Leipzig, 1830, p. 59, et Bertholdt, Einleitung, p. 1604, le font vivre sous Ézéchias. — Eckermann, Ioel metrisch ùbersetzt, 1786, croit qu’il vécut sous le > roi Josias (640-625). — D’après Bunsen, Gott in Geschichte, 3 in-8°, Leipzig, 1857-1858, t. iii, p. 19, il aurait vécu et prophétisé entre 956 et 946, après l’invasion de Sésac, roi d’Egypte, la 5= année du règne de Roboam. — Pour T. F. Bauer il prophétisa en 915. — Le docteur Karle, Joël ben Phatuel, in-8°, Leipzig, 1877, place son ministère entre 950-945. — Les opinions principales sont les suivantes :

I. joel est antérieur À isaie et À amos. —La grande majorité des exégetes est d’accord sur ce point. Les raisons sur lesquelles on s’appuie relèvent de la critique interne : 1° Isaîe connaissait les oracles de Joel ; il a reproduit, xiii, 6, un membre de phrase de Joel, I, 15, « parce que le jour est proche. » Cf. aussi Is., XIII, 10, etJoel, , ii, 10. Cf. Jer., xxv, 30, etJoel, iii, 16. —2° Amos, qui a vécu sous Ozias, roi de Juda, et Jéroboam II roi d’Israël, connaît Joel et l’imite : a) premiers mots de la prophétie d’Amos, l, 2, et Joel, m (hébreu, iv), 16, ces mots appartiennent au contexte de Joel ; donc c’est Amos qui a emprunté ; b) Amos termine sa prophétie ea décrivant presque dans les mêmes termes que Joel, . « les montagnes [qui| distilleront la douceur, » la prospérité future de la Palestine ; Amos, ix, 13, et Joel, m (hébreu, iv), 18 ; — c) lorsque Amos, iv, 9 b, représente Dieu se plaignant d’avoir envoyé inutilement les sauterelles pour amender le peuple, il paraît faire allusion à la plaie décrite par Joel, i, 4 ; ii, 25 ; la chose est d’autant plus naturelle qu’ils emploient le même mot, gdzâni, pour désigner la sauterelle ou la chenille ; d} enfin il paraît exister un certain parallélisme entre Joel, m (hébreu, iv), 4-10, et Amos, I, 6-10.

II. LE COMBIEN DE TEMPS A-T-IL PRÉCÉDÉ AMOSf — H